800 programmes de subventions aux énergies fossiles dans les pays de l’OCDE


Champs de pétrole près de Bakersfield en Californie, États-Unis (35°28’ N – 119°43’ O). © Yann Arthus-Bertrand/Altitude

L’OCDE publie un inventaire des mesures de soutien aux combustibles fossiles. A cette occasion l’organisation appelle les gouvernements à revoir leurs politiques de soutien aux énergies fossiles alors que se tiendra à Paris, dans quelques semaines, la COP21. Le coût de ces mesures de soutien est évalué à près de 200 milliards de dollars par an dans les pays de l’OCDE et les grandes économies mondiales. Les pays du G20 s’étaient pourtant engagés dès 2009 à diminuer leurs subventions aux combustibles fossiles. Rencontre avec Jehan Sauvage, analyste des politiques publiques et co-auteur du rapport. [A lire aussi sur le sujet, notre état des lieux des mesures de soutien aux énergies fossiles en France]

Jehan Sauvage, Trade Policy Analyst. OECD Headquarters. Photo : Julien DANIEL/OECD
Jehan Sauvage, Trade Policy Analyst.
OECD Headquarters.
Photo : Julien DANIEL/OECD

Qu’est-ce qu’une subvention aux combustibles fossiles ?

Les aides des Etats concernent soit la production soit la consommation de combustible. De nombreuses manières de soutenir les énergies fossiles ont été introduites, nous en avons recensé près de 800  nous examinons en particulier le coût budgétaire ou fiscal induit pour les gouvernements. Ces mesures datent dans certains cas des crises énergétiques des années 1970, et une fois instaurées, il s’avère difficile de revenir dessus.

Un gouvernement peut par exemple payer la facture de mazout d’un ménage ou lui accorder des exemptions fiscales. Parmi les aides à la consommation figurent les détaxes accordées à certains groupes d’utilisateurs ou à certains secteurs. Par exemple, l’exemption de taxe sur le kérosène pour les vols intérieurs, une TVA moindre sur les carburants comme c’est le cas en Corse ou encore le fait que les chauffeurs de taxis paient moins de taxes sur le diesel.

Par ailleurs, il existe un soutien à la production d’énergie fossile, comme les transferts budgétaires directs aux mines de charbon, que l’on en trouve en Europe, notamment en Allemagne et en Espagne. Aux USA, une entreprise peut bénéficier de réductions de taxes sur ses revenus pendant plusieurs années quand elle commence l’exploitation d’un gisement pétrolier ou gazier.

Avez-vous un exemple de pays qui est parvenu à diminuer son soutien aux combustibles fossiles ?

L’Indonésie a récemment annoncé, après plusieurs années d’efforts, à vouloir diminuer ses subventions à l’essence et au diesel. Dans le budget révisé 2015, le gouvernement a ainsi prévu la suppression des subventions pour l’essence, l’un des plus importants postes de dépenses du pays, soit une économie de 14 milliards de dollars US. Auparavant, l’Etat compensait les pertes, dues au prix à la pompe très bas du carburant, en dédommageant directement les compagnies de distribution de l’essence. Cette suppression des subventions à la consommation a été rendue possible notamment grâce au faible prix du pétrole. De plus, le pays a préféré rediriger ses fonds publics des subventions à l’énergie vers des investissements dans le développement des infrastructures. Enfin, il y a un volet redistribution et justice sociale. Dans le cas de l’Indonésie, les subventions aux produits pétroliers étaient supposées aider les ménages les plus défavorisés, or, dans ce pays, les plus pauvres ne possèdent pas forcément de voiture. De fait, ces aides bénéficiaient surtout aux classes moyennes et aisées.

Que gagnent les Etats à moins soutenir les énergies fossiles ?

Il y a 3 grands avantages à ne plus subventionner les combustibles fossiles. Tout d’abord, c’est bénéfique pour l’environnement, qu’il s’agisse du climat ou de la pollution locale, avec par exemple moins de diesel dans les villes. Ensuite, vient l’avantage fiscal, les Etats font des économies sur leur budget en supprimant les aides aux énergies polluantes. Et enfin un gain économique, car en allouant mieux leurs ressources les Etats favorisent la croissance, y compris en investissant dans l’éducation, la santé ou les infrastructures.

Où en est-on de l’engagement des pays du G20 de réduire leurs subventions aux énergies fossiles ?

Certains pays riches ont fait unilatéralement des progrès comme l’Allemagne, les Pays-Bas et l’Autriche. Il y a aussi eu des avancées dans le cadre même du G20 puisque plusieurs pays membres se sont portés volontaires pour que leurs paris passent en revue leurs subventions. Cela reste interne au G20 pour le moment. La Chine et les Etats-Unis se sont ainsi mis d’accord pour revoir les subventions de l’un et de l’autre en compagnie d’experts. Le processus est lancé. On espère que cela va rendre plus concret les engagements et faire avancer la discussion sur le sujet du soutien aux énergies fossiles.

 Propos recueillis par Julien Leprovost

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