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Durban : l’Union européenne a-t-elle signé la défaite du climat ?

L’Union Européenne est arrivée à Durban avec une feuille de route. Elle se disait prête à troquer sa participation à une seconde période d’engagements dans le cadre du protocole de Kyoto contre l’ouverture de négociations impliquant tous les grands pays émetteurs de CO2, et ce pour un accord global et contraignant (voir par exemple cet article de Laurence Caramel). Rapidement, oubliant les Etats-Unis en route, l’Union Européenne a seulement maintenu sa pression diplomatique sur les seuls pays émergents, Inde en premier lieu.

Pour le résultat suivant: à l’inverse de ce que disent certains commentateurs sans doute mal informés, la seconde période d’engagements n’est pas définie et le nouveau processus laisse en suspens le caractère contraignant du futur «accord». La décision de Durban relative au protocole de Kyoto ne fait que «prendre note» des options sur la table sans aucunement amender le protocole sur son contenu en termes de réduction d’émissions. C’est donc une promesse vide qui renvoie toute décision à 2012 pour la COP18… au Qatar ! Loin d’avoir sauvé le protocole de Kyoto, Durban l’a vidé encore un peu plus de sa substance. Ce d’autant plus que Canada, Russie et Japon ont déjà décidé de ne pas être partie prenante de cette seconde période d’engagements. Et l’UE l’a accepté.

L’UE a également suspendu son exigence visant à obtenir un accord «contraignant» à l’issue de la nouvelle phase de négociations qui va s’ouvrir. Les Etats-Unis n’en voulaient pas. L’UE l’a abandonné en rase campagne et n’a pas réellement cherché à mettre à l’index le grand voisin américain. Au final, le texte issu de Durban prévoit que ces négociations puissent aboutir à un « protocole, un instrument légal ou une solution concertée ayant force légale ». Tout reste donc ouvert. Rien ne garantit que les pays soient légalement contraints. Les engagements volontaires, imposés par les Etats-Unis lors du sommet de Copenhague, prennent donc le pas sur des engagements contraignants fondés sur les recommandations des scientifiques. L’UE l’a également accepté.

Plus grave, ce nouvel instrument ne verra pas le jour avant 2015 et ne sera mis en œuvre, dans le meilleur des cas, qu’en 2020. D’ici là, les engagements de réduction d’émissions sont loin d’être à la hauteur des enjeux, nous plaçant sur une trajectoire de réchauffement global de 4°C ou plus. Lors de ces 20 dernières années, les émissions globales ont augmenté de 50 %. Plus 6 % sur la seule année 2010. Attendre 2015 est donc irresponsable, sauf à vouloir que les petits Etats insulaires disparaissent et que l’Afrique, par exemple, cuise et brûle définitivement.

Plus grave encore, Durban a enterré la feuille de route établie à Bali en 2007 et quelques-uns des principes fondamentaux des négociations climat. Le principe de responsabilité historique commune mais différenciée, qui avait introduit des dimensions de justice dans les négociations, disparait du nouveau mandat issu de Durban. Le nouveau groupe de travail qui va plancher sur ce nouveau dispositif a donc une feuille de route mettant au même niveau de responsabilités ceux qui sont victimes du réchauffement climatique et ceux qui en sont les responsables. Comme si l’Inde avec 1,4 tonne de CO2 par personne, ou même la Chine avec 5,2 tonnes par personne, et leurs populations, devaient satisfaire aux mêmes exigences que les Etats-Unis (17,5 tonnes) ou plus généralement les pays de l’OCDE (10 tonnes en moyenne).

Au même moment, le Fonds Vert pour le climat promis chaque année n’est toujours pas pourvu à la hauteur exigée. La Banque Mondiale se l’est accaparé, facilitant des financements privés et une utilisation directe par les entreprises. Au détriment des populations. Au détriment de la justice et la répartition des fonds à l’échelle internationale. L’UE ne s’y est pas opposée.

Se satisfaire du résultat de Durban comme le fait l’Union Européenne et le gouvernement français alors que ce sont les positions intransigeantes des Etats-Unis qui ont été satisfaites est assez déconcertant. Se rapprocher des positions américaines alors que ces derniers sont rétifs à tout engagement contraignant revient à supprimer tout possibilité d’en obtenir. Comme le dit Attac France, « au moment où les rapports scientifiques convergent pour dire l’urgence des changements à mettre en œuvre, ce sommet des Nations unies restera celui du grand renoncement ».

Face à une diplomatie climatique soumise, plus que jamais, aux intérêts géopolitiques et aux lobbies économiques et financiers, c’est clairement le rôle des populations d’imposer d’autres choix. Sans attendre de solutions des Conférences de Pollueurs, A l’image de la manifestation qui a réuni plus de 10 000 personnes, les 99% doivent reprendre la main sur les 1%. C’est ce que que propose le réseau Climate Justice Now ! dans sa déclaration finale. Voilà l’alternative. A construire ensemble.

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par Maxime Combes

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