Pourquoi rendre les voies sur berge de Paris aux piétons

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Les ponts sur la Seine en contre-jour, Paris, France (48°51’ N - 2°21’ E). © Yann Arthus-Bertrand

L’ouverture aux piétons des voies sur Berge de Paris suscite un débat vif entre partisans et opposants. Nous republions ici les arguments de la marie de Paris, Anne Hidalgo, qui défend ce projet. Début septembre, le préfet de Paris a donné son accord pour une expérimentation de 6 mois

La piétonisation des voies sur berges est un projet phare du mandat que m’ont confié les Parisiens en 2014. Ce projet est attendu et souhaité par une large majorité de Parisiens (Sondage IFOP pour le Journal du Dimanche (avril 2016) : 60% des Parisiens sont favorables à la piétonisation des berges de Seine rive droite) et s’inscrit dans le mouvement de toutes les grandes métropoles françaises et mondiales qui reconquièrent les berges de fleuve et les cœurs de ville au profit des piétons et des circulations douces. Dans la droite ligne des engagements de la COP 21, ces projets d’aménagement ont pour objectifs de diminuer la place de la voiture, source majeure de pollution, et de préserver la santé de nos concitoyens. Alors que la pollution atmosphérique tue chaque année 48 000 personnes en France, dont 2500 à Paris et 6500 dans la Métropole du Grand Paris, et qu’elle réduit de 2 ans l’espérance de vie des habitants de la Métropole, la Maire de Paris a rappelé que l’amélioration de la qualité de l’air est une préoccupation majeure pour une majorité de Franciliens. Et que l’un des principaux leviers est d’agir sur le trafic routier, celui-ci générant deux tiers des émissions de dioxyde d’azote et 56 % des particules fines (PM 2,5) dans Paris.

La commission qui a conduit l’enquête publique sur la piétonisation des berges entre les 8 juin et 8 juillet 2016 a remis le 9 août son rapport concluant à un avis défavorable.

Ce rapport est extrêmement partial et de parti pris. Aux études rigoureuses conduites par la ville, il oppose des commentaires et observations, non étayés ou fiabilisés par des études ou enquêtes.

Ma responsabilité vis-à-vis des Parisiens, des familles, des enfants qui grandissent dans cette ville, des personnes fragiles est de tout faire pour faire baisser la pollution à Paris. La piétonisation des voies sur berge est un projet clé pour atteindre cet objectif. Il a été construit de manière rigoureuse, dans le cadre d’une large concertation. Rien ne me fera dévier– et notamment pas l’intérêt des seuls conducteurs qui, dans le centre de Paris, rappelons-le, sont à 84% des hommes, à 64% des CSP + et qui, pour 80% du total, sont seuls dans leur voiture. C’est pourquoi je présenterai au prochain Conseil de Paris une délibération permettant de poursuivre ce projet malgré l’avis défavorable de la commission d’enquête, qui est purement consultatif. Je défendrai ce projet pour les Parisiens, de manière démocratique devant le Conseil de Paris. Je suis certaine de leur plein soutien pour faire battre les conservatismes de tout bord qui veulent encore que la voiture règne en maître dans Paris. Je ne serai pas la responsable politique qui met en danger la santé des Parisiens en retardant un projet indispensable pour poursuivre la lutte contre la pollution.

1) La commission d’enquête juge insuffisant le périmètre de l’enquête publique
⇨ C’est un comble quand on sait que ce périmètre a été défini en plein accord avec le Président de cette commission d’enquête. Ce périmètre est en tout point conforme à ce qu’exige la réglementation. L’enquête a d’ailleurs été très efficace au regard de l’importante participation. Enfin, le périmètre de l’étude d’impact (qui est le sujet au fond), bien plus large que celui de l’enquête, garantit que toutes les conséquences ont bien été étudiées.

