Paris (AFP) – Deuxième volet du triptyque énergie, le projet de loi d’accélération du nucléaire qui vise à favoriser la construction de nouveaux réacteurs entame mardi son parcours parlementaire au Sénat, où il devrait être porté par des vents favorables.
Ce texte technique de la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher doit permettre de concrétiser la relance d’une politique nucléaire « ambitieuse et durable » amorcée par Emmanuel Macron.
Un objectif partagé par la quasi-totalité des sénateurs, majoritairement de droite, à l’exception des écologistes.
Le président de la République a annoncé son intention de construire six nouveaux réacteurs et souhaité que soient lancées les études pour la construction de huit autres.
Le projet de loi vise à « gagner du temps » – jusqu’à 56 mois espérés – en simplifiant les procédures administratives pour la construction de nouvelles installations à proximité de sites nucléaires existants.
Cela pour une durée limitée à 15 ans dans le texte initial, portée à 20 ans par les sénateurs en commission.
Concrètement, les sites seront dispensés d’autorisation d’urbanisme car le contrôle de conformité sera assuré par l’Etat. Le droit d’expropriation sera assoupli.
Ou encore les travaux sur les bâtiments non destinés à recevoir des substances radioactives pourront être engagés avant clôture de l’enquête publique.
Les deux prochains EPR devraient être implantés à Penly (Seine-Maritime), suivis de deux autres à Gravelines (Nord), selon les plans d’EDF.
« L’objectif de la première coulée de béton, qui est très ambitieux, c’est d’ici la fin du quinquennat, donc 2027 (…) plutôt fin 2027 », a indiqué Mme Pannier-Runacher lors de son audition par les sénateurs. Quant à la mise en service, elle a avancé « 2035-37 ».
Verrous
« On est très en retard sur le nucléaire », déplore la présidente LR de la commission des Affaires économiques Sophie Primas.
Pour le rapporteur Daniel Gremillet (LR), ce texte « est nécessaire si on veut (…) avoir une énergie suffisante à un prix accessible et décarbonée, et une énergie pilotable ».
Les sénateurs regrettent cependant que les textes leur soient soumis « à l’envers ». Pour eux, c’est le projet de loi de programmation énergétique, fixant les trajectoires de la France dans chaque énergie, qui aurait dû arriver en premier, avant les deux textes techniques sur les renouvelables et le nucléaire. La ministre « espère » qu’il pourra être présenté en juin.
Le rapporteur a souhaité « combler les angles morts du texte, qui pâtit, d’un manque de vision stratégique ».
Les sénateurs veulent ainsi faire sauter des « verrous » préexistants en supprimant notamment l’objectif de réduction à 50% de la part du nucléaire dans la production d’électricité d’ici 2035, et en imposant la révision du décret qui prévoit la fermeture de 12 réacteurs, en plus de Fessenheim.
La France, qui tire du nucléaire environ 70% de son électricité, avait décidé en 2015 de diversifier son approvisionnement en fermant 14 de ses 58 réacteurs, avant un revirement annoncé par le président.
Les sénateurs ont en outre adopté une série d’amendements sur « deux axes majeurs: simplifier et sécuriser ». Il s’agit en particulier d’intégrer les risques liés au changement climatique dans la démonstration de sûreté des réacteurs et la cyber-résilience dans leur protection contre les actes de malveillance.
Gouvernement et majorité sénatoriale vont quand même trouver sur leur chemin les sénateurs écologistes, pour qui « ce nouveau nucléaire va à contresens de l’histoire », selon leur chef de file Daniel Salmon.
Les écologistes défendront une motion de rejet d’emblée du texte, qui met selon eux les parlementaires devant le « fait accompli », alors qu’un débat public sur la construction de nouveaux réacteurs nucléaires n’est pas terminé.
« Ce texte ne préempte en aucun cas les décisions qui seraient prises sur l’avenir du mix énergétique français ou sur la construction du programme EPR2 », assure-t-on au ministère.
Un vote solennel sera organisé le mardi 24 janvier dans l’hémicycle du Sénat, puis le projet de loi ira à l’Assemblée nationale.
© AFP
A lire aussi
Nucléaire: autorisation demandée pour le centre d’enfouissement à Bure
Peut-on être écologiste et pro-nucléaire ?
Nucléaire en France : un peu, beaucoup, passionnément, à la folie… ?
2 commentaires
Ecrire un commentaire
Serge Rochain
La double erreur.
1) Macron choisi le cul de sac du nucléaire dont la durée de vie est limitée à une cinquantaine d’années avec la disponibilité de l’uranium, mais qu’il faudrait faire durer jusqu’en 2090 au moins pour l’amorti.
2) Macron veut aujourd’hui se précipiter dans son erreur pour gagner quelques mois après avoir perdu 5 ans pour n’avoir rien fait en 2017.
Serge Rochain
Balendard
Vous avez malheureusement parfaitement raison monsieur Rochain
http://www.infoenergie.eu/riv+ener/essentiel.pdf