Plus il y a de vélo, moins il y a d’accidents, de pollution et d’embouteillages. Entretien avec Patrice Nogues, vice-président de la FUB (Fédération des Usagers de la Bicyclette). Crée en 1980, la FUB regroupe 170 associations locales de cyclistes sur toute la France.
Quelle est la meilleure raison pour se déplacer en vélo ?
Je vois, à titre individuel, quatre grandes raisons de faire du vélo en ville : c’est le plus rapide et le plus pratique des moyens de transports, c’est bon pour la santé, c’est pas cher et c’est bénéfique à l’environnement.
En vitesse moyenne, le vélo est tout aussi rapide que la voiture dans les villes denses, avec une moyenne de 15 km/h ; il est même plus rapide si l’on compte le temps de stationnement. De surcroît, il est plus adapté aux villes car on ne perd pas de temps à chercher une place de stationnement ; il est facile de faire de petits sauts de puces de porte à porte. Pour se rendre, par exemple, de l’école à la boulangerie, on peut laisser son vélo devant puis repartir avec au travail. Bref, le vélo redonne à la ville toute sa proximité.
En quoi cela est-il bénéfique pour la santé ?
L’OMS (Organisation mondiale de la santé) préconise de faire quotidiennement une demi-heure d’activé physique modérée, notamment pour prévenir les risques de maladies cardiovasculaires et l’obésité. Il ne s’agit pas de sport, juste de pratiquer un peu d’exercice. En se déplaçant à vélo, vous cumulez une activité physique légère à une dimension utilitaire, puisqu’on se déplace 5 fois plus vite en vélo qu’en marchant. Il faut se sortir de la tête l’image du tour de France : en ville, rouler à vélo n’est pas plus fatiguant que de marcher. Bien sûr, si vous n’avez pas fait de vélo depuis 20 ans et que vous grimpez une côte, cela semblera difficile, mais après 6 mois, vous n’y prêterez plus attention.
Pourquoi le vélo n’est-il pas cher ?
Avec l’augmentation du prix de l’essence à un euro cinquante le litre, le vélo se montre aussi très économique. En moyenne, sur plusieurs années et pour quelques milliers de kilomètres, avec l’entretien et les accessoires (antivol, gants, protection contre la pluie), un vélo revient à 5 centimes le kilomètre parcouru. Il faut compter 250 euros pour un vélo de moyenne gamme, et doubler le prix pour quelque chose de plus confortable.
Bien sûr, le vol de vélo augmente le coût moyen. Pourtant, avec de bons antivols et en attachant correctement le cadre, le risque est limité. Par ailleurs, il faut savoir que la plupart des vélos volés sont retrouvés, mais pas restitués. C’est pour cette raison que l’on a développé le bicyode, un système de marquage permanent du cadre qui permet d’identifier les vélos et leur propriétaire. (http://www.bicycode.org)
Quels sont les bienfaits collectifs ?
Faire le choix du vélo diminue l’impact de nos déplacements sur l’environnement en réduisant les rejets polluants en ville. De plus, le vélo est silencieux : il aide à lutter contre le bruit qui est une des nuisances les plus courantes et agaçantes en ville. Un autre gain à ne pas négliger est celui de l’espace. En ville, l’espace vaut cher. Or, on peut mettre 8 vélos sur la surface dévolue à une voiture. Une généralisation du vélo permettrait donc de fluidifier le trafic et de gagner de l’espace.
Et la sécurité ?
La dangerosité du vélo est une idée reçue. En effet, le risque d’accident en vélo est le même qu’en voiture. Mais les médias entretiennent une certaine confusion en plaçant sur le même plan tous les deux roues qu’ils soient motorisés ou non. Or, la moto présente 20 fois plus de risque que la voiture.
On sait aussi qu’il existe un seuil -5% des déplacements en vélo- au-delà duquel le risque diminue fortement, parce que les automobilistes prennent alors l’habitude de voir des cyclistes, tandis qu’auparavant ils étaient des objets non-identifiés. Malheureusement, dans la plupart des grandes villes françaises, entre 1% et 2% seulement des déplacements se font à vélo contre 10 % à Strasbourg, 30% aux Pays-Bas ou 40% à Copenhague.
Pourquoi la France semble en retard sur ses voisins en matière de politique du vélo urbain ?
Il ne faut pas croire au facteur culturel. Si on regarde en arrière, au sortir de la Seconde guerre mondiale, le niveau de pratique du vélo en France était le même qu’en Allemagne ou aux Pays-Bas. Mais, dans les années 50, les choix politiques ont été différents. En France, avec le développement des banlieues, le système de périphériques et de rocades, on a privilégié le tout voiture. Ailleurs, on a fait autrement, et il n’existe pas, par exemple, ces grands centres commerciaux hors des villes.
Ensuite, on peut regretter une certaine inertie politique même s’il existe un « coordinateur vélo » entre les différents ministères, et même s’il y a bien eu certaines avancées avec « le code de la rue » et le concept de ville 30 (voir www.ville30.org), par exemple.
Mais, au quotidien, le premier frein reste, selon moi, psychologique : celui de l’incompréhension. En effet, comment se comprendre lorsqu’on est enfermé et passif dans une voiture alors que le cycliste est à l’extérieur, actif et fait face aux éléments ? Et inversement comment ce dernier peut-il comprendre l’automobiliste qui est cloîtré dans son véhicule ?
Quel regard portez-vous sur les systèmes de vélo en libre-service ?
C’est un succès puisqu’ils ont permis de doubler le nombre d’usagers du vélo en quelques mois dans les villes qui les ont mis en place et qu’ils ont démontré que le vélo n’était pas ringard. Pour de nombreux citadins, dans l’impossibilité de garer en sécurité leur vélo, les vélos en libre-service offrent une alternative à la possession d’un cycle. Ce service a un coût pour chaque trajet qui nécessite une subvention qui est du même ordre que pour les transports en commun. Le financement de ces systèmes par la publicité a permis d’en masquer les coûts mais ceux-ci sont aujourd’hui connus et d’autres systèmes comme la délégation de service public sont tout à fait pertinents et beaucoup plus transparents.
Il existe d’autres systèmes alternatifs ou complémentaires, tels que la location de moyenne durée ou le prêt gratuit aux étudiants comme à Bordeaux. En Wallonie, pour développer l’intermodalité, il est possible de souscrire à un abonnement de transport en commun comprenant un vélo pliant afin que les usagers des zones périurbaines les utilisent pour se rabattre vers les arrêts et pour leur trajet final ce qui permet d’augmenter considérablement leur rayon d’action et de gagner du temps en diminuant le nombre de correspondances.
Propos recueillis par Julien LEPROVOST
Le site de la FUB http://www.fubicy.org/
3 commentaires
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velib
le vélo … oui mais
oui mais … le collègue qui vient au bureau en vélo et sent la sueur toute la journée … au secours !!!
Lecyclo
Le vélo sans effort
Pour sentir aussi bon que son collège qui vient en voiture, il y a le vélo à assistance électrique ! Après c’est l’humeur de celui qui a commencé la journée dans les embouteillages qu’il faut supporter ….
Axl
Le pire…
Le pire est il l’odeur de sueur du cycliste ou celle des rejets polluants des automobiles ?
Quant à celui qui a passé 1 heure au soleil dans sa voiture à cause des embouteillages, sent il meilleur ? Ah mais non suis-je bête, il a la clim pour ne pas transpirer…