• Un périmètre d’enquête conforme à la réglementation

La commission revient sur la question du périmètre d’enquête qui serait insuffisant car limité aux seuls arrondissements d’implantation du projet. Elle considère que l’enquête aurait du « inclure dans son périmètre toutes les zones dans lesquelles ledit projet est susceptible d’entraîner des conséquences…notables », et en particulier les 5èmes, 6ème et 8èmearrondissement. Mais la CAA de Paris, dans son arrêt du 10 juin 2014 (13 PA01470) concernant les Berges I, 28èmeconsidérant, a pu préciser que « l’enquête publique ne doit s’étendre qu’au territoire sur lequel se situe le projet d’opération ». L’enquête a bien eu lieu sur le territoire du lieu d’implantation de l’opération.

Le périmètre d’enquête (fixe et à caractère administratif) est à bien distinguer des différents périmètres des études pris en considération dans l’étude d’impact, qui peuvent être plus ou moins étendus en fonction des thématiques abordées puisque la réglementation impose que l’analyse soit faite à l’échelle la plus adaptée. En particulier, les impacts sur la circulation ont été analysés à l’échelle de l’Ile-de-France, bien au-delà du seul périmètre d’enquête.

• Une information et une participation du public larges

Ce périmètre d’enquête n’a pas fait obstacle à une information du public très large compte tenu des communications dans les journaux, sur les panneaux lumineux de la Ville, de la mise en ligne des principaux éléments du dossier d’enquête sur le site internet de la Ville mais aussi du retentissement médiatique de l’opération. La participation du public n’était pas limitée aux seuls habitants des arrondissements considérés ni même aux Parisiens et le public a pu déposer des observations dans les arrondissements de son choix même s’il n’y résidait pas. Dans les faits, cette consultation a donné lieu à une très large participation du public qui a présenté de nombreuses observations, ce qui est l’élément déterminant d’après la jurisprudence (pour un exemple récent v. CE, 23 octobre 2015, communes de Maisons-Laffitte et a., req. n°375.814, jugeant qu’en dépit du nombre limité de lieux d’enquête au regard de l’objet de l’opération soumise à l’enquête publique, les modalités d’organisation de cette enquête ont permis à l’ensemble des personnes et des groupements intéressés de prendre connaissance du projet, d’en mesurer les impacts et d’émettre leurs observations, via notamment un site internet et une large publicité). Ainsi le nombre total de contributions écrites recueillies pendant cette enquête, qui s’élève à 292, est très significatif et comprend plus de 50 contributions émanant d’habitants, d’élus et d’entités localisés hors de ce périmètre d’enquête voire plus largement hors de Paris, ce qui démontre l’efficacité des modalités d’enquête retenues.

A titre de comparaison, les enquêtes publiques conjointes portant sur le réaménagement du pôle RER Châtelet-Les Halles à Paris 1er arr., menées de mi-décembre 2009 à fin janvier 2010, se sont déroulées également dans 4 mairies d’arrondissement (1er, 2ème, 3ème et 4ème). Porté par la Ville de Paris et le STIF, ce projet de réaménagement du cœur du réseau des transports en commun de la région Ile-de-France, qui accueille 550 000 voyageurs et 1500 trains par jour (et dont les impactssur la vie des franciliens vont bien au-delà des 4 arrondissements centraux), a fait l’objet de seulement 73 contributions.

De même, l’enquête publique relative au projet important et structurant  de prolongement du tramway T3 entre la porte de la Chapelle et la porte d’Asnières (avec des impacts dépassant le strict périmètre opérationnel des travaux) s’est déroulée du 27 mai au 27 juin 2013 dans 3 points d’enquête de Paris intra-muros (17ème et 18ème) et a recueilli seulement 71 contributions.

