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Roundup, de qui se moque-t-on ?

roundup

Épandage de pesticides sur une plantation de carottes à Jeju-Do, Corée du Sud (33°27’ N – 126°34’ E). © Yann Arthus-Bertrand

Le photographe et cinéaste écologiste Yann Arthus-Bertrand s’indigne de la proposition formulée par la Commission européenne de prolonger de 10 années supplémentaires l’agrément du Roundup et des pesticides à base de glyphosate. Il fait part de sa colère sur les intentions européennes d’accorder un sursis au produit dont la nocivité fait débat et en appelle au principe de précaution.

La semaine dernière, j’ai lu dans Le Monde que la Commission européenne souhaite prolonger d’une décennie l’autorisation des pesticides de la famille glyphosate, dont le plus connu est le Roundup. Cette décision me choque profondément à plusieurs titres. D’une part, elle va à l’encontre des recommandations du Parlement européen élu démocratiquement. D’autre part, d’un point de vue sanitaire et environnemental, prolonger l’agrément de ces herbicides est une aberration. Le scandale est d’autant plus important qu’une fois de plus le pouvoir de l’argent et des lobbys agro-industriels semble supplanter l’intérêt général.

A l’heure où tout le monde s’accorde sur l’urgence de réduire la consommation de pesticides, renouveler l’autorisation  du Roundup et d’autres produits pour 10 ans me semble au mieux absurde, au pire criminel. Cette logique-là ne va pas dans le bon sens. Le Parlement Européen avait demandé 7 années au lieu des 15 proposées à la base par la Commission.

Heureusement, rien n’est encore joué puisque la décision doit être prise au mois de mai. D’ici là, il revient donc à la société civile, les ONG,  les militants, les citoyens et les personnes de bon sens soucieuses de l’environnement et de la santé de faire entendre nos voix. Il faut que les décideurs européens sachent les raisons qui nous conduisent à refuser le renouvellement de l’agrément accordé aux pesticides glyphosates. Et qu’ils entendent notre refus de ces produits dont certains sont déjà interdits à la vente aux particuliers en France.

Le signal, que les décideurs européens envoient, va à l’encontre de la transition écologique et d’une agriculture respectueuse du vivant et des sols. Cela m’indigne qu’on veuille étendre de 10 ans cet agrément au moment où, au contraire, il faut apprendre à sortir des pesticides. Revoir l’autorisation d’un produit est le moment de dresser un bilan sur ce qu’il apporte et sur ce qu’il coûte. Certes, le recours aux pesticides et aux herbicides a pu permettre à l’agriculture de produire plus, mais aujourd’hui, ce paradigme est à revoir. Des décennies d’usage montrent que le coût économique, social et humain de ces produits est  conséquent. Il dépasse le prix payé par les agriculteurs pour acheter ces produits, lui-même répercuté sur le prix de vente aux consommateurs. En effet, ces substances nuisent à la biodiversité, fragilisent les écosystèmes et entrainent des maladies.

Le sujet est sensible et suscite des controverses qui ne sont pas clairement tranchées. En effet, le glyphosate, substance employé dans le Roundup, est mis en cause comme cancérigène par le CIRC (centre international de recherche sur le cancer), une assertion que l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) refuse puisque cette dernière estime que : « il est improbable que le glyphosate soit génotoxique (c.à.d. qu’il endommage l’ADN) ou qu’il constitue une menace cancérogène pour l’homme. Les experts n’ont pas proposé que le glyphosate soit catégorisé comme cancérogène dans la réglementation de l’UE sur la classification, l’étiquetage et l’emballage des substances chimiques. » Et c’est sur ce point que la Commission se base. Cependant, les critiques ont été nombreuses à l’égard des conclusions de l’EFSA à qui une centaine de scientifiques ont reproché le manque de transparence de son étude. Et l’incertitude subsiste.

