Le cadmium, ce tueur silencieux, caché dans les engrais phosphatés

engrais

Paysage agricole près de Châlons-en-Champagne, Marne, France (48°59’ N - 4°21’ E). © Yann Arthus-Bertrand

Nous republiions la communiqué du Réseau Environnement Santé qui demande une plus grande régulation de la présence de cadmium dans les engrais en raison du risque que cette substance pose pour la santé.

Le gouvernement français doit soutenir le projet de réduction des taux de cadmium dans les engrais phosphatés proposé par l’Union européenne

La France n’a toujours pas pris publiquement position sur le projet de la Commission européenne d’abaisser la limite pour la teneur en cadmium des engrais phosphatés. Le cadmium est un métal lourd cancérogène pour l’homme et suspecté d’être un perturbateur endocrinien. De nombreuses études ont montré que les reins et les os sont les principales cibles après une exposition chronique au cadmium.

Le projet de la Commission européenne vise à fixer une limite à 60 mg de cadmium (Cd) / kg de P2O5 dès la date de publication du règlement qui sera abaissée à 40 mg de Cd / kg de P2O5 après 3 ans, puis à 20 mg de Cd / kg de P2O5 après 12 ans. En outre, le Parlement européen a adopté un amendement visant à la création d’un label vert pour les engrais qui contiennent moins de 5 ppm de cadmium, d’arsenic, de plomb, de chrome hexavalent et de mercure, totalement en phase avec le concept d’agriculture durable. A partir du 20 mars, ce texte fera l’objet de négociation entre le Conseil de l’Union européenne, le Parlement européen et la Commission européenne pour aboutir à un texte commun.

L’utilisation des engrais phosphatés inorganiques où les teneurs en cadmium peuvent être supérieures à 60 mg de Cd / kg de P2O5 est la principale cause de la contamination des sols au cadmium. Par conséquent, il pénètre facilement dans les végétaux entrant dans la chaîne alimentaire. On le retrouve en particulier dans les légumes, les céréales et certains aliments d’origine animale (abats, coquillages, crustacés et poissons). L’alimentation représente ainsi 90% de l’exposition au cadmium pour les non fumeurs. Depuis 2009, les autorités sanitaires alimentaires européennes et françaises ont tiré la sonnette d’alarme et recommandent de réduire notre exposition au cadmium par la diminution des contaminations des principaux aliments (légumes, pommes de terre). Alors que notre réglementation nationale autorise des engrais phosphatés à forte teneur en cadmium, 14 Etats membres ont déjà instauré une limite inférieure ou égale à 60 mg de Cd / kg de P2O5. La Finlande, la Hongrie et la Slovaquie ont eux limité la teneur en cadmium à 20 mg de Cd / kg de P2O5. Ces différents exemples nous montrent qu’une législation européenne ambitieuse pour réduire notre exposition au cadmium est plus qu’à portée de main.

Si d’autres pays de l’Union européenne se sont déjà mobilisés pour réduire les teneurs en cadmium dans les engrais phosphatés, comment se fait il que nous n’entendions pas la voix de la France ? Pourtant, le cadmium étant reconnu comme perturbateur endocrinien, ce projet s’inscrit dans la ligne droite de la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens adoptée en 2014 dont l’objectif est la réduction de l’exposition de la population et dont le bilan vient de faire l’objet d’une appréciation très positive des Inspections générales. Les perturbateurs endocriniens sont impliqués dans les grandes atteintes de la santé comme les cancers du sein et de la prostate, les troubles de la reproduction, l’obésité le diabète ou encore l’autisme. Comme le rappelle André Cicolella, Président du Réseau Environnement Santé, « les perturbateurs endocriniens ne sont pas des substances comme les autres, il faut les éliminer à la source car on ne peut pas gérer par la dose » et le meilleur moyen de s’en protéger est de « diminuer au maximum les sources de contamination ». Dans cette perspective, le projet de la Commission européenne, s’inscrit dans la bonne démarche.

Le projet de la Commission européenne constitue une opportunité pour réduire l’exposition au cadmium de la population et Réseau Environnement Santé a décidé d’interpeller, au travers d’une lettre ouverte, les ministres de la Santé, de l’Agriculture et de la Transition écologique et solidaire pour obtenir l’engagement public du gouvernement français en faveur d’un soutien plein et entier quant à la proposition, en l’état, de règlement de la Commission européenne

Le cadmium, ce tueur silencieux, caché dans les engrais phosphatés
par le Le cadmium, ce tueur silencieux, caché dans les engrais phosphatés