Par ailleurs la commission ajoute des considérations sur le caractère prétendument insuffisant de la concertation préalablequi s’est déroulée de juin à octobre 2015 : La Ville rappelle que les modalités de la concertation fixées par la délibération 2015 SG 14 du Conseil de Paris des 26, 27 et 28 mai 2015 ont été particulièrement larges et importantes : 4 réunions publiques dans les 1er, 4ème, 7ème et 12ème arrondissements, une réunion publique métropolitaine le 17 septembre 2015, une exposition au point « Paris rendez-vous » de l’Hôtel de Ville, une exposition itinérante sur les berges rive gauche puis sur Paris-Plages, des registres associés à tous ces lieux et une concertation en ligne accessible à tous pendant 40 jours à partir du 22 juin (permettant même à ceux qui seraient le cas échéant partis en vacances tout le mois de juillet, c’est-à-dire une faible minorité d’habitants, de s’exprimer), une marche exploratoire, et une concertation partenariale à l’échelle de la métropole avec la saisine notamment de tous les départements d’Ile-de-France et des collectivités concernées. En outre, ont été organisées, en dehors du cadre de la concertation réglementaire, d’autres actions : la saisine des partenaires institutionnels, des réunions spécifiques d’échanges notamment avec les acteurs économiques, et même un concours de dessin pour les enfants. Près d’un millier de contributions ont été recueillies, dont près de 300 sur les registres et lors des réunions publiques de juin à septembre 2015. On aimerait connaitre une opération, menée par l’Étatou par une autre collectivité, qui ait fait l’objet d’une concertation aussi large…

2) La commission d’enquête juge les études de circulation insuffisantes notamment au regard de l’impact qui serait susceptible de dépasser les limites de la Ville de Paris
⇨ Ces études rigoureuses sont validées dans leur méthodologie par les experts, la Cour Administrative d’Appel et l’État. La commission d’enquête n’apporte aucun élément objectif permettant de les contester mais uniquement des « on dit » ou se base sur l’épisode de crue récent dont les conséquences n’ont rien à voir avec la piétonisation des berges. Ces études confirment que l’impact des reports de circulation est concentré et absorbable sur l’hyper centre de Paris et que les reports en banlieue sont extrêmement mineurs. En effet, les études prouvent que la Voie Georges Pompidou reste faiblement utilisée comme voie de transit inter-banlieue. Le temps de parcours rallongé dans le sens ouest -> est serait, sur les quais hauts entre Concorde et le quai Henri IV, de 8 minutes en heure de pointe du soir (temps de parcours passant de 16 à 24 minutes) et de 11 minutes en heure de pointe du matin (temps de parcours passant de 12 à 23 minutes). En pratique, l’expérience de la rive gauche a montré que la réalité est plus favorable que les simulations et que la circulation s’adapte aux aménagements réalisés : les allongements de temps de parcours effectifs aujourd’hui sont bien moindres que ce qui avait été prévu par les modélisations.

La commission estime ne pas être en mesure de répondre à l’objection soulevée quant aux conséquences que la fermeture de la voie sur berges serait susceptible d’entraîner au-delà du cœur de Paris et des limites administratives de Paris, en banlieue notamment. La Ville a pourtant produit des études incontestables basées sur des modèles éprouvés et des donnéesrécentes, qui ont montré justement l’absence d’impact sur la circulation en dehors du cœur de Paris.

