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C’est le moment pour une taxe carbone

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Champs de pétrole près de Bakersfield en Californie, États-Unis (35°22’ N - 119°01’ O).
taxe carbone
Champs de pétrole près de Bakersfield en Californie, États-Unis (35°22’ N – 119°01’ O). © Yann Arthus-Bertrand

Nous publions une tribune écrite par des auteurs du think tank américain Brookings Instituion parue sur le site Project Syndicate qui défend l’idée de profiter des prix bas du pétrole pour instaurer une taxe carbone variable sur les énergies fossiles et ainsi financer la transition vers les énergies renouvelables et réduire la dépendance aux énergies fossiles.

Au cours des dernières décennies, les prix du pétrole ont largement fluctué – de 10 à 140 dollars le baril – posant un défi pour les producteurs et les consommateurs. Pour les décideurs, cependant, ces fluctuations sont l’occasion de progresser vers les ambitions mondiales clé – reflétées dans les objectifs de développement durable adoptés en septembre dernier ainsi que dans l’accord sur le climat conclu à Paris en décembre – que sont l’atténuation du changement climatique et la construction d’une économie plus durable.

Les fluctuations récentes des prix du pétrole ressemblent au modèle de la toile d’araignée classique de la théorie microéconomique. Les prix élevés stimulent une augmentation des investissements dans le pétrole. Mais, compte tenu des longs délais entre l’exploration et l’exploitation, au moment où la nouvelle capacité de production devient effectivement opérationnelle, la substitution a déjà eu lieu, et souvent la demande ne justifie plus l’offre disponible. À ce moment, les prix baissent, tout comme l’exploration et l’investissement, y compris dans les substituts au pétrole. Lorsque de nouvelles pénuries développent, les prix commencent à augmenter à nouveau, et le cycle se répète.

Le cycle se poursuivra, bien que d’autres facteurs – tels que la baisse constante des coûts de l’énergie renouvelable et l’adoption progressive de processus de production à moindre intensité énergétique – impliquent qu’il tournera probablement à des niveaux plus bas. Dans tous les cas, une augmentation des prix est inévitable.

Dans ce contexte, les prix très bas d’aujourd’hui – à plusieurs reprises sous les 35 dollars le baril depuis le début de cette année – créent une occasion en or (que l’un des auteurs recommande depuis plus d’un an) de mettre en œuvre une taxe carbone variable. L’idée est simple: la taxe diminuerait progressivement à mesure que les prix du pétrole augmentent, pour ensuite augmenter à nouveau lorsque les prix se remettent inévitablement à diminuer.

Si les ajustements sont asymétriques – des augmentations plus importantes lorsque les prix baissent et de petites diminutions lorsque les prix augmentent – ce système permettrait d’augmenter progressivement la taxe carbone globale, tout en suivant un schéma anticyclique. Une telle augmentation progressive est ce que la plupart des modèles de contrôle du changement climatique appellent de leurs vœux.

Considérons ce scénario. Imaginons qu’en décembre 2014, les décideurs politiques aient introduit une taxe de 100$ par tonne de carbone (équivalent à une taxe de 27$ sur le CO2). Pour les consommateurs américains, l’impact immédiat de cette nouvelle taxe – en supposant que son coût aient été reporté complétement sur les consommateurs – aurait été une augmentation de 0,24$ du prix national moyen d’un gallon d’essence, de 2,23$ à 2,47$, ce qui reste bien en deçà des sommets atteints dans les années 2007 et 2008.

Si, depuis lors, chaque augmentation de 5$ du prix du pétrole avait été associée à une diminution de la taxe carbone de 30$ par tonne, et si chaque diminution de 5$ avait entraîné une augmentation de 45$ par tonne, le résultat aurait été, pour le mois dernier, une différence de 0,91$ entre le prix standard du marché et le prix réel à la consommation incluant la taxe [voir le graphique]. Cette augmentation aurait élevé sensiblement le prix du carbone, fournissant aux gouvernements des revenus – équivalents à 375$ par tonne de carbone aujourd’hui – à utiliser pour atteindre les priorités budgétaires, tout en amortissant la chute des prix de l’essence causée par la forte baisse du prix du brut. Bien que 375$ la tonne soit un prix très élevé, qui reflète le prix particulièrement bas du pétrole à l’heure actuelle, même un prix du carbone plus faible – de l’ordre de 150-250$ la tonne – serait suffisant pour atteindre les objectifs climatiques internationaux au cours de la prochaine décennie.

Avec cette approche, les décideurs pourraient utiliser le marché pour aider à propulser leurs économies hors de la dépendance aux combustibles fossiles, et redistribuer le surplus du producteur (les bénéfices) des producteurs de pétrole vers les trésors des pays importateurs, sans imposer une charge trop importante ou soudaine sur les consommateurs. En fait, en stabilisant les coûts d’utilisation, cette politique offrirait des gains importants.

La clé de la faisabilité politique de cette stratégie est de la lancer tandis que les prix sont très bas. Une fois en place, elle deviendra une part peu remarquée et politiquement non controversée du prix de l’essence (et d’autres produits) – mais une part qui produit des avantages considérables. Une partie des recettes pourraient être retournée au public sous la forme de réductions d’impôts ou de soutien de la recherche.