5 commentaires

Ecrire un commentaire

    • dambrine

    Il faut savoir ce que veulent les ong environnementales : revenir au bio ou continuer l’agriculture dite conventionnelle (qui soit dit en passant était innovante et moderne en 1960 quand on a relancé l’agriculture française). Le cadnium est naturellement contenu dans les phsphates naturels car dans les mines de phosphates, quand ceux ci se sont formés, le cadnium s’est lié au phosphate et au carbonates pour former la roche de phosphate naturelle. Les phosphates de synthèse continennent (selon les process de nettoyage du phosphate naturel) en dix et cent fois moins de cadnium que les phosphates naturels qui sont utilisés en bio pour amener le phosphore mais aussi pour entretenir le sol à un pH favorable à la croissance des plantes car les phosphates naturels sont pour l’essentiel des carbonates.
    Il existe des phosphogypses qui naturellement sont des sulfates et qui contiennent moins de cadnium mais ces phosphogypses ne représentes que 15% de la production de phosphates naturels mondiaux.

    • Francis

    Les engrais phosphatés sont dits « chimiques » quand ils sont purifiés. . Les phosphates naturels autorisés en bio peuvent effectivement polluer les sols avec des métaux lourds, y compris de l’uranium. Dambrine confond phosphate de calcium et carbonate de calcium. Ces minéraux n’ont pas la même origine et seuls les carbonates sont utilisés pour remonter le pH, ne serait-ce que à cause du coût des phosphates.
    L’erreur de la science officielle depuis presque 2 siècles est d’avoir confondu le caractère assimilable d’un sel minéral avec sa solubilité dans l’eau. La nature a prévu que ce soit la vie du sol qui nourrit les plantes, les mycorhizes en ce qui concerne le phosphore (les champignons qui vivent en symbiose avec les racines). En apportant du phosphate soluble, les mycorhizes sont court-circuités et la croissance des plantes est stimulée artificiellement (l’effet starter). Malheureusement cet effet starter affaiblit les cultures vis à vis des maladies et c’est l’engrenage infernal qui a amené l’utilisation des fongicides. Comme les analyses de terre ne recherchent que le phosphate soluble, les conseils de fertilisation donnés par les laboratoires aux agriculteurs ignorent les réserves de phosphates insolubilisés mais pourtant disponibles. L’agronomie officielle a donc entrainé une sur-consommation d’engrais phosphatés inutiles et toxiques pour les mycorhizes. Alors que les techniques agricoles alternatives (PRP et TMCE) favorisent l’activité des mycorhizes avec les oligo-éléments adéquats et bannissent l’apport de phosphate soluble.
    Ce qui n’empêche pas que le phosphore enlevé au sol par les récoltes doit y revenir. Or, depuis la Rome antique et sa cloaqua maxima, il était considéré comme normal que le phosphore des sols qui passe dans le lisier humain aille à la mer via les rivières et les fleuves. Maintenant, il est récupéré dans les boues de station d’épuration mais le problème des métaux lourds est revenu, surtout le plomb des anciennes canalisations d’eau. Sans oublier toutes les autres saloperies qu’on peut trouver dans les eaux d’égout.

    • DESCLAUD Patrice

    Quoique veulent les associations bio ou pas, il faut respecter les sols et c’est souvent et simplement une question de quantité. Autrefois on n’avait pas tant de chimie dans les cultures et donc dans les sols ! Avoir par exemple par ailleurs 22 à 27 traitements sur les pommiers ou dans les vignes quelque soit l’état naturel initial des sols, n’a jamais arrangé la santé des agriculteurs comme des consommateurs (même si les effets des faibles doses sont longs).
    Espérons qu’une fois de plus on ne va pas être en Europe les derniers des derniers à comprendre (comme pour le Glyphosate …) en cédant aux lobbies de l’agro-business pour clientélisme électoral.
    Patrice

    • Jean

    Il faut réglementer les engrais qui, répandus en grande quantité sur les sols agricoles, peuvent être un vecteur de diffusion de substances dangereuses pour la santé des consommateurs, mais n’oublions pas que certaines de ces substances, mises en œuvre dans des équipements de pointe, sauvent aussi des vies: par exemple le cadmium dans les accumulateurs de secours des avions de ligne (voir le film de Tom Hanks: Sully)…

    • Michel CERF

    Si le cadmium sauve des vies il en tue combien ? de toute façon l’agriculture intensive dite moderne a fait de nos terres un immense cimetière de la biodiversité , de nos rivières des égouts , l’élevage intensif accentue encore le désastre avec le CO2 et la maltraitance animale .

Cyril Moulin, président de Bio Équitable en France à propos de la crise agricole et du Mercosur : « un plan social qui ne dit pas son nom et qui va se révéler dramatique pour notre souveraineté alimentaire »

Lire l'article