Whitby (Royaume-Uni) (AFP) – Ballotés par les remous artificiels dans de grandes cuves de plastique blanc, les minuscules homards sont à l’abri des prédateurs. Dans quelques semaines, ils quitteront le petit hangar du port anglais de Whitby pour le large, dans le cadre d’un projet pour préserver la ressource.
Situé dans le nord-est de l’Angleterre, Whitby est le troisième port européen pour la pêche du homard: 100.000 de ces crustacés y sont débarqués chaque année et le secteur fait vivre 150 personnes localement. Joe Redfern, qui dirige la Whitby Lobster Hatchery, espère à terme en relâcher autant chaque année.
« On veut que l’environnement marin soit protégé et que les populations de homards soient préservées pour l’avenir », explique à l’AFP ce diplômé de biologie de 31 ans, qui a lui-même été pêcheur.
Dans les années 1990, il y avait une trentaine de gros bateaux de pêche à Whitby, raconte Joe Redfern. Mais en 2005, « il n’y en avait plus qu’un ».
Les navires ont dû suivre le poisson et se déplacer vers les ports écossais de Peterhead et Aberdeen, plus au nord, explique à l’AFP Jonathan Parkin, un pêcheur de 43 ans, « les gars qui n’ont pas voulu partir ont dû se reconvertir dans les crustacés ».
« Ramener l’espoir »
En témoignent les empilements de casiers sur les quais du port, dominé sur les hauteurs par l’abbaye de la ville, un monastère bénédictin qui a inspiré à la fin du XIXe siècle l’Irlandais Bram Stoker, auteur de Dracula.
Les pêcheurs ont également été frappés par une mortalité massive de crustacés en 2021 et 2022, dont l’origine n’est pas clairement identifiée, mais qui selon un rapport officiel pourrait avoir été causée par un nouveau pathogène présent dans l’eau de mer.
Les locaux, aidés par des universitaires, penchent quant à eux pour une toxine qui serait libérée par les sédiments, selon Joe Redfern. Les expertises réalisées à la demande des autorités ont jugé « très improbable » un telle hypothèse.
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Si la conception du projet, qui a commencé il y a deux ans, a débuté avant cette hécatombe, Joe Redfern espère que son écloserie puisse contribuer à « ramener l’espoir » chez les pêcheurs et « montrer qu’on peut faire quelque chose pour commencer à reconstruire ».
Le projet consiste à prélever en mer, grâce à des dérogations spéciales, des homards femelles portant des milliers d’oeufs, afin qu’ils puissent éclore en sécurité.
Cannibalisme
Pour les larves, les fonds marins sont un univers impitoyable: le taux de survie chez les homards est d’un sur 20.000, soit 0,005%. En les laissant grandir dans un univers protégé, l’écloserie augmente de manière inespérée leurs chances, espérant atteindre un taux de 20 à 30%.
De cuve en cuve au fil de leur développement, ils sont nourris, choyés, et séparés dans des bacs spéciaux au stade où ils risquent de se dévorer entre eux. Au bout de deux à trois mois, ils seront prêts pour la mer.
« Evidemment quand on va les relâcher, ils ne vont pas tous survivre, mais on les aura protégés quand ils sont au stade de larve », le plus périlleux, explique Joe Redfern.
Le projet a nécessité de collecter plus de 100.000 livres sterling (113.000 euros) pour commencer, explique-t-il. Il propose même sur son site de parrainer un homard et de le suivre jusqu’à sa réintroduction en mer.
L’idée de recourir au processus, déjà mis en oeuvre par exemple en Cornouailles (sud-ouest), est issue de la communauté des pêcheurs de Whitby. Il s’agit selon Joe Redfern de « voir ce qu’on peut faire pour redonner quelque chose aux océans » en protégeant la ressource naturelle et le moyen de subsistance des pêcheurs.
« C’est immensément, immensément important », explique le pêcheur Jonathan Parkin, impliqué dans le projet. « On relâche des prochaines générations futures de homards pour les prochaines générations de pêcheurs ».
© AFP
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Pascal ROGER
de mémoire, un projet de même nature à été réalisé il y a 30 ans avec succès pour la langouste et baie de Quiberon, associée à des récifs artificiels pour la réintroduction en milieu marin. Il serait intéressant de faire le point sur cette expérience.
Plus largement, ne pourrait-on pas étendre ce principe d’écloserie à diverses catégories de poissons ?