• Un modèle d’études dont la fiabilité a été reconnue par l’État et par le juge

Le modèle macroscopique de la Ville de Paris est construit à partir de celui de l’Etat (DRIEA) et reprend les données issues de l’EGT (Enquête Globale de Transport) ce qui atteste de la fiabilité des études, comme le relevait l’arrêt précité de la CAA de Paris du 10 juin 2014 à propos de Berges I, en retenant la fiabilité des données obtenues à partir des outils de modélisation de l’Etat. Les études ont été menées avec exactement les mêmes outils que ceux utilisés pour les études de la rive gauche, qui avaient été jugées de bonne qualité par l’autorité environnementale en 2011. A noter que le Directeur régional et interdépartemental de l’équipement et de l’aménagement d’Ile-de-France, M. Gilles Leblanc, a indiqué à la commission d’enquête lors de son entretien avec elle que « les résultats de la simulation macroscopique ont été obtenus en utilisant le modèle largement utilisé à cette échelle et développé par les services de l’Etat (DRIEA) et n’appellent pas de réserves de sa part ». C’est bien le cœur même des modélisations menées par le prestataire de la Ville que de regarder comment l’ensemble du trafic à écouler se reporte sur le réseau viaire en fonction de la capacité (c’est-à-dire du débit maximal admissible) de chacune des voies. Les réserves de capacité d’absorption des véhicules sont -par construction-prises en compte dans le modèle.

• L’étude d’impact produite à l’enquête conclut à des conséquences limitées au seul territoire de la Ville de Paris

En effet les reports de circulation sont localisés dans l’hyper-centre de Paris. D’ailleurs, l’avis rendu le 16 octobre 2015 par le Conseil départemental des Hauts-de-Seine sur le projet admet que « les études de trafic tendent à démontrer que la congestion ne se propagera pas jusqu’au réseau routier des Hauts-de-Seine ». Les axes supportant les plus forts impacts sont les quais hauts de la rive droite et, dans une moindre mesure, le boulevard Saint-Germain.

En ce qui concerne la fonction de transit assurée par la voie Georges Pompidou, il ressort de la dernière étude de ce type sur cette voie, réalisée en 2010, que la fonction de transit Ouest/Est (traversée complète de Paris en empruntant au moins la section Tuileries/Bercy de la VGP) concerne un nombre très limité de véhicules, qui peut être estimé à moins de 500 véh/h le matin et moins de 300 véh/h le soir.

Le dossier d’enquête publique (annexe 2 du mémoire en réponse à l’avis de l’autorité environnementale) fait bien état des résultats de cette étude, qui a fourni des éléments précis sur les niveaux de trafic et la part de transit qui passe sur la Voie Georges Pompidou. En opérant des comptages d’unités de véhicule particulier sur des plages horaires fixes le matin et en fin d’après-midi, cette étude a démontré qu’en entrée et sortie de voie, la fonction de transit de la VGP esttrès limitée : depuis le quai du Point du Jour en entrée sur la Voie George Pompidou depuis Boulogne, seuls 9 % des véhicules effectuent un transit complet à travers Paris le matin ; le soir seulement 5 % ; Si on prend les sept grandes entrées ouest, le taux cumulé de transit représente 6 % des entrées retrouvées porte de Bercy le matin ; le soir seulement 3 %.

Et encore ces chiffres sont sans doute surestimés. En effet, les aménagements réalisés sur la VGP en 2012, avec 6 traversées piétonnes protégées par feux tricolores, ont aussi eu pour vocation de dissuader le transit effectué par cette voie. Les flux de transit mesurés en 2010 ont sans doute eu une évolution comparable à celle du volume de trafic de la VGP mesuré à Tuileries, soit une baisse de 23% entre 2011 et 2014.

• Des études conduites à partir de comptages réels et d’hypothèses de trafic conformes à la réalité observée

En outre, les études de circulation ont été réalisées entre fin 2014 pour les études macro et mai 2015 pour les études micro donc sur la base de comptages récents. Les hypothèses de baisse de trafic appliquées pour un résultat de l’étude à l’horizon 2016 correspondent aux résultats observés depuis (-3% en 2015), ce qui montre que les hypothèses retenues n’ont pas été exagérément optimistes pour aboutir à un résultat escompté.

Il convient de noter que depuis 2001, le trafic dans Paris baisse chaque année de 2 à 3%.