Malgré les avantages évidents d’une taxe sur le carbone variable, aucun pays n’a capitalisé sur les prix bas actuels du pétrole pour augmenter le prix du carbone de cette manière (ou sous une forme similaire), bien que l’appel du président américain Barack Obama pour une taxe sur le pétrole suggère qu’il reconnaît l’ouverture que représentent les prix bas. Cela devrait changer. La possibilité de mettre en œuvre une politique qui est à la fois sensée, flexible, douce et efficace pour atteindre les objectifs nationaux et mondiaux n’arrive pas très souvent. Les décideurs doivent la saisir quand elle se présente. Le moment pour une taxe carbone variable anticyclique, c’est maintenant.

C’est le moment pour une taxe carbone
Kemal Dervis et Karim Foda du think tank américain Brookings Institution.
Traduit de l’anglais par Timothée Demont

Copyright : Project Syndicate, 2015
www.project-syndicate.org

5 commentaires

Ecrire un commentaire

  • Heu… on en est où sur les taxes carburant aéronautiques ? ? ? (Moyen de déplacement TRÈS énergivore, consommateur de nos réserves fossiles à économiser, et donc AUSSI TRÈS polluant !)

  • On ne peut qu’applaudir à la proposition de cette BROOKING INSTITUTION d’indexer en quelque sorte le montant de la taxe carbone à celui du prix du baril de Brent. Mais cette fois de prévoir une indexation à l’envers du sens habituel dans la mesure où la proposition de ce think tank américain
    est bien de diminuer le montant de la taxe lorsque le prix du pétrole flambe et de l’augmenter dans les périodes où il est au plus bas.

    Les variations continuelles des prix du Brent compliquent en effet les prévisions économiques à long terme et ont toujours été un frein à l’investissement vers les énergies renouvelables: le citoyen faute de moyen raisonne la plupart du temps a court terme et se dit pourquoi investir lorsque les prix des combustibles sont au plus bas alors qu’il voit ses capacités d’investissement diminuer lorsque les prix du pétrole flambent

    Cette proposition semble particulièrement intéressante pour les deux postes que constituent le transport en ville et le chauffage de l’habitat urbain dans la mesure où seule l’absence d’infrastructures est un frein au développement de technologies qui sont au point et prêtent à l’emploi avec la voiture et la chaufferie hybride.

    Voilà un mécanisme financier qui permettrait de financer la mise en place d’infrastructures lourdes telles que l’ alimentation en eau non potable (ENP) des immeubles et les réseaux d’alimentation électrique des batteries voire ultérieurement la fabrication de l’hydrogène avec le soleil en tant que combustible.

    Si le conseil constitutionnel devait être mis à contribution pour choisir entre une taxe carbone augmentant progressivement dans le temps comme l’a imaginé Madame Royal et cette nouvelle vision de la fiscalité Balendard souhaiterait que ce soit pour l’avenir des EnR cette deuxième solution qui soit retenue

    Voir http://www.infoenergie.eu/riv+ener/chaines-energetiques-general.htm
    et http://www.infoenergie.eu/riv+ener/LCU_fichiers/ESR-cout-energie.pdf

    Balendard février 2016

  • On ne peut qu’applaudir à la proposition de cette BROOKING INSTITUTION d’indexer en quelque sorte le montant de la taxe carbone à celui du prix du baril de Brent. Mais cette fois de prévoir une indexation à l’envers du sens habituel dans la mesure où la proposition de ce think tank américain
    est bien de diminuer le montant de la taxe lorsque le prix du pétrole flambe et de l’augmenter dans les périodes où il est au plus bas. Les variations continuelles des prix du Brent compliquent en effet les prévisions économiques à long terme et ont toujours été un frein à l’investissement vers les énergies renouvelables: le citoyen faute de moyen raisonne la plupart du temps a court terme et se dit pourquoi investir lorsque les prix des combustibles sont au plus bas alors qu’il voit ses capacités d’investissement diminuer lorsque les prix du pétrole flambent

    Cette proposition semble particulièrement intéressante pour les deux postes que constituent le transport en ville et le chauffage de l’habitat urbain dans la mesure où seule l’absence d’infrastructures est un frein au développement de technologies qui sont au point et prêtent à l’emploi avec la voiture et la chaufferie hybride. Voilà un mécanisme financier qui permettrait de financer la mise en place d’infrastructures lourdes telles que l’ alimentation en eau non potable (ENP) des immeubles et les réseaux d’alimentation électrique des batteries voire ultérieurement la fabrication de l’hydrogène avec le soleil en tant que combustible.
    Si le conseil constitutionnel devait être mis à contribution pour choisir entre une taxe carbone augmentant progressivement dans le temps comme l’a imaginé Madame Royal et cette nouvelle vision de la fiscalité, Balendard souhaiterait que ce soit pour l’avenir des EnR cette deuxième solution qui soit retenue

    http://www.infoenergie.eu/riv+ener/chaines-energetiques-general.htm

    Balendard février 2016

    • Durand

    J’aimerais ouvrir un débat sur ce qui se passe au Canada. …plus presicement à Fort Mac Murray…..
    Savez comment est extrait leur pétrole ! !!??
    Renseignez vous sur les « sables bitumeux « .

2024 en France ou le visage humide du changement climatique

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