Dans l’incertitude et le doute, pourquoi ne pas se prévaloir du principe de précaution et aller dans la direction  d’une réduction du recours aux produits chimiques. Il en va du courage et de la responsabilité des décideurs. Les exemples passés de problèmes sanitaires, comme le tabac ou le diesel, montrent qu’il faut parfois prendre du recul et aller contre les idées dominantes de son époque. Aujourd’hui, les chercheurs s’interrogent sur les effets cumulés des molécules chimiques, même à faible dose. Mettre fin à l’autorisation du glyphosate serait une décision sage et raisonnable, elle serait d’autant plus légitime si elle était prise démocratiquement après un débat ouvert. Une telle décision ne peut être acceptable et acceptée que si elle est assortie d’un plan d’accompagnement pour développer les alternatives qui existent pour désherber.

Encadrer et interdire, c’est aussi créer des opportunités. Enfin, à ceux qui diront que trop de réglementation tue la compétitivité et la croissance, je tenais à leur dire que récemment l’OCDE a conclu dans une étude que « les pays qui mettent en œuvre des mesures environnementales rigoureuses ne voient pas leur compétitivité à l’exportation se dégrader par rapport à ceux qui appliquent des politiques plus timides ». Bien que cette étude ne porte pas spécifiquement sur le secteur agricole, elle me semble relever du bon sens. Par conséquent un meilleur encadrement des substances chimiques potentiellement nocives pour l’homme et l’environnement s’avérerait co-bénéfique tant pour l’environnement que pour les êtres humains et l’économie. Et c’est aussi se tourner vers l’avenir que de  favoriser ainsi la redécouverte de pratiques agricoles,  l’innovation, la créativité et l’invention de nouvelles manières de cultiver plus en accord avec leur milieu.

Il est inutile de repousser l’échéance. Il nous faut tourner la page du Roundup une bonne fois pour toutes. Car rien ne changera si une décision courageuse n’est pas prise maintenant, même si elle peut sembler radicale aujourd’hui. Au-delà des études et contre-études, cette décision est devenue maintenant une décision politique. Or j’attends des décideurs politiques qu’ils placent l’intérêt général avant toute autre considération.

18 commentaires

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    • Mona

    Il existe des produits naturels…. À base de plantes. Encourageons le développement de ces recherches et nous en finirons avec ces poisons. En attendant, vidons les rayons des jardineries afin d’empêcher leur vente.
    Notre volonté contre tous ces lobbies ne doit pas faiblir.

    .

    • Luc

    Malheureusement le Roundup n’est pas interdit à la vente pour les particuliers en France. Certains magasins l’ont retirés de plein gré, mais on le trouve encore dans beaucoup de chaîne.
    http://roundup-non-merci.desobeir.net/agir-avec-nous/2015/06/23/la-vraie-fausse-interdiction-du-roundup-le-coup-de-com-de-segolene-royal/#more-386

    • Anonyme

    Bonjour,
    Une nouvelle pratique est née ces dernières années, y compris en France, qui est de traiter les cultures au Roundup juste avant la récolte (la dessication). Cette pratique absurde fait ingurgiter le Roundup dans sa composition la plus toxique, dans le mélange cancérogène probable. La pratique est totalement « cachée » et explique l’explosion de l’utilisation des produits à base de glyphosate au lieu de la décrue espérée.

      • Francis

      C’est une ancienne pratique qui servait à éradiquer le chiendent et qui n’est plus autorisée . Le chiendent n’est plus un problème. Quant à » l’explosion » de son utilisation, elle est due à l’abandon du labour. Ce qui est en soi une bonne chose, l' »explosion » est provisoire , après 3 ans ,un équilibre se rétablit et on revient au régime normal. Ma propre expérience le prouve.

    • Francis

    La photo est comme d’habitude hors sujet pour tromper les non-initiés. Le round-up qui contient 360g par litre de glyphosate s’utilise à la dose de 3 litres/ha ce qui fait 0,108 gramme au m2. Chacun peut vérifier sur Wikipédia que le glyphosate est composé d’un acide aminé, la glycine et d’acide phosphorique. Or ce qui fait le caractère cancérigène d »une molécule, c’est quand elle contient un ou plusieurs ou beaucoup de noyaux benzéniques. C’est le cas du Lasso, sa matière active et l’adjuvant sont tout deux dérivés du benzène. C’est le cas des hydrocarbures aromatiques polycycliques, le mot cycle désigne l’hexagone benzénique. C’est le cas de toutes les molécules dont le nom contient la racine « ben » ou « phénol ». Le glyphosate qui n’est pas un dérivé du benzène ni non plus un organochloré n’est pas anodin mais étant utilisé massivement depuis 1980, si vraiment il était catastrophique, ça se saurait. Ce n’est pas une raison pour s’en servir à tord et à travers,on sait qu’il perturbe la flore du sol ,qu’il est toxique en ingestion directe. On doit chercher à réduire son utilisation mais il y a d’autres sujets plus inquiétants. Ceux qui ont regardé le documentaire sur le fluor hier soir 26 avril sur France 5 comprendront.

