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Nadia Belaidi, chercheuse CNRS à propos de la COP15 sur la biodiversité : « la COP15 sur la biodiversité a abordé des enjeux aussi importants que ceux de la COP27 sur le climat »

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Hippopotames au Botswana © Yann Arthus-Bertrand

La COP15 sur la biodiversité vient de s’achever avec un accord jugé historique qui prévoit notamment de protéger 30 % des surfaces terrestres et des océans. La chercheuse CNRS au laboratoire d’éco- anthropologie du Muséum National Histoire Nadia Belaidi était présente à Montréal pour suivre les négociations. Elle travaille notamment sur la création du droit et des règles au sein des communautés locales et des peuples indigènes ainsi que sur les aires protégées. Nadia Belaidi nous livre sa réaction sur la COP15 et le texte qui a vu le jour après deux semaines de négociations.

Nadia Belaidi
Nadia Belaidi Photo DR

Que retenez-vous de l’Accord de Kunming Montréal ?

L’accord est présenté comme historique, ce qui est vrai puisque la question de la biodiversité n’avait pas été traitée de cette manière-là depuis longtemps. Les négociateurs ont travaillé d’arrache-pied durant 4 ans pour obtenir cet accord, ce qui était loin d’être gagné. Le texte démontre une vraie volonté de se saisir du sujet de la biodiversité.

« La question de la biodiversité n’avait pas été traitée de cette manière-là depuis longtemps. »

Après, on a pu voir au cours de ces négociations que la compréhension et la prise en compte de la biodiversité n’est pas la même pour tous les partis/toutes les parties prenantes. Ce qui entraine des problèmes de compréhension. De plus, puisqu’il s’agit d’un accord international, la voix des États prime, cependant on a pu voir de véritables échanges sur la question des communautés locales et des populations autochtones. Elles ont été prises en compte elles ont un point de vue très structuré sur les questions de biodiversité.

[À voir aussi Comprendre l’accord de la COP15 sur la biodiversité en 2 minutes]

L’objectif de protéger 30 % de la surface terrestre semble la principale avancée du texte, sans atténuer l’importance de cet engagement, mais n’est-ce pas une manière de faire oublier que les autres objectifs de cet accord se montrent vagues ou peu contraignants ?

Il faut comprendre que les 30X30, le fait de protéger 30 % des surfaces terrestres et des océans d’ici 2030 est autant mis en avant car c’était l’enjeu principal de cette COP15 et le point de départ de nombreuses discussions connexes, comme certains moyens de mise en œuvre ou d’autres objectifs. Par exemple, les discussions sur le fonds pour la biodiversité en découlent.

« Plusieurs dimensions du texte font que des acteurs se mobiliseront pour le faire vivre en lui donnant des suites. »

L’accord n’est pas une convention, il n’a donc pas de force juridique contraignante. Il constitue un point de départ qu’il faudra ensuite transformer en outils contraignants grâce à de futures sans doute longues discussions. L’accord témoigne d’une prise de conscience, dans le cadre de la Convention sur la Diversité Biologique qui avait été créée dans un autre contexte.

[À lire aussi Le monde adopte un accord historique sur la biodiversité au terme de la COP15]

Justement, qu’est ce qui garantit que l’accord de la COP15 de la CBD ne soit pas juste des promesses en l’air ?

Ce texte constitue le point de départ d’un long travail à entreprendre. Plusieurs dimensions du texte font que des acteurs se mobiliseront pour le faire vivre en lui donnant des suites. J’ai de bons espoirs pour que ce cadre mondial ne reste pas lettre morte. Je travaille en effet sur les mobilisations des populations autochtones, ils ont pris part au processus et l’ont acté. Avec les grandes ONG de conservation de la nature, ils vont rebondir sur ce texte afin d’en faire quelque chose. De même, les pays en développement ne laisseront pas en friche le fonds mondial sur la biodiversité.

[À lire aussi Le point de vue de la Fondation GoodPlanet sur une COP27 qui, malgré une avancée historique, appelle à la vigilance]

Cette COP15 a peu mobilisé les médias et les décideurs, en témoigne l’absence des chefs d’États, la biodiversité demeure-t-elle un sujet trop négligé ?

La question de la biodiversité pâtit d’un déficit d’intérêt comparé au climat, qui est sans doute très médiatisée car ce dernier est plus vu en lien avec la transformation des modes de vie, de production et de consommation. C’est pourtant aussi le cas lorsqu’on on parle de biodiversité. La COP15 sur la biodiversité a abordé des enjeux aussi importants que ceux de la COP27 sur le climat. La 6e Extinction n’a pas l’air d’affoler, il en va pourtant et de la viabilité de la planète pour notre espèce. Il ne s’agit pas seulement de la préservation des espèces pour les espèces, qui est cruciale, mais aussi de la manière dont l’être humain s’inscrit dans les milieux et va pouvoir vivre une vie saine dans un environnement de qualité. Toute l’humanité est concernée, pas seulement les pays riches, car la biodiversité assure les conditions matérielles et spirituelles d’existence de tous les groupes humains.

