Soutenez GoodPlanet Mag’ et les projets engagés de la Fondation GoodPlanet en faisant un don !

Stéphanie Pageot : « la bio doit être la locomotive de la transition agricole »

La présidente de la FNAB (Fédération Nationale d’Agriculture Biologique) Stéphanie Pageot dresse le bilan des États généraux de l’Alimentation. Ils se sont clôturés jeudi 21 décembre avec plusieurs annonces sur la bio.

Quel bilan tirez-vous de ces États généraux de l’Alimentation ?

Le bilan se révèle mitigé sur la transition agricole car il n’y a pas eu d’annonces fortes du gouvernement. Malgré beaucoup de réunions, de débats et de concertations, le fait que le ministère de l’Agriculture soit aux commandes empêche des ambitions fortes sur la transition agricole.

Quel signal est envoyé à la filière bio alors que celle-ci rencontre du succès auprès des consommateurs ?

Il y a eu les annonces du Premier Ministre de doubler la surface consacrée à la bio, c’est-à-dire d’atteindre 15 % de surfaces en agriculture biologique d’ici la fin de la mandature. Cela encourage et tient compte du rythme actuel des conversions. Il s’agit d’une première avancée positive.
Nous restons cependant inquiets sur l’accompagnement budgétaire des productrices et producteurs désirant passer à la bio. Le gouvernement ne se positionne pas clairement sur le budget alloué aux aides à la conversion. Nous craignons que leur durée soit réduite de 5 à 3 années. Nous espérons que cela restera 5 ans et que les services environnementaux et sociaux de l’agriculture biologique seront reconnus.

Que sont les services environnementaux et sociaux de l’agriculture biologique ?

Pour nous, les agriculteurs et les agricultrices ont 2 fonctions : produire des aliments de qualité pour le consommateur et préserver l’environnement. Concrètement, on retrouve derrière ces services la protection des ressources en eau, la conservation voire la reconquête de la biodiversité, par exemple les abeilles et les oiseaux, la préservation de la qualité du sol et de l’air. Nous considérons ces services comme importants pour la société, il faut donc qu’ils soient rémunérés. La rémunération va au-delà du prix de la vente d’un produit. Il faudrait rémunérer ceux qui vont dans le sens de la préservation de ces ressources tandis que les autres ne devraient pas percevoir d’aides.

Est-ce que les États généraux de l’Alimentation ont apporté des réponses au développement des filières locales et des circuits-courts ?

Je n’ai pas trouvé. Les mesures présentées concernent des filières longues. Il reste un gros travail à fournir sur ces questions. Pour nous, c’est important d’associer la bio à la relocalisation des filières sur tous les territoires et dans toutes les productions. L’annonce de 50 % de produits bio ou locaux ou agroécologiques dans la restauration collective s’avère une bonne chose, mais il aurait mieux valu associer bio et local. Et pas bio ou local. Un produit local fait avec du soja OGM d’Amérique du sud ou à l’aide d’un engrais chimique à base gaz russe n’a finalement de local que le nom.

Que faudrait-il faire en priorité pour favoriser le développement du bio ?

Nous prônons un appel à projets pour développer 1000 territoires bio en France afin de concilier la bio et le développement territoriale. C’est faire en sorte qu’il y ait des acteurs, des structures et des filières partout pour redynamiser le terroir, permettre de manger localement et de créer de la valeur ajoutée dans les régions.

Quel est la prochaine étape après ces états généraux ?

Ce sera une grande concertation des acteurs de la bio pour mettre en place le programme ambition bio et le faire vivre. Il faut mettre en place un comité de pilotage avec l’État, les régions, les agences de l’eau et les acteurs économiques pour faire réussir ce programme. Tout reste à faire. Après la concertation, il faut passer à l’action avec des moyens financiers. Il y a un enjeu ministériel, en plus du ministère de l’Agriculture, les Ministère de l’Environnement, de l’Education et la Santé doivent joindre le mouvement.

Faudrait-il en conséquence faire de la bio une grande cause nationale pour les décennies à venir ?

Oui, il faut une ambition forte sur la filière bio pour tirer l’ensemble de l’agriculture vers des pratiques plus vertueuses. La bio doit être la locomotive de la transition agricole.

Propos recueillis par Julien Leprovost

5 commentaires

Ecrire un commentaire

  • Nous sommes ce que nous mangeons mais le porte-parole du CSLT a évalué que nous consommons beaucoup plus d’énergie pour nous chauffer et alimenter notre voiture que pour nous nourrir. Voir

    http://www.infoenergie.eu/riv+ener/source-energie/SWE.htm

    Pour dire à notre Président que selon lui la locomotive de la transition énergétique est le chauffage thermodynamique aquathermique de l’habitat urbain il lui a adressé une lettre ouverte :

    http://www.infoenergie.eu/Lettre-ouverte.htm

    • Claude Courty

    « la bio doit être la locomotive de la transition agricole »
    Cette transition suffira-t-elle à faire face à lune autre transition encore plus inquiétante et à ses conséquences, allant bien au-delà de l’alimentaire et qui sera celle du passage d’une population de 8 à plus de onze milliards de terriens dans moins d’un siècle ?

    • Francis

    « Vers des pratiques plus vertueuses »: c’est toujours la même idiotie qui revient. Les agriculteurs ne travaillent pas avec des pratiques. Ils travaillent avec des techniques qu’on leur a enseigné à l’école ou dans le cadre de la formation permanente. Quand on a eu l’esprit formaté par la science officielle et tant que les ingénieurs et techniciens eux mêmes n’auront pas compris la transition à faire, ce genre d’ Etat Généraux ne peut pas avoir de grand résultat.

      • Michel CERF

      cela veut dire que les agriculteurs ne sont pas capables de réfléchir par eux même , heureusement la nouvelle génération semble avoir pris conscience des problèmes et s’adonne à des PRATIQUES vertueuses .

    • AUSTRASIA

    L’agriculture bio constitue aujourd’hui, à juste titre, le but à atteindre .
    Mais quand on y réfléchit, mes parents, il y a 30 ans cultivaient leur jardin (pommes de terre, carottes, haricots, fraises, concombres…) sans ajouter de pesticides ou engrais et on ne savait même pas ce qu’était l’agriculture bio que mes parents pratiquaient au « tarif normal », sans surplus et que les produits étaient bons et avaient du goût !
    Je rêve (c’est Noël !) au retour à une agriculture conventionnelle, comme avant où les doryphores envahissaient le jardin, tout comme les sauterelles et les abeilles… !!!
    Oui au bio, mais sans en faire un créneau élitiste et une nouvelle occasion hypocrite pour quelques uns de se remplir les poches ! Joyeux Noël !