Le retour d’expérience sur les différents grands projets précédents montre également que les résultats des études effectuées sont plus pessimistes que la réalité. Ainsi, sur les projets de tramway T3 sud et Est, les résultats donnaient une baisse de 30% du trafic sur les boulevards des maréchaux et 15% sur les radiales. Or, c’est respectivement 50% et 30% du trafic constaté en moins aussi bien pour le premier tronçon au Sud que pour le 2ème à l’Est. Sur les Berges Rive gauche, l’allongement du temps de parcours entre la gare d’Austerlitz et le pont Bir Hakeim résultant des études était de 7 mn  maximum alors que dans la réalité il n’est que de 2 à 3mn.

En conséquence, les résultats de la présente étude de circulation ne peuvent pas être considérés comme avantageux ni optimistes mais bien objectifs.

• La comparaison avec le récent épisode de crue et celle de l’opération sur la rive gauche n’est pas pertinente

La commission s’appuie sur le récent épisode de crue pour évaluer l’impact futur de la piétonisation des berges. Pourtant cet épisode est tout à fait exceptionnel par son ampleur et il a entrainé une fermeture de nombreuses voies bien au-delà de ce qui est prévu dans le cadre du projet : non seulement la VGP mais aussi tout le linéaire des quais bas entre l’entrée ouest et la sortie est. La fermeture du quai de Bercy a eu un impact très important. Cette crue a aussi entrainé des arrêts dans les transports en commun (notamment RER C) qui se sont cumulés avec les grèves. Les impacts du projet des berges rive droite s’apparentent plutôt à des petits épisodes de crue, tel que celui de février 2013, qui a montré qu’il n’y avait pas de report de trafic en dehors de Paris et que le réseau parisien absorbait facilement les reports.

3) La commission d’enquête justifie également son avis défavorable en indiquant que le développement de transports en communs de substitution n’aurait pas été pris en compte et en évoquant les effets cumulés d’autres opérations et d’autres chantiers
⇨ Le développement des transports en commun est constant depuis 2001, dans Paris et en dehors de Paris. Paris, par sa contribution au STIF, y participe très largement. Les moyens de substitution à l’utilisation de la voiture existent donc bien et vont même continuer à se développer. Il est faux de dire qu’il n’y a pas d’alternatives. Quant aux autres chantiers, la commission d’enquête aurait voulu que les études de circulation intègrent les futurs projets non encore mis en place, voire non encore définis. C’est évidemment impossible et contraire à toutes les pratiques : ce sont les études des futurs projets, qui devront tenir compte de la piétonisation des berges pour mesurer les impacts à venir.

• La commission d’enquête omet de prendre en compte un certain nombre d’éléments de la politique de développement de l’offre de transports en commun par la Ville de Paris

Comme il a été dit à la commission d’enquête, la Ville contribue très significativement à la politique de développement de l’offre de transports en commun en Ile de France.

Ainsi la contribution au STIF est une des plus grosses figurant au budget de la collectivité parisienne.

Avec la décentralisation du STIF en 2005, la part de la  Ville de Paris aux contributions publiques du STIF servant à financer le fonctionnement des transports en commun en Ile de France est passée de moins de 20% à 30% du total des collectivités franciliennes. Le montant de la contribution n’a depuis cessé d’augmenter en montant, pour accompagner l’augmentation de l’offre de transport francilienne (de 203 M€ en 2005 à 378 M€ en 2015).

Cette augmentation significative a permis de renforcer l’offre des différents modes de transport. Ainsi l’offre métro a augmenté de 9% entre 2004 et 2014. L’offre du RER A aaugmenté de plus de 10% sur la même période. Et l’offre du réseau de surface (bus et tram) a augmenté de 19% entre 2004 et 2015. L’augmentation des contributions publiques a également permis de lancer le renouvellement du matériel roulant comme le passage de rames à 2 niveaux pour le RER A ainsi que la modernisation du réseau existant comme l’automatisation de la ligne 1, les travaux en cours sur le RER A et le RER C, …

Cette amélioration de l’offre de transport en commun se poursuit à travers de nouveaux projets d’investissement. On peut citer le réaménagement du pôle de Chatelet les Halles en voie d’achèvement, la création et prolongements successifs de la ligne de tramway T 3, le prolongement de la ligne M 11 et du RER E, le prolongement de la M14 à Mairie de St Ouen pour désaturer la ligne 13, le projet de restructuration du réseau de bus parisien qui va faire l’objet d’une concertation dès l’automne 2016.