[À lire aussi Le nouveau rapport de l’IPBES (le Giec de la biodiversité) remet en cause la vision purement économique de la nature]

« Il ne s’agit pas seulement de la préservation des espèces pour les espèces. »

 Ces enjeux sont peu médiatisés alors même que le climat et la biodiversité sont extrêmement liés. À la même période d’autres sommets sur des conventions liées à la biodiversité, comme la convention de Ramsar sur les zones humides ou la CITES sur le commerce des espèces sauvages ou encore celle abordant la question de la haute mer et les fonds marins n’ont pas fait l’objet d’une grande attention de la part des médias. Par exemple, l’IPBES reste pour le moment moins connue que le GIEC, alors que leurs missions sont équivalentes, l’un fournit une information scientifique sur la crise climatique, qui a été bien intégrée, l’autre sur la biodiversité.

[À lire aussi Le nouveau rapport de l’IPBES sur l’ampleur de l’exploitation des espèces sauvages par l’humanité et la nécessité de les préserver]

Ces dernières années, les rapports du GIEC et l’IPBES ont mis en avant le rôle des communautés locales et des peuples autochtones dans la préservation de l’environnement. Ils ont aussi eu plus voix au chapitre lors des COP, comment cela s’est-il traduit à la COP15 ?

La cible de protéger 30 % des terres émergés et des mers avait l’objectif de reposer et d’articuler différentes formes de conservation. Il y a d’abord les aires protégées, comme les parcs nationaux, il y a ce qu’on appelle les autres mesures de protection par zone. Les peuples autochtones demandent une reconnaissance de leur rôle de gardiens de la nature sur les territoires. Cette revendication vise à faire reconnaitre la contribution des peuples autochtones et des communautés locales dans la préservation et la conservation des territoires sur lesquels ils vivent. Néanmoins, le sujet a été une pierre d’achoppement des négociations en raison de la réticence des États à reconnaître des territoires autochtones. Finalement leur rôle est reconnu dans le cadre mondial et pas uniquement dans la cible 3 sur la préservation de 30 % du globe, leurs droits, connaissances et savoir faire sont reconnus dans d’autres cibles. Cela laisse augurer une prise en compte plus forte de leur contribution.

« Les peuples autochtones demandent une reconnaissance de leur rôle de gardiens de la nature sur les territoires. »

[À lire aussi Gardiens de la nature, les peuples autochtones porteurs d’espoir pour la biodiversité]

Avez-vous un dernier mot ?

On ne peut qu’espérer que le cadre mondial mis en place avec l’Accord de Kunming Montréal soit transformé en se basant sur la complémentarité entre les acteurs, les États, les entreprises, les ONG et les populations. Il faut aussi que la biodiversité soit prise en compte avec les autres problématiques environnementales. C’est indispensable pour envisager une protection globale de la nature pour ce qu’elle est.

Propos recueillis par Julien Leprovost

Article édité le 21 décembre à 9h10 pour corriger des fautes de langue dans le texte ainsi qu’une erreur signalée en commentaire sur la légende de la photo principale.

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5 commentaires

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    • Jocelyne Bourgeois

    Sauf que sur la photo ce ne sont pas des éléphants mais des hippopotames…. 😅

      • Julien

      Bonjour.
      Bien vu, merci, c’est en effet rectifié.

      Bien à vous

      la rédaction

    • Balendard

    Le jugement qui va être porté début 2023 par la justice française à propos de Total en Afrique sera révélateur de la vision des chaînes énergétiques que l’homme va décidez d’adopter pour satisfaire ses besoins en énergie

    • anne

    SI PERSONNE CONNAIT l ‘ IPBES (le Giec de la biodiversité ).
    La convention de Ramsar sur les zones humides .
    La CITES sur le commerce des espèces sauvages et sur la protection de la haute mer et les fond marins ;
    Cela concerne et intéresse tout le monde .
    LES MEDIAS ( je veux tous les médias je ne parle pas de goodplanet ) FAITE VOTRE BOULOT !!!!
    merci de faire votre maximum pour informer les gens;
    Ont compte sur vous ;

    • anne

    SI PERSONNE CONNAIT LE IPBES( le Giec de la biodiversité ).
    La convention de Ramsar sur les zones humides .
    La CITES sur le commerce des espèces sauvages , la question de la haute mer et des fonds marin ;
    LES MEDIAS FAITE VOTRE TRAVAIL ( touts les médias pas que goodplanet)
    il faut informer les gens .
    ont compte sur vous .