Depuis une vingtaine d’années, la commune de Bure et 3 autres municipalités adjacentes sont pressenties pour accueillir un site d’enfouissement de déchets radioactifs. Alors que le projet commence à être remis en cause, le sujet reste étrangement à l’écart de la campagne municipale. Le secrétaire-général du collectif des élus opposés à l’enfouissement des déchets nucléaires Claude Kaiser, par ailleurs ancien maire de Ménil-la-Horgne, une commune située à une quarantaine de km de là – il continue de siéger à son conseil municipal – nous explique pourquoi.
Tout d’abord, qu’est-ce que le collectif des élus opposés à l’enfouissement des déchets nucléaires ?
Comme son nom l’indique, le collectif regroupe des élus locaux de tous bords (plus de 200), de l’UMP à EELV en passant par le PS, le PC et le NPA et surtout un grand nombre d’élus non encartés. Nous comptons aussi parmi nos membres des communes, dont Bar-le-Duc et Verdun pour ne citer que les plus grandes, qui veulent empêcher l’aboutissement du projet de laboratoire de Bure qui s’avère en fait être un centre de stockage souterrain des déchets radioactifs. Nous existons depuis 1995 et nous sommes opposés à la création où que ce soit d’un site d’enfouissement des déchets nucléaires. Notre opposition est totale, nous organisons des réunions publiques d’information et nous siégeons au CLIS (comité local d’information et de suivi) du projet.
Quelle est l’attitude des communes autour du site de Bure à l’égard du projet ? Est-ce un sujet pour les élections municipales qui s’annoncent ?
Bien souvent, une seule et unique liste se présente par village. Aussi, s’opposer ou non tient plutôt de la décision personnelle des élus et de leur personnalité. Et cela rend le débat invisible dans ces élections. A ma connaissance, seule la commune de Gondrecourt le Château dispose d’une liste vraiment opposée au projet et peut-être une supplémentaire verra le jour à Bar-le-Duc si le NPA parvient à en former une. Bure et ses alentours ne sont pas défavorables, disons plutôt que les habitants s’y sont résignés (à l’exception du village de Bonnet). Et la manne financière est très importante.
Mais, où en est-on du projet de site d’enfouissement ?
Beaucoup de gens, y compris certains élus, pensent que tout est joué, que le laboratoire va recevoir les déchets. Mais il n’en est rien : pour le moment il n’y a pas un gramme de déchets radioactifs à Bure. Le laboratoire est terminé mais les opérations de stockage n’ont pas commencé et le calendrier du projet vient d’être remis en cause par un rapport. Les premiers déchets devaient arriver vers 2025 mais il semble que cette date ne sera pas tenue.
Comment vous positionnez vous par rapport à ce projet ?
A toutes les réunions, nous dénonçons ce projet absurde qui pose une menace pour les générations future et le système de corruption institutionnalisée qui est mis en place pour le faire accepter. Pour la première fois dans l’histoire de France, les communes reçoivent des fonds, 60 millions d’euros par an depuis 20 ans, pour compenser les nuisances d’un projet qui n’a pas encore abouti. Et pour le moment, ce projet ne nuit pas à l’environnement. Ces fonds sont distribués par l’ANDRA (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs) aux collectivités par l’intermédiaire du GIP (Groupement d’Intérêt Public) qui les reverse. Nous appelons ceci de la corruption institutionnalisée : comment voulez-vous que les communes se fassent un avis, puissent se prononcer en toute objectivité sur le sujet quand elles deviennent dépendantes de ces sommes, en particulier dans une région comme la nôtre touchée par la crise et le dépeuplement. Désormais, les gens se sont habitués à voir l’Andra partout, elle sponsorise des clubs foot ou de pétanque, elle dispose d’une bonne presse dans les journaux locaux.
Qu’en disent les partis politiques ?
Tous les partis de gouvernement, UMP, PC et PS, ont soutenu le projet lorsqu’ils étaient au pouvoir. Sauf EE-LV, mais en raison de leur alliance avec le PS, ils ne peuvent pas dire ni faire grand-chose. Leurs représentants locaux les suivent, ils se démarquent un peu en affichant une attitude de vigilance à l’égard du projet mais sans le remettre en cause. Dans notre région où les usines ferment, c’est le nucléaire qui prend la relève avec Bure, mais aussi, par exemple, avec EDF près de Bar-le-Duc et la plateforme de transit de l’uranium près de Commercy. A chaque fois, cela crée quelques emplois. Les gens, une grande majorité silencieuse, s’y sont résignés. Cependant, deux grandes villes meusiennes sont encore adhérentes de notre association, Verdun où le maire (UMP) est contre l’enfouissement et Bar-le-Duc. A Saint-Dizier en Haute Marne, la fronde est menés par les 2 conseillers généraux du PC local, historiquement opposé à Bure.
Mais, alors comment se traduit l’opposition au projet de Bure ?
Avoir 3 ou 4 opposants par commune peut sembler dérisoire mais quand ces commues sont des villages d’une centaine d’habitants, ces quelque personnes comptent. Maisc nous ne parvenons pas à nous faire entendre par l’Etat, Les citoyens pensent donc que l’opposition ne passera pas par les urnes. Même nous, des élus, pensons que la mobilisation de la société sera plus efficace au travers de manifestations ou de réunions publiques. Nous avons donc manifesté récemment avec 300 personnes. Par ailleurs, nous avons boycotté le débat public organisé ces derniers mois car c’est une mascarade :et il ne sert à rien de débattre d’un projet lorsqu’il est déjà en cours et que les appels d’offre ont été lancés.
Propos recueillis par Julien Leprovost
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