Paul Watson, célèbre pirate défenseur des dauphins, des baleines et des requins, a été arrêté en Allemagne et pourrait-être extradé vers le Costa Rica. Car ce pays est devenu le centre et le complice d’un trafic international d’ailerons de requins.
C’est la vie des pirates : narguer les autorités, frôler la catastrophe, s’en sortir par un coup d’éclat ou une pirouette. Car affronter l’ordre établi est une prise de risque quotidienne.
C’est la voie que Paul Watson, président de Sea Shepherd Conservation Society, a choisie et dans laquelle il excelle. Après plusieurs opérations spectaculaires contre la chasse au phoque, il a éperonné et coulé 12 baleiniers dans les années 1990. Il a dévoilé le massacre des dauphins dans la baie de Taiji au Japon ; il mène chaque année campagne en Antarctique contre la chasse à la baleine avec une efficacité exceptionnelle, sabordant l’essentiel de l’effort japonais. Pour ne citer que certains de ses faits d’armes.
A chaque fois, il a réussi à le faire de manière non violente mais non moins résolue. Et à trouver les astuces juridiques qui lui permettaient de ne pas être inquiété outre mesure.
Il vient d’être arrêté en Allemagne et est menacé d’extradition pour des faits remontants à 2002 et décrits dans le film « Les seigneurs des mers ». Alors qu’elle est invitée par le gouvernement du Costa Rica pour lutter contre la surpêche, l’équipe de Sea Shepherd arraisonne un navire en train de pêcher des requins de manière illégale, et le convoie vers le port. Mais en cours de route, on devine que le navire en question fait jouer des relations auprès des autorités. Quand ils arrivent à destination, ce n’est pas le pêcheur de requins qui est arrêté mais l’équipe de Sea Shepherd. On découvre alors que le Costa Rica est devenu une plaque tournante du trafic d’ailerons de requins. Tandis qu’un procès inéquitable s’annonce, Paul Watson et son équipe prennent la poudre d’escampette.
10 ans plus tard, le capitaine se fait rattraper par cette histoire : un mandat d’arrêt international aurait été lancé contre lui, et il est donc arrêté dans l’aéroport de Francfort alors qu’il s’apprêtait à faire la campagne européenne de son dernier livre, Capitaine Paul Watson – Entretien avec un Pirate.
A l’heure ou j’écris ces lignes, on ne sait toujours pas si Paul Watson sera extradé ou non, et ce qu’il deviendra. Il pourrait être libéré sous caution mais resterait assigné à Francfort, dans l’attente d’un autre jugement. José Bové a annoncé qu’Interpol ne le recherchait plus, en fait, ce qui saperait les bases de son extradition. La situation pourrait évoluer rapidement.
Bien sûr, comme l’ensemble des écologistes et des défenseurs des animaux, je souhaite sa libération la plus rapide possible. Et je suis étonné de l’attitude des services de l’Etat allemand.
Mais dans le fond, je n’ai pas d’inquiétude. Car je n’ai aucun doute sur la capacité de Paul Watson à trouver le moyen de se sortir de ce mauvais pas. Il ne manque ni du courage ni de l’intelligence et du sens de l’opportunité nécessaires. Ce qui fait de lui un vrai grand pirate.
En imaginant le pire, s’il devait être extradé vers le Costa Rica, ce serait probablement le début de la plus grande campagne contre la pêche au requin qui ait jamais eu lieu. Car Watson est aussi le plus médiatique et le plus acclamé des héros de la planète. Je ne doute pas que son arrestation et surtout son procès -qui ne pourrait être qu’une parodie de justice- donnera naissance à un mouvement de soutien sans précédent. Nombreux sont ceux –moi y compris- qui seraient heureux de hisser le drapeau noir et de participer à des actions de solidarité.
Mais comment comprendre la position du Costa Rica ? Le pays a depuis des années cherché à mettre en valeur ses efforts en faveur de la biodiversité et a mis en place une filière d’éco-tourisme vantée dans le monde entier. Elle représente, selon les chiffres non vérifiés que j’ai pu glaner sur internet, 25% de son commerce extérieur. Pourquoi s’acharner sur Paul Watson ? Car il est évident que tous les soutiens du pirate vont très rapidement attaquer cette activité et que le Costa Rica devra bientôt faire face à une campagne internationale de dénigrement. Sans parler des autres pirates – ceux de l’informatique – qui prendront probablement à cœur d’attaquer les sites internet du pays.
L’attitude du Costa Rica semble contre-productive. Mais c’est toujours un mauvais calcul que de tabler sur l’ignorance ou la maladresse de ses adversaires. Il doit y avoir une bonne raison. Si le Costa Rica a bien pesé ce qu’il fait, alors cela signifie que le lobby des trafiquants d’ailerons de requin y a pris une importance hors de mesure. Quoi qu’il arrive à Paul Watson, un ennemi de la planète vient donc de sortir de l’ombre. Il va falloir réfléchir à comment l’affronter.
Hissons le pavillon noir.
PS: Venez à la manifestation de soutien organisée mercredi 24, place du Trocadéro à Paris de 18 à 20 heures.
Et signez la pétition.
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