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Ecosystème et bien-être des populations: les zones humides et l’eau

Un certain nombre de grands enjeux économiques étroitement liés expliquent pourquoi la perte et la dégradation des zones humides et d’autres écosystèmes se poursuivent, bien que les avantages découlant de leur conservation soient souvent plus importants que ceux tirés de leur conversion.

À certains endroits, les intérêts que présente la conversion sont supérieurs à ceux apportés par la sauvegarde de la zone humide, par exemple sur les terres agricoles fertiles ou à la périphérie des surfaces urbaines en expansion. Toutefois, en raison des disparitions, de plus en plus nombreuses, de zones humides, la valeur relative de la conservation de celles qui sont encore préservées augmente et ces conversions devraient donc se raréfier.

Les individus à qui la conservation des zones humides profite le plus sont souvent les habitants de ces régions, des acteurs que l’on a la plupart du temps exclus du processus décisionnel. Les décisions relatives aux zones humides sont souvent prises sans prendre en compte les besoins locaux ou manquent de transparence et de responsabilisation.

Le lien entre les services écosystémiques fournis par les systèmes naturels et leur impact sur les populations est souvent méconnu. Si un système se détériore, les services écosystémiques dont les populations dépendent seront également dégradés. Bien que les études et les attestations aient été peu nombreuses et bien que les décideurs n’en aient pas tenu compte, il a été démontré que, même lorsque l’on se penche sur un petit nombre de services écosystémiques, leur disparition du fait de leur conversion a plus de poids que n’importe quel avantage marchand. Les difficultés techniques substantielles quant à la réalisation de certaines évaluations sont certes compréhensibles, mais les travaux à venir devront se concentrer sur la comparaison des prestations de divers services en fonction des différentes utilisations des terres afin de mieux informer les décideurs. Les processus de décision dépendent néanmoins des structures de gouvernance en place.

Beaucoup de services fournis par les zones humides sont non-marchands. C’est le cas de la réduction des inondations, de la régulation du climat, de l’alimentation des nappes souterraines et de la lutte contre l’érosion.

Ces services profitent à la société dans son ensemble à l’échelle aussi bien locale que mondiale. Aucune mesure financière incitative n’étant mise en place pour sauvegarder ces « biens publics« , ils se dégradent aujourd’hui de façon continue, une dégradation qui va à l’encontre des intérêts de la société. Or, lorsqu’un acte a pour conséquence la dégradation d’un de ces services et, par là même, porte préjudice à des individus, aucun mécanisme de marché n’existe (et, dans la plupart des cas, ne peut exister) pour leur garantir une compensation. Ainsi, préserver autant que possible les habitats naturels nécessitera souvent des mécanismes compensatoires afin de limiter l’impact prévisible des intérêts privés et locaux, en particulier dans les pays en développement. L’élaboration d’instruments de marché qui évaluent, au niveau privé, la valeur sociale et globale d’écosystèmes relativement peu perturbés est une étape essentielle vers la durabilité. Ces instruments sont par exemple les crédits-carbone ou biodiversité ou le fait de pratiquer des prix élevés pour le poisson sauvage pêché de façon durable ou le bois abattu dans le respect de l’environnement.

Enfin, les bénéfices privés de la conversion sont souvent gonflés par des subventions qui faussent le jeu. Au Canada, mais aussi à travers les États-Unis et l’Europe, le drainage des zones humides pour l’agriculture a été encouragé par les bénéfices privés tirés des incitations fiscales et des subventions gouvernementales. Si, à court terme, ces programmes peuvent sembler pertinents en ce qui concerne les objectifs publics et privés, ils seront, à long terme, inefficaces sur le plan économique et ils provoqueront l’érosion des services naturels. Au total, ce sous-ensemble de subventions aux effets pervers, tant au niveau économique qu’au niveau écologique, se chiffre entre 950 et 1.950 milliards de dollars par an (l’écart s’expliquant par les subventions cachées des coûts externes qui peuvent ou non être prises en compte). Identifier ces distorsions et tenter de les supprimer permettrait à la fois de réduire la disparition des habitats naturels, de libérer des fonds publics pour le financement d’une utilisation durable des ressources et d’économiser de l’argent.

Ecosystem and human well-being: wetlands and water

Évaluation des Ecosystèmes pour le Millénaire (EM), p. 46 & 64

Les rapports présents sur le site de l’Evaluation des Ecosystèmes pour le Millénaire

2005

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