Enfin, la ville, le STIF et la RATP travaillent en vue du prolongement de la ligne 72, et de la création d’une ligne de bus à haut niveau de service sur les quais hauts pour toujours améliorer la desserte en transports en commun.

• Les effets cumulés avec les autres chantiers et projets

Concernant l’interface avec des chantiers en cours ou à venir sur le secteur des quais rive droite, tels que la Samaritaine, les Halles, Climespace, les théâtres de la Ville et du Châtelet, ou Morland, cités par la commission, cette accumulation ne reflète pas la réalité et est présentée de manière bien peu honnête par la commission : le chantier des Halles est en voie de finalisation et son impact sur la circulation est nul, les chantiers des théâtres de la ville, de Châtelet et encore plus de Morland n’interviendront pas avant plusieurs mois, voire années, soit bien après la piétonisation des Berges. Ces projets feront l’objet au cas par cas et au moment de l’instruction des dossiers d’un examen précis par les services de la Ville et ceux de la Préfecture de Police des impacts sur les conditions de circulation locales, en tenant compte de la piétonisation des berges qui sera alors effective.

4) La commission juge que le projet aura un impact économique négatif et note l’absence d’information sur les activités économiques nouvelles susceptibles de compenser l’impact négatif du projet
⇨ Là encore, la commission ne s’appuie sur aucun élément fiable et démontré mais uniquement sur des commentaires. Est-il encore besoin de citer tous les exemples de villes ayant limité la place de la voiture dans leur centre et qui connaissent des développements économiques et une attractivité non démentie ?

On sait aujourd’hui, à partir des retours d’expériences à travers la France et le monde (New York, Londres, Séoul, Lyon, Bordeaux…) que ce type de projet, contribuant à améliorer la qualité du cadre de vie,  constitue un facteur essentiel dans le choix d’implantation des entreprises.

On peut aussi rappeler qqs exemples comme celui récent de la piétonisation des Champs Élysées, qui suscite l’enthousiasme des Parisiens, des touristes et des acteurs économiques.

En dépit des précisions de la ville, la commission d’enquête considère que le projet aurait globalement un impact négatif pour l’économie de la ville, en raison des embouteillages provoqués par la fermeture de la VGP, qui risquent d’allonger les temps de transports pour les professionnels et de faire baisser la fréquentation de certains commerces (marchands des quais, grandes enseignes…). Elle affirme que cet impact négatif « semble largement excéder » l’impact positif de la fermeture de la voie sur berge dès lors que les perspectives de développement d’activités nouvelles en lien avec la Seine seraient marginales et limitées économiquement.

• Des effets positifs locaux certains

D’une part ces affirmations, minimisant le potentiel de développement des activités liées à la Seine, sont erronées. La Ville de Paris dispose de sept locaux sous quai haut, sur les berges de la Seine, rive droite, entre l’Hôtel de Ville et le Louvre. Dans la perspective d’une possible fermeture de la circulation automobile sur la voie Georges Pompidou, la Ville a prospecté pour identifier des opérateurs économiques et des projets particulièrement remarquables au plan social et environnemental, susceptibles de s’installer dans ces locaux.

Les discussions conduites avec les opérateurs économiques intéressés par les sept locaux et satisfaisant aux critères sociaux et environnementaux de la Ville laissent présager de leur capacité à créer plus de 40 emplois, à générer un chiffre d’affaires de près de 3 Millions € en année d’activité pleine et à stimuler, dans une zone centrale à fort effet « vitrine », une nouvelle économie (restauration écoresponsable, produits touristiques équitables, économie de la réparation et du réemploi, etc.) à haut potentiel pour Paris.

