La question du recouvrement énergétique des panneaux photovoltaïques a longtemps été réglée par l’utilisation de modules modernes capables de restituer l’énergie investie pour leur fabrication en l’espace de quelques années au maximum. L’efficacité énergétique de la cellule comme du module a progressé, tandis que l’énergie nécessaire à leur fabrication diminuait. La durée de vie moyenne d’une installation photovoltaïque étant au minimum de 30 ans, il ne fait aucun doute qu’elles produisent beaucoup plus d’énergie qu’elles n’en requièrent pour leur fabrication et installation. C’est d’ailleurs grâce à ce bilan énergétique positif qu’elles peuvent être considérées comme une source d’énergie durable.
Au cours des dernières années, l’industrie solaire photovoltaïque a connu des taux de croissance supérieurs à 35% par an, tant à l’étranger que sur le marché intérieur (d’après les études de Photon et PV News Market). Il y a tout lieu de s’en réjouir, si l’on espère que l’énergie photovoltaïque couvre un jour une part significative des besoins mondiaux en électricité.
L’Agence internationale de l’énergie prévoit une augmentation de 66% de la consommation mondiale d’énergie entre 2000 et 2030 (soit un rythme de 1,7% par an) et la demande spécifique d’électricité pourrait doubler dans le même temps.
Pour les besoins de la démonstration, nous nous concentrerons ici sur la consommation électrique et le marché photovoltaïque en Californie. Nous considérerons que toutes les installations de Californie ont été fabriquées dans l’État à partir de matériaux également produits dans l’État.
Du fait de la croissance de l’industrie photovoltaïque, des quantités toujours plus importantes d’énergie doivent être consommées pour la fabrication de nouveaux modules, ce qui devient problématique si l’énergie investie en vient à représenter une part notable de l’énergie produite. Il s’impose alors d’améliorer l’efficacité énergétique des méthodes de fabrication des modules et installations photovoltaïques.
Nous cherchons ici à montrer la nécessité d’adopter des technologies minimisant l’énergie investie, donc capables d’alimenter un fort taux de croissance et de produire de l’énergie propre, tout en maintenant un bilan énergétique nettement positif. Ce changement est nécessaire pour des raisons tant économiques que d’optimisation des ressources.
Temps de retour actuel sur énergie investie
La fabrication de modules photovoltaïques et de systèmes complets est très coûteuse en énergie. En 1998, les calculs de M. Alsema avaient fait apparaître un temps de retour sur énergie investie de quatre ans pour les panneaux au silicium polycristallin utilisés à l’époque, en intégrant au calcul du bilan énergétique les dépenses de fabrication, montage, installation et la consommation d’énergie des panneaux. En 2000, MM. Knapp et Jesper, étudiant une unité de fabrication de modules au silicium monocristallins, ont estimé le temps de retour à 3,3 ans. Ce résultat prend en compte l’énergie consommée pour la fabrication de cadres en aluminium, la purification et la cristallisation du silicium, mais exclut l’énergie investie pour la fabrication de composants du système tels que les convertisseurs, le réseau câblé et les dispositifs de montage. Il conviendrait donc de rajouter environ 6 mois au temps de retour obtenu.
Les produits et procédés développés depuis la publication des études de M. Alsema et de MM. Knapp et Jester (elle-même déjà postérieure à la collecte des données) ont ramené le temps de retour à une estimation de 2,6 ans.
Énergie nécessaire à la croissance
Pour une installation photovoltaïque donnée dont le temps de retour serait de 4 ans, une croissance du secteur de 25%/an suffirait à absorber la totalité de la production énergétique. […]
Ce cercle vicieux peut continuer indéfiniment : ainsi, tous les modules opérationnels à ce jour fourniraient juste assez d’énergie pour couvrir les dépenses de fabrication des modules produits cette année, qui eux-mêmes suffiraient juste à assurer la fabrication de ceux de l’année prochaine, etc.
Temps de retour sur énergie investie (en années)
Plus le temps de retour est long, plus le taux de croissance sectoriel supportable sans apport extérieur d’énergie est faible. Le Tableau 1 présente les taux de croissance acceptables pour différents temps de retour. Celui de 2005 a été évalué à 2,6 ans en s’appuyant sur les estimations de M. Alsema et MM. Knapp et Jester, datant de 5 à 7 ans, corrigées des progrès ultérieurs de l’industrie en termes d’efficacité énergétique.
Variables
Facteur de réduction de la croissance du secteur: ce taux permet d’estimer le ralentissement de la croissance d’un secteur industriel. On observe en général des taux plus élevés dans un secteur mature que dans un secteur naissant. En 2004, l’industrie photovoltaïque pouvait encore être considérée comme jeune, de sorte qu’un taux de croissance de 35%, quoique remarquable, n’était pas pour autant inédit.
Cependant, à ce rythme, elle ne tardera pas à devenir une industrie de poids. Son taux de croissance finira alors par ralentir, entre autres parce que les investissements initiaux nécessaires deviendront trop lourds, même selon les critères des marchés financiers. Shell estime ainsi qu’avec un taux annuel de croissance de 25%, l’industrie aura besoin dans 10 ans d’un capital financier et circulant de l’ordre de 200 milliards de dollars. Pour les besoins de cette étude, on retiendra donc un taux de réduction de la croissance de 3,5% par an.
Facteur de réduction du temps de retour: les progrès industriels permettent de produire sans cesse plus efficacement les tranches (wafers), cellules, modules et dispositifs: l’énergie consommée pour la fabrication diminue alors que celle produite par le système augmente, réduisant ainsi le temps de retour. Pour l’analyse initiale, nous retiendrons un taux annuel de réduction du temps de retour de 6%. […]
Analyse initiale
Le graphique 3 illustre la réduction du temps de retour et le taux de croissance du secteur sur une période de 50 ans en se basant sur les facteurs de réduction mentionnés ci-dessus. En 2055, on peut envisager, dans le cadre d’une hypothèse haute, que l’industrie photovoltaïque fournisse 43% de l’électricité californienne tout en connaissant un taux de croissance de l’ordre de 6%.
Le graphique 4 montre le résultat d’une analyse en fonction des valeurs de ces variables. On constate une nette augmentation de la production d’électricité photovoltaïque démarrant aux alentours de 2020. Cependant, l’énergie investie reste non négligeable. […]
Conclusion
Les 20 prochaines années constitueront une période d’incubation préparant l’explosion de la production nette d’électricité photovoltaïque aux alentours de 2025. D’ici 2055, l’industrie photovoltaïque sera en mesure de couvrir 40% des besoins réels d’électricité en Californie.
La réduction régulière du temps de retour sur énergie investie laisse d’ailleurs espérer, si l’on concentre les efforts sur cet aspect, que ce résultat puisse être atteint à plus court terme.
Photovoltaic (PV) energy payback vs PV input energy due to market growth
Andy BLACK
Solar World Congress 2005, Orlando, Florida
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