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Biodiversité : et si vous profitiez des vacances pour faire de la science citoyenne ?

À la recherche de la petite bête.
Shutterstock

Bastien Castagneyrol, Inrae

En cette période estivale, la plage constitue un passage obligé pour nombre de vacanciers. Si beaucoup prennent plaisir aux bains de mer et de soleil, d’autres appréhendent la promiscuité, le hurlement des enceintes Bluetooth ou encore les entêtants effluves de monoï…

Si vous appartenez à la seconde catégorie, pas de panique, il est toujours possible de mener près des flots une activité ludique et utile, à faire seul ou en famille : participer à un programme de science citoyenne.

Vous vous inscrirez ainsi dans la longue tradition de naturalistes amateurs qui ont contribué, par leurs observations avisées et parfois leurs obsessions, à la construction de la biologie et de l’écologie moderne, et cela bien avant même que l’on parle de « science citoyenne ». Celle-ci désigne la production de savoirs scientifiques par des citoyens dont « faire de la science » n’est pas la profession. Ici, un appareil photo et une connexion Internet peuvent suffire.

Si vous êtes coincé dans les bouchons en allant vers la plage, jetez par exemple un œil au programme BioLit pour planifier une petite escapade scientifique entre deux baignades. Vous y apprendrez comment – en photographiant algues, crabes, et méduses – aider les scientifiques à mieux connaître la biodiversité du littoral et son évolution.

Mais, rassurez-vous, il n’est pas obligatoire d’aller en bord de mer pour devenir « scientifique citoyen » (à moins que ce ne soit « citoyen scientifique » !). Il existe aussi des dizaines de programmes de ce type en ville, à la campagne ou encore à la montagne. La science citoyenne se pratique aujourd’hui absolument partout !

 

Pas besoin d’être un expert

Vous avez probablement entendu dire que les insectes sont en train de disparaître et que les conséquences de cette disparition pourraient être catastrophiques pour notre alimentation. En même temps, vous êtes un peu sceptique et vous vous demandez si ce genre de discours est fondé, s’il n’est pas un peu exagéré.

Certes, vous vous sentez concerné·e mais, pour vous, tous les insectes sont des « bestioles » et vous ne faites pas forcément la différence entre une abeille, un bourdon, un syrphe ou une cétoine. Vous vous demandez comment vous pourriez aider à déterminer s’il est vrai que les insectes disparaissent ; et si oui, pourquoi. Les programmes de science citoyenne pourront vous y aider. Mis en place à l’initiative des scientifiques professionnels, leurs protocoles sont adaptés au grand public : pas besoin d’être un expert pour être utile.

Si vous décidez, par exemple, de participer au SPIPOLL (Suivi photographique des insectes pollinisateurs), vous « traquerez » à l’aide de votre appareil photo toutes les « bestioles » approchant la fleur que vous aurez choisie d’observer ; une fois les photos prises, vous apprendrez à identifier les insectes à l’aide des documents téléchargés à partir du site Internet du SPIPOLL.

Abeilles, bourdons, syrphes et cétoines n’auront plus de secrets pour vous et vous aurez fait progresser les connaissances scientifiques à leur sujet. C’est bien là le double enjeu des sciences citoyennes : faire avancer la connaissance et les connaissances de tous.

 

Science amateure sans amateurisme

Vous voyez mal comment quelques photos de fleurs ou de crabes pourraient faire avancer la science ? C’est vrai. On ne fait rien en science avec une seule observation. Au mieux, c’est de l’anecdote. Au pire, c’est un biais. Mais des millions de photos, prises à des milliers d’endroits différents, pendant plusieurs années, voilà ce qui fait la différence !

Seule contrainte : les observations doivent être standardisées – c’est-à-dire toutes réalisées selon les mêmes critères de représentativité et de reproductibilité – pour être exploitables. C’est la partie « science » de ces initiatives citoyennes : les observations se font selon des protocoles précis mis en place par les scientifiques professionnels ; au moment de les rédiger, ces derniers ont en tête la manière dont les observations pourront être par la suite analysées.

C’est l’intérêt et le challenge des sciences citoyennes : cette impressionnante force de frappe qu’apportent les scientifiques amateurs, et la masse phénoménale de données qu’ils génèrent. Même si les experts professionnels sortent régulièrement de leurs laboratoires pour aller « sur le terrain », ils ne peuvent pas être partout à la fois.

Dans ces conditions, comment dès lors documenter la propagation du frelon asiatique en Europe ? Seul, c’est impossible, mais avec des milliers (des millions ?) de smartphones déployés en réseau sur tout le territoire, cela devient possible. Bien sûr, il faut ensuite pouvoir traiter les données analysées. C’est souvent là que le travail de citoyens scientifiques s’arrête, ce traitement requérant de solides compétences en statistiques. Mais des initiatives existent pour impliquer les citoyens également dans cette phase importante du travail scientifique.

Depuis plus de dix ans maintenant que les programmes de sciences citoyennes se développent, les scientifiques ont fait parlé les données et de nouvelles publications scientifiques basées sur ces approches paraissent très régulièrement. Le suivi des papillons de jour – initié par le Muséum d’histoire naturelle dans le cadre de l’Observatoire des papillons des jardins – a par exemple permis de montrer que « plus la surface d’un jardin est grande ou plus la diversité des plantes à fleurs est importante, plus l’abondance des pollinisateurs augmente ».

Les exemples illustrant l’apport des sciences citoyennes à la connaissance scientifique sont légion. Et il faut également souligner que les scientifiques amateurs progressent de leur côté, de récents travaux ayant montré qu’ils gagnent en expertise et en confiance grâce à ces pratiques. Une raison supplémentaire pour tenter l’aventure de la science citoyenne cet été, à la plage ou ailleurs.

Bastien Castagneyrol, Chercheur en écologie, Inrae

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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