Quant aux activités économiques à développer par Ports de Paris sur les berges rive droite, même si un nombre limité de nouveaux établissements flottants est attendu, il n’en demeure pas moins que les établissements flottants et l’activité économique de restauration existants, qui n’ont pas été interrogés par la commission d’enquête, escomptent augmenter de manière très significative leur chiffre d’affaires et d’embaucher du personnel supplémentaire en proposant une offre, tout le long de l’année, diversifiée ( séminaires, mariage…) en plus d’étendre celle très ciblée liée à la manifestation Paris Plages.

• Des effets négatifs nullement avérés

D’autre part, les effets négatifs du projet sur l’activité économique ne sont nullement avérés. En effet depuis de nombreuses années, la ville de Paris a engagé une politique volontariste de création d’espaces de logistique urbaine (ELU) en cœur de ville, qui permettent de réduire considérablement le trafic et les encombrements dus aux livraisons terminales. La modification, récemment adoptée par le Conseil de Paris, du Plan Local d’Urbanisme vise notamment à favoriser le développement de ces ELU partout dans Paris.

Plus globalement, un travail étroit est mené depuis quelques années par la Ville en lien avec les professionnels du secteur de la logistique pour permettre cette transition vers une organisation logistique plus vertueuse et durable à Paris. Les orientations et des projets d’actions concrètes sont formalisés au sein d’une charte de la logistique urbaine durable signée en 2013, avec des groupes de travail qui se réunissent régulièrement pour avancer sur différents thèmes de la charte.

Suite à la proposition adressée par la Fédération Nationale des Transporteurs Routiers dans son courrier du 7 juillet au commissaire enquêteur, un groupe de travail réunissant la Chambre des Métiers, le GATMARIF (Groupement des Activités de Transports et de Manutention de la Région Ile de France), la Direction de la Voirie et des Déplacements de la Ville et l’APUR (Atelier Parisien d’Urbanisme) a été mis en place cet été.

• Un élément fort d’attractivité et de mise en valeur patrimoniale de la capitale

De surcroît, la piétonisation des berges rive droite va concourir à renforcer l’attractivité de la capitale en développant de nouvelles activités en lien avec la Seine, en premier lieu le tourisme, mais aussi favoriser des projets de transport fluvial de passagers ou encore de nouvelles implantations de sites de logistique fluviale dans Paris.L’Office du Tourisme et des Congrès de Paris a bien intégré dans sa communication la valorisation d’un aménagement durable et exemplaire tel que celui des berges rive gauche dès sa livraison, dans la mesure où il constitue un élément d’attractivité très important : balades, nature, activités variées, patrimoine… Tous les publics peuvent y trouver unou plusieurs centres d’intérêts et les diverses brochures éditées par l’OTCP mettent fortement en avant cet atout supplémentaire de la Capitale. Cette stratégie de reconquête des berges menée par Paris est d’ailleurs très regardée à l’étranger, et de nombreuses délégations et maires de grandes métropoles se sont déplacés pour visiter les aménagements réalisés sur nos berges, ce qui témoigne du potentiel d’attractivité important d’une Ville qui se tourne de plus en plus vers son fleuve.

