Dans une étude publiée aujourd’hui dans la revue scientifique Climate Change, des chercheurs de l’université d’East Anglia et le WWF (Fonds mondiale pour la Nature) étudient l’impact sur la biodiversité des changements climatiques en fonction de plusieurs scénarios d’évolution du climat. Dans 35 régions étudiées, la hausse des températures s’accompagne d’un risque croissant pour les espèces sauvages. Dans le pire des scénarios, une hausse de 4,5 degré Celsius des températures se menacerait d’extinction la moitié des espèces. Pierre Cannet, responsable des programmes Climat, Énergie et Villes durables au WWF France a répondu à nos questions sur l’étude La Nature face au choc climatique.
Dans les grandes lignes, que disent l’étude La Nature face au choc climatique et l’article sur Les implication de l’accord de Paris pour la biodiversité paru dans la revue scientifique Climate Change ?
Les scientifiques ont établi 3 scénarios d’évolution du climat jusqu’en 2080. Le scénario du laisser-faire conduit à une hausse de 4,5 degrés Celsius de la température. Celui des engagements pris à la COP21 de Paris se traduit par 3,2 degrés Celsius d’augmentation et enfin l’application maximale de l’Accord de Paris vise à maintenir en dessous des 2 degrés l’élévation des températures. Les modélisations montrent qu’un réchauffement climatique de 4,5 °C met en péril la moitié des espèces. Ce risque est réduit de moitié (soit 25 % des espèces menacées) si le dérèglement du climat est maintenu à 2 °C. En Amazonie et sur plateau des Guyanes, 4 plantes sur 10 seraient ainsi menacées d’extinction. Le climat constitue la menace de trop pour la biodiversité. C’est l’ultime coup porté aux joyaux de la biodiversité mondiale déjà menacées par ailleurs. Plus proche de chez nous, un tiers des espèces de plantes, d’amphibiens et de mammifères de la Méditerranée, dont 3 espèces de tortues marines emblématiques, sont menacées si aucune possibilité d’adaptation ne leur est laissée.
Quelles sont les conclusions à tirer de cette étude qui montre qu’en cas de changement climatique non-maitrisé 50 % de la biodiversité de certaines régions serait menacée d’extinction en 2080 ?
Les conclusions vont au-delà du scénario de 4,5 °C, l’objectif de 2 °C limite la casse. Mais, un réchauffement climatique limité à 2 degré reste aussi un climat de 2 degré de trop pour de nombreux groupes d’espèces dont les plantes, les amphibiens et les reptiles. Ces groupes auront du mal à s’adapter et à se déplacer. Avec une température mondiale qui a augmenté d’un degré Celsius depuis l’ère industrielle, nous observons déjà des problèmes de nidification et de pontes pour les tortues. Le sable trop chaud conduit à un déséquilibre des sexes avec plus de naissances de femelles que de mâles ou encore à moins de ponte.
Même si seulement 25 % ou 33 % des espèces sont menacées à cause d’un réchauffement maitrisé avec l’Accord de Paris, cela reste trop. L’année 2018 doit conduire à relever l’ambition sur le climat avec la COP24 qui se tiendra en Pologne. Tous les efforts doivent se concentrer pour aller plus loin dans les efforts de réduction des émissions de gaz à effet de serre et la sortie des énergies fossiles.
Finalement, les mesures de conservation de la biodiversité seront-elles inefficaces si rien n’est fait pour le climat ?
Exactement. Les corridors et les refuges sont pourtant des mesures efficaces qui permettent de réduire la menace, mais seulement si les espèces peuvent se déplacer et trouver des régions adaptées à leurs besoins.
Alors, comment intégrer la protection de la biodiversité aux discussions sur le changement climatique ?
Même si notre étude isole le climat comme facteur de menace sur la biodiversité, dans les faits il n’est pas possible de l’isoler des autres menaces. La protection des habitats et des écosystèmes joue un rôle majeur pour le climat car ce sont des puits naturels de carbone qui séquestrent une partie des gaz à effet de serre. Les milieux naturels doivent être repensés dans contexte de lutte contre le changement climatique et cela sera discuté lors de la COP15 de la Convention sur la Diversité Biologique (CDB) en 2020 en Chine. Or, les objectifs d’Aichi de protection de la biodiversité, fixés en 2010, ne seront pas tous atteints en 2020. Nous demandons, pour le bénéfice de tous, que la Nature revienne en tête de l’agenda politique.
Est-il encore possible d’agir ?
D’après les rapports du Giec (groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), il s’avère possible d’amorcer une trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour que la planète se ne se réchauffe que de 1,5 °C. Les solutions existent, sont connues et commencent à se déployer. Il s’agit des énergies renouvelables, de se déplacer moins et mieux, de revoir nos modes de consommation. Il faut que les gouvernements poussent ces solutions pour accélérer la transition.
Concrètement quelles mesures d’adaptations faudrait-il prendre pour préserver la biodiversité dans les régions concernées ?
C’est du cas par cas. S’agissant des tortues, il faut protéger les sites de nidification et de ponte, en opérant, par exemple, des transferts vers des zones plus élevées où le sable est plus frais. Au Belize, la réintroduction des espèces de coraux est expérimentée afin de reconstituer des récifs.
Au niveau mondial, la lutte contre la déforestation est prioritaire. Elle concerne le commerce du bois provenant de régions menacées et l’arrêt de l’extension des terres agricoles. Elles sont gagnées en défrichant des forêts riches en biodiversité et qui stockent du carbone. Cela passe par la mise en place de certification sur la provenance du bois ou de notre alimentation, en particulier le soja.