      • Céline

      Francis, sur la problématique de la dangerosité de la matière active, et d’elle seule, certes, je ne peux (malheureusement) qu’être d’accord avec vous.
      Mais, MAIS: vous omettez de parler de la dangerosité des adjuvants, indispensables à l’efficacité de destruction que l’on connaît à ce pesticide.
      MAIS, vous omettez aussi de parler de l’extrème dangerosité de l’AMPA qui est le produit issu de la dégradation du pestide.
      mensonge par omission, donc. c’est pas bien….

    • RINGENBACH

    PUISQU IL Y A DES ETUDES QUI DEMONTRENT SA TOXICITE
    LE ROUNDUP DOIT ETRE STOPPER DE SUITE
    LES 10 ANS DE PLUS POURQUOI
    LE BENEFICE N ETANT PAS POUR LES POPULATIONS ILS REVIENT A QUI CE NE PEUT ÊTRE QUE CEUX QUI ACCORDENT CE DELAI ENVERS ET CONTRE TOUS LES VIVANTS TERRIENS

    • Francoise Callier

    Si vous ne croyez pas à la dangerosité du RoundUp ouvrez les yeux…
    Plus de 10.000 médecins argentins demandent la suspension des épandages.
    http://www.reportagebygettyimages.com/features/stories-of-a-wounded-land/

    • Manu

    Nous avons des supers intiatives à l’image le la PERMACULTURE ou l’art de vivre avec la nature et enrichir les sols et de l’autre le loby des GROS rouleaux compresseurs qui ne pensent qu’à remplir leurs poches et amasser le + possible au détriment du bon sens!….A nous individuellement de boycoter ces trusts et développer chacun à petite échelle…..le bon sens!

      • Martine

      Complètement d’accord

    • Aubarecy

    Des effets à très faibles doses ! Les 1° concernés,comme les populations du Paraguay ou de l’Argentine qui vivent à proximité… Un cancérogène probable selon l’Organisation mondiale de la santé, qu’il cause des malformations chez les enfants lorsque les mères y sont exposées et qu’il modifie la composition des bactéries de l’intestin causant des diarrhées des animaux qui consomment Soja & Mais OGM . Mais surtout qu’on retrouve ce pesticide dans les aliments que l’on donne aux animaux d’élevage, par exemple un agriculteur nous explique qu’il donne 2 kg de soja OGM traité au Glyphosate par jour à ses vaches, dont des vaches laitières. On apprend que la moitié des protéines végétales données aux élevages en France et en Belgique proviennent de ce soja produit en Argentine , au Brésil , aux USA.
    http://www.criigen.org/…/Roundup-toxique-a-des-doses…

    • vallois

    Est-il donc impossible de recourir à une objectivité scientifique dans ce domaine ?
    Est ce que les dix ou quinze plus grands spécialistes européens dans le domaine de la nocivité des engrais ne sont pas approchables pour pondre une pétition au delà de notre pays ?
    Bien à vous,
    Georges-Philippe Vallois

    • mona

    Et nous vendons des territoires agricoles immenses au Chinois (en région berry)….
    Auront-ils le droit d’apporter aussi leurs ogm…? Ils viennent d’accorder leur importation en Chine.
    Peut-être que pour arroser le « casse-croûte » aux céréales ogm, ils fourniront « l’apéro » au roundup. ..!!
    Tout cela est ignoble et prouve le manque d’autorité de nos gouvernants.
    Mme Royal et ses promesses… elle aussi, nous enfume ….. qu’elle passe un jour où les épandages se font sur les champs.. une odeur révélatrice et quelques heures après les yeux qui piquent et la peau qui démange… elle saura ce que provoque tous ces poisons.
    Ah, elle est belle et malsaine, notre campagne. ..!!
    Honte à tous ceux qui défendent et autorisent ces produits mortels à plus ou moins longue échéance.