• Des activités qui doivent encore voir le jour et qui renforceront l’intérêt économique du projet

Enfin, les activités qui doivent prendre place dans les tunnels ne sont pas encore déterminées – ce que nous reproche la commission de façon absurde – puisqu’elles font l’objet d’un appel à projets lancé à l’échelle de l’Axe Seine, associant Paris/Rouen/Le Havre. D’une part, il ne peut être reproché à la Ville de ne pas avoir intégré des éléments inexistants à ce jour. D’autre part, ces activités ne pourront de toute façon que renforcer l’intérêt économique déjà avéré du projet, en favorisant l’innovation et en contribuant au développement de l’axe Seine

5) La commission conteste enfin les effets positifs sur la pollution automobile et les nuisances sonores:

Une fois encore à rebours de tous les constats et les études, la commission ne s’appuie pas sur des éléments réellement objectifs et précis pour contester les effets positifs de la piétonisation des voies sur berges sur la pollution. Comment une voie circulée de moins pourrait-elle générer autant de pollution que deux voies circulées ? Les études d’Airparif et de Bruitparif sont formelles et incontestables.

• Une baisse générale de la circulation engendrant une qualité de l’air améliorée

La commission estime que l’impact positif sur la qualité de l’air n’est pas démontré, dans la mesure où « pour que le projet puisse non seulement être neutre mais encore avoir les effets positifs sur la pollution automobile assignés au projet, il serait nécessaire que celui-ci entraîne une réduction significative du nombre de véhicules en circulation ».

Comme le montrent les études, le report principal de circulation sur le quai haut rive droite ne représentera qu’une partie limitée (moins de 25 %) du trafic actuel du quai bas et au global les flux cumulés des quais bas et quais haut seront en forte baisse, engendrant comme le montre le volet air et santé de l’étude d’impact une diminution très significative de la concentration en polluants sur le secteur concerné entre la situation modélisée sans le projet et avec le projet. Le projet réduira les émissions de polluants en moyenne de 38 % et ce pour tous les polluants sur le secteur du projet, au regard de la baisse globale de trafic sur l’ensemble quais hauts/quais bas de la rive droite.

Le projet génère une diminution des concentrations de polluants dans l’air (NO2, particules fines, benzène…) supérieure à 23%, et proche de 30% pour certains, dans cette zone.

Cette étude vient confirmer les effets dûment constatés par Airparif de la baisse de la circulation sur la pollution. Depuisl’engagement en 2001 de politiques de rééquilibrage de l’espace public et de lutte contre la pollution, on constate moins de 28 % de déplacements en voiture, soit une baisse tendancielle de 2 % à 3 % par an. L’étude AIRPARIF de juillet 2013 montre que les aménagements réalisés entre 2002 et 2012 aboutissant à une diminution générale du trafic et de la circulation ont eu un impact significatif en matière de qualité de l’air, du fait d’une réduction des émissions de polluants atmosphériques d’environ 10 % (-11% pour les oxydes d’azote et -9% pour les particules fines).

• Une baisse évidente du niveau de nuisances sonores

S’agissant des nuisances sonores : comme le bilan des berges rive gauche et les études Bruitparif l’ont montré, en dépit des reports sur le quai haut, la situation du point de vue des nuisances sonores est globalement meilleure après la mise en œuvre de la piétonisation. La commission d’enquête se borne à mettre en doute la validité du rapprochement avec l’opération Berges rive gauche, et à noter une hausse du niveau sonore la nuit en quai haut, alors que les niveaux sonores ont diminué en moyenne de 10 dB(A) au niveau du point situé port de Solferino, qu’ils ont diminué entre -0,5 et -1,8 dB(A) selon les périodes et le type de jour au niveau du point situé port des Champs Élysées (face aux berges rive gauche).

Par Anne Hidalgo

Un commentaire

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    • miélot

    Qu’on le veuille ou non, les villes dans le futur ne pourront plus absorber le trafic du parc automobile en pleine expansion .
    Pollution, perte de temps ,coût exorbitant des soins des malades de la pollution seraient bien vite compensés par des transports en commun gratuits et électriques et une autre façon de se déplacer en ville (à pied et à vélo….électrique pour les paresseux).

Patrick Criqui, directeur de recherche au CNRS à propos des enjeux de la COP29 : « réduire les émissions de gaz à effet de serre est moins coûteux dans les pays du Sud que dans les pays du Nord »

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