Propos recueillis par Julien Leprovost
7 commentaires
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jipebe29
Nihil novi sub sole est… Tout ce qui dérange la doxa réchauffiste est mis sous le tapis. Par exemple, le fait que le terrrrrible réchauffement du climat n’a été, somme toute, que de +0,7°C en 130 ans, et qu’il a quasiment cessé depuis le début des années 2000, malgré une inflation de nos émissions de CO2. Ou encore le fait que les projections des modèles numériques divergent de plus en plus des observations, ce qui prouve qu’ils n’ont aucune crédibilité et que toute prophétie basée sur leurs projections multidécennales ne vaut rien, comme c’est le cas pour cette « étude ». Par contre, le silence de WWF, qui a pour mission de protéger la biodiversité, est assourdissant en ce qui concerne le terrible massacre d’oiseaux et de chauves-souris par les pales des éoliennes…
Mallard
Le degré est une échelle de température… d’énergie. Voir °C °F etc…
Rapporter 4°C d’ici un siècle par exemple à la plage de développement des êtres vivants qui se situe entre 10°C et 30°C devient alors 20%. et on en fait disparaître en gros 20%
4°C de plus à 10°C ne conduit pas au même taux de développement qu’à 20°C, et au delà de 30°C la vie se raréfie.
Le réchauffement c’est comme pousser des moutons dans un précipice…
Complément
La plage est de 20°C par exemple pour le taux de développement des insectes :
https://web.natur.cuni.cz/ekologie/jarosik/cze/pdf/D64.pdf
Si les insectes disparaissent quelque part que devient l’oiseau, l’arbre… tout le monde se déplace éventuellement s’il peut le faire.
Le taux de développement des insectes a en première approche une croissance linéaire en température entre 10 et 30°C, avant taux nul, après disparition de l’espèce. Pour les zones aux environs de 30°C, 20% en plus en température d’ici 50 ans va y induire environ 30% à 40% d’insectes en moins ou qui seront repoussés en latitude… qui a de son côté une limite aux pôles et qui offre une surface de plus en plus faible… et si on passe ensuite à 4°C encore en plus etc…
Claude Renaud
Une hausse des températures de 4,5 degrés menacerait d’extinction la moitié des espèces….et
mettrait gravement en péril la race humaine. Avec une telle hausse, la Planète va devenir hostile à
l’Homme. Avec 4,5 degrés en moins, il y a dix mille ans, le calotte glaciaire recouvrait la moitié de
la France. Nous jouons avec le Climat en croyant tout contrôler alors que dès maintenant il est déjà
hors de contrôle. Nous nous donnons encore dix ans pour agir mais nous avons déjà vingt ans de
retard. Notre incapacité à prendre des mesures efficaces est affligeante.
Comme l’a dit récemment un scientifique « nous n’allons pas dans le mur, nous sommes dans le mur ».
Et ce ne sont pas les théories de jipebe29 qui vont arranger les choses !
Bio-Eco
Relier tout à la biodiversité…
Les forces motrices (industrie, agriculture, activités publiques…) sont responsables des pressions (fragmentation habitat, pollution, …) induisant un état de la biodiversité en déclin (nombres d’individus, d’espèces…), conduisant à des impacts (moins de puits carbone, de sources de diversité…) devenant à leur tour des pressions… Les réponses associées politiques, du grand public relèvent de l’individualité, du ponctuel, du local, de la bonne volonté…
De même que pour le climat, il existe une surveillance mondiale basée sur des moyens visibles, des paramètres compréhensibles de température, humidité… de même pour la biodiversité, il est nécessaire de mettre en place une autre démarche scientifique visible, organisée, complémentaire, avec aussi des données, des dispersions, des incertitudes, des interpolations, extrapolations étayées, des publications ouvertes, accessibles des paramètres agrégés simplifiés.
Ce travail est un travail de terrain émanant aussi des forces motrices, prolongé par des analyses à différentes échelles de temps et d’espace, des échanges interdisciplinaires (biologie, physique, chimie, maths, industrie, agriculture, publics…), des acteurs regroupés en cohérence (universités, scolaires, associations, public…) au travers des frontières qui n’existent pas pour la biodiversité.
Proposons une réponse pratique « simple de « TVA » mondiale, modulée entre 0 et 1000% pour toutes les activités, une TVA accrochée étroitement à la valeur de l’argent, valeur acquise, avec un montant évolutif, mis en lien direct avec les pressions sur la biodiversité qui assurerait ainsi des moyens immédiats, une auto-régulation des impacts. Cette « TVA » est régulée, définie par les paramètres d’état mesurés, estimées de biodiversité…
Par exemple, l’impact de milliers d’hectares sous serres TVA=?, des milliers d’hectares avec une seule culture TVA=?, le choix d’immeubles en lieu et place de maisonnettes TVA=? … L’argent lié à la biodiversité remplacerait l’argent pour l’argent… l’homme fait partie de la biodiversité.
L’argent est une donnée basique, dit « un tenseur d’ordre 0 ». Il existe de grandes réunions mondiales sur le commerce, y glisser la biodiversité, y faire évoluer cette données basique d’argent avec une direction soit « tenseur d’ordre 1 » voire oser 2, 3… est sûrement à la hauteur des niveaux de réflexion des hauts salaires qui s’y réunissent.
Jean Grossmann
il est possible d’agir
http://infoenergie.eu/riv+ener/COP21.htm
Jean Sivardière
Les défenseurs de l’environnement et les écologistes s’inquiètent à juste titre du réchauffement climatique, cet article confirme la justesse de leur point de vue. Mais alors, pourquoi s’opposent-ils aux grands projets ferroviaires – lignes à grande vitesse et nouvelle liaison Lyon-Turin – dont la réalisation permettrait de faire basculer massivement sur le rail des trafics aériens et routiers sur de longues distances, et donc de réduire fortement nos émissions de gaz à effet de serre ?