Angoisse d’un printemps à sec pour les agriculteurs des Pyrénées-Orientales

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Des vergers de nectarines à Corbère-les-Cabanes, dans les Pyrénées-Orientales, le 20 mars 2023 © AFP/Archives RAYMOND ROIG

Corbère-les-Cabanes (France) (AFP) – Au pied des Pyrénées, les champs de pêchers de la plaine du Roussillon sont tout en fleurs rosées, image idyllique cachant une réalité alarmante: l’absence quasi totale de pluies qui, cette année, met l’agriculture en péril.

« On est en pleine floraison et dès que l’arbre se met à fonctionner, les feuilles poussent, il commence à y avoir des besoins en eau et c’est là qu’il faut commencer à irriguer », explique David Massot, en parcourant un des vergers de son exploitation de 200 hectares (pêches, nectarines et abricots).

Mais le problème, c’est que le manque d’eau dans la Têt, comme dans le Tech et l’Agly, les deux autres fleuves de la plaine du Roussillon (Pyrénées-Orientales), empêche d’alimenter le vaste réseau de canaux indispensable à l’arrosage des cultures.

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« Si on n’irrigue pas suffisamment, on peut perdre totalement la récolte », s’inquiète cet agriculteur.

Même les deux barrages des Bouillouses et de Vinça sur la Têt, censés permettre de sécuriser la ressource en eau, n’y suffisent pas.

« C’est une situation très inquiétante parce qu’on a des nappes à un niveau globalement très bas, des cours d’eau très bas et un niveau de remplissage de nos barrages qui est au plus bas aussi », résume Jean Bertrand, référent eau à la chambre d’agriculture.

La tension monte

Depuis octobre, le département n’a enregistré que 159,4 mm de précipitations, un déficit de 60,8% par rapport à la normale, selon Météo-France. Et cet épisode de sécheresse « est le plus long et le plus intense depuis le démarrage des suivis de l’humidité des sols (…) en 1959 », selon la préfecture.

Sur tout le territoire, la tension grandit avec l’inquiétude. « S’il n’y a pas de pluie, je ne vois pas comment les choses pourraient bien se passer dans les semaines à venir », alerte Sandrine Jaffard à la direction de l’Union des canaux d’Ille-et-Corbère, réseau en aval du barrage de Vinça.

Pour elle, ce ne sont pas seulement les fruits et légumes de cette année qui sont en danger, mais la survie des cultures.

« S’il n’y a pas de production, mais qu’on arrive à sauver les cultures pérennes et les arbres, on s’en sortira pas mal », déclare-t-elle à l’AFP.

« On est en alerte renforcée. On essaie de faire tous azimuts des économies d’eau pour justement protéger l’eau potable et l’eau pour les productions agricoles nourricières », insiste Nicolas Garcia, maire PC d’Elne et président du Syndicat des nappes de la plaine du Roussillon. Pour « marquer les esprits », il a provisoirement interdit la construction de piscines sur sa commune.

Face à l’urgence, la préfecture appelle à une mobilisation générale afin d' »éviter de prendre des décisions trop brutales ».

Avec la tension, les rivalités s’exacerbent. Les agriculteurs reprochent aux écologistes d’avoir fait imposer par la voie judiciaire une hausse du débit réservé à la biodiversité dans la Têt, ce qui empêche l’utilisation du fleuve pour l’irrigation en-deçà d’un certain niveau.

 « Débit de survie »

« Bien sûr, il y a l’environnement », admet David Massot, « mais en année exceptionnelle, tout le monde doit faire des efforts même le milieu. Il y a des débits de survie et des débits de confort. Quand on est dans des situations comme ça, il faut aller vers le débit de survie. »

Les écologistes entendent « continuer à préconiser le maintien des débits biologiques », doutant que les principaux producteurs agricoles locaux fassent « évoluer leurs pratiques ». « Ils veulent être prioritaires et ne sont pas prêts à une réorientation de leur activité », déplore Marc Maillet, responsable d’une association locale membre de France Nature Environnement.

Y a-t-il une voie médiane ? André Trives, petit maraîcher sur deux hectares à Elne, veut le croire.

Déçu que l’on « montre du doigt les agriculteurs » et conscient des contraintes économiques pesant sur les gros producteurs, il plaide néanmoins pour un autre fonctionnement, fondé sur une « régénération des sols » pour « redonner le gîte et le couvert » aux champignons, vers de terre et micro-organismes.

La terre devient « une super éponge », dit-il, affirmant: « aujourd’hui, j’ai besoin d’eau, mais beaucoup moins que mes confrères ».

Ainsi, malgré la sécheresse, il a bon espoir que sa production de courgettes, aubergines, poivrons, tomates se maintienne, « peut-être seulement avec une petite baisse de rendement ».

© AFP

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