    • mona

    Commençons l’instruction de nos jeunes agriculteurs dès le lycée agricole.
    La permaculture est l’espoir qui nous fera vivre sainement….
    Autant que faire se peut… l’air est aussi pollué par le trafic de l’aérospatiale de plus en plus dense.
    De mon jardin en perma, je constate… Le ciel rayé des vapeurs de kérosène, sans interruption. A cela, s’ajoutent les hélicoptères, les avions de l’armée à très basse altitude et… les petits avions privés, de plus en plus nombreux… Les baptêmes de l’air (business is business ).
    Tout va à l’encontre du bon sens.
    L’argent mène la danse…. macabre…!!

  • Celà veut simplement dire que les commissaires européens touchent des royalties de la part de ces pollueurs. Il faut virer cette europe qui n’engendre que des problèmes pour les « sans pouvoir » que nous sommes. Eux, abusent du leur pour le laps de temps qu’ils sont aux manettes et en profitent pour se goberger. Et je ne parle pas de leur retraîte à vie qu’ils ont sans attendre « notre » âge légal de départ. L’europe, à mon avis, à l’époque Schengen, devait se faire à 6 ou 8 pays. Et si celà marchait, un de plus. Et ainsi de suite. Maintenant nous sommes 29 pays qui n’ont rien à faire dans cet espace. Parce que les trois quart se gobergent sur le dos des rares pays qui douillent. Et au prix fort. Virons les et organisons une vraie europe . Avec un « E » majuscule.

  • Monsieur Yann Arthus-Bertrand pourrait bien soulever ici un problème extrêmement grave : celui de l’intégrité de nos députés et dirigeants européens. Lorsque l’on sait ce qui s’est passé avec la « prime chauffage des sénateurs » validée par le « conseil constitutionnel » ou quand on a lu le livre de John Stauber et Sheldon Rampton « L’industrie du mensonge » sur le lobbying on se dit qu’une organisation écologique comme celle de Goodplanet ne disposera probablement jamais d’un budget comparable à celui d’un fabricant de pesticides décidés à défendre ses intérêts. Quand on observe la dégradation alarmante de la biodiversité on se dit qu’il faudra bien trouver une solution au problème de l’argent roi ou alors cela pourrait bien être la dérive vers l’extrême droite. J’espère vivement que nous ne sommes pas dans cette situation dans le cas soulevé par Yann. D’après Wikipédia, ce produit Roundup est semble-t-il un herbicide et non un pesticide. Faire mourir certaines plantes ne tue peut-être pas les insectes et la faune aquatique en abrégeant très probablement la vie de l’homme comme le fait les pesticides ???????

    • Corinne

    Arretons d acheter cette merde et surtout informons les acheteurs dans les magasins de bricolage et jardinerie. Ce sera mon obtions . Le gouvernement ne fera jamais rien et surtout pas notre exeptionnelle ministre de l ecologie.

    • stephane

    De nombreux travailleurs agricoles, jardiniers et agents d’entretien des espaces verts, des sites publics ou industriels, utilisent des herbicides de façon intensive et prolongée et leur usage ne cesse d’augmenter régulièrement.
    Or, cette utilisation des herbicides, fréquente et massive, par épandage, saupoudrage ou pulvérisation, présente des risques pour la santé des travailleurs exposés et pour l’environnement (présence dans l’eau et l’air). Si les herbicides sont moins toxiques que les insecticides, les effets aigus et chroniques associés aux herbicides sont néanmoins souvent à la base de troubles cutanés, ophtalmologiques, digestifs et neuromusculaires et certains sont allergisants. De plus, plusieurs herbicides sont classés comme cancérogènes probables ou possibles et aussi comme perturbateurs endocriniens.
    source : La prévention des risques professionnels des herbicides : http://www.officiel-prevention.com/protections-collectives-organisation-ergonomie/risque-chimique/detail_dossier_CHSCT.php?rub=38&ssrub=69&dossid=533