Les besoins réels sont-ils les seuls à dicter notre conduite en matière de consommation de biens et de services ? Absolument pas. Le plus souvent, le consommateur est aussi influencé par le design et les modes de production des produits ainsi que par la façon dont ils lui sont présentés. Parallèlement, les industriels méconnaissent les souhaits et les besoins des consommateurs: impossible dans ces conditions de produire des biens et des services adaptés, les conséquences étant souvent un gaspillage de ressources, des coûts élevés et une dégradation de l’environnement.
Les chiffres de la consommation d’énergie dans le secteur du bâtiment illustrent parfaitement ce problème. Nous avons aujourd’hui accès à une technologie et à des solutions permettant de réduire significativement la consommation d’énergie pour le chauffage, la climatisation et la ventilation des bâtiments. Il existe même aujourd’hui des édifices indépendants de toute source d’alimentation extérieure. Certes, ces solutions ont un coût initial en général plus élevé que des installations plus traditionnelles, mais elles permettent de réduire les dépenses de fonctionnement puisqu’elles sont moins gourmandes en énergie. Si l’on prend en compte le cycle de vie des bâtiments, on s’aperçoit que les constructions efficaces sur le plan énergétique engendrent des coûts inférieurs à ceux constatés pour les habitations plus classiques.
C’est bien cela que le marché peine à comprendre: architectes et entreprises de construction se disputent les contrats et cherchent par conséquent à limiter les coûts, finissant par opter pour des solutions traditionnelles au détriment de l’efficacité énergétique des bâtiments. De même, les promoteurs immobiliers ne témoignent pas non plus d’un grand intérêt pour l’efficacité énergétique des constructions à long terme, puisqu’ils ne sont pas voués à les occuper eux-mêmes, mais à les vendre ou les louer à d’autres. Ce sera donc à ces occupants de supporter les coûts énergétiques, eux qui ne disposent pourtant pas de moyens leur permettant d’influer sur le choix du promoteur ou du propriétaire au moment de la mise en place des solutions énergétiques pour la maison. Aussi le marché immobilier continue-t-il d’opter pour les solutions traditionnelles et moins efficaces alors que les habitations éco-énergétiques sont à la fois plus économiques et plus durables lorsque l’on prend en compte leur cycle de vie.
Implantée à Paris, la Division Technologie, Industrie et Économie du PNUE mène, au nom de l’organisation, une action en faveur de la consommation et de la production durables. Fiers du chemin parcouru en à peine plus de trente ans, depuis nos débuts en 1975, nous sommes bien conscients que le véritable progrès n’est possible que si l’on travaille main dans la main avec les différentes parties prenantes. Contrairement à bien d’autres organisations des Nations unies, nous travaillons non seulement avec les gouvernements et la société civile, mais aussi en étroite collaboration avec le secteur privé. Nous avons à ce jour établi des partenariats avec divers secteurs: le secteur financier, les télécommunications, la construction automobile et le tourisme n’en sont que quelques exemples. Il est temps pour nous à présent d’inciter le secteur du bâtiment à faire un pas vers le développement durable.[…]
Le secteur du bâtiment a un impact très négatif sur l’environnement : sa consommation d’énergie et de ressources naturelles, sa production de déchets ainsi que l’utilisation qu’il fait de matériaux nocifs en sont des exemples frappants. Les constructions contribuent grandement aux émissions de CO2 puisqu’elles représentent à elles seules jusqu’à 40% de la consommation totale d’énergie au niveau mondial. Ce secteur génère également 30 à 40% des déchets se trouvant dans les décharges et consomme plus de 20% des ressources d’eau douce.
Les estimations prenant en compte l’accroissement de la population et le vieillissement du parc immobilier (c’est-à-dire tous les bâtiments ayant besoin d’être rénovés ou reconstruits) indiquent que la consommation de ressources, comme la génération de déchets, augmentera de 30% en valeur absolue ces vingt prochaines années. Indéniablement, le secteur du bâtiment joue un rôle prépondérant pour l’avenir de notre société, une société dont il permet le développement. Des réformes s’imposent néanmoins. […]
Cela paraît d’autant plus évident que le secteur industriel doit affronter certains problèmes majeurs. Comme nous l’avons déjà précisé, le secteur du bâtiment peut absorber à lui seul 40% de l’énergie consommée dans le monde, et est donc responsable des émissions de gaz à effet de serre qui découlent de cette utilisation. Le changement climatique est peut-être la plus grande menace environnementale à laquelle notre société doit faire face et les experts de toutes nationalités s’accordent maintenant à dire que, si nous voulons éviter le bouleversement total du système climatique, nous devons prendre des mesures bien plus drastiques que celles qui ont été prises jusqu’à présent pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.
Le protocole de Kyoto, mécanisme international de lutte contre le réchauffement climatique actuellement en place, touchera à sa fin en 2012, date après laquelle nous espérons la signature d’un nouvel accord. Cet accord devra nécessairement afficher une plus grande sévérité envers les différents secteurs de la société en ce qui concerne la réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre. Il n’existe néanmoins à l’heure actuelle aucun effort conjoint des différents secteurs, à l‘échelle internationale, permettant au secteur du bâtiment d’agir activement en faveur de la réduction des gaz à effet de serre. Certes, à des niveaux nationaux, en particulier dans les pays ayant ratifié le protocole, les programmes favorisant l’efficacité énergétique sont nombreux, mais les mécanismes permettant d’équiper les bâtiments de systèmes énergétiques optimaux durant tout le cycle de vie des édifices sont encore rares. Il n’existe pas non plus d’effort de la part du secteur dans son ensemble pour se doter des outils et des méthodes nécessaires pour faire des acteurs du bâtiment des partenaires incontournables du protocole de Kyoto ou de l’après-protocole.
C’est pourquoi le PNUE a confié à l’Initiative Construction Durable (SBCI – Sustainable Building and Construction Initiative) une mission prioritaire: faire que le changement climatique devienne une préoccupation majeure dans le secteur du bâtiment et permettre aux parties prenantes de ce secteur de jouer un rôle actif dans la lutte mondiale contre le réchauffement climatique. D’autres tâches seront évidemment inscrites dans l’agenda de la SBCI, mais le défi du changement climatique restera son objectif premier.
Sustainable Building and Construction Initiative, Launching meeting
http://www.unepsbci.org/
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