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En Guadeloupe, la défaillance de l’assainissement devient une problématique majeure


Une source naturelle à Trois-Rivières au sud de la Guadeloupe, le 26 juillet 2018. © AFP/Archives Cedrick Isham CALVADOS

Pointe-à-Pitre (AFP) – La Guadeloupe est connue pour ses problèmes d’accès à l’eau, mais le manque et la vétusté des infrastructures touche aussi le réseau d’assainissement causant des problèmes de santé publique et mettant en danger le tourisme quand des plages sont interdites à la baignade.

« Les réseaux sont en si mauvais état que les eaux usées et potables se mélangent », affirme même Sabrina Cajoly, juriste et défenseure des droits humains en Guadeloupe, très engagée sur cette question de l’eau. « Le 2 juin, le Comité des droits de l’enfant à l’ONU, a exhorté la France à garantir de toute urgence le droit humain à l’eau potable et à l’assainissement en Guadeloupe », raconte-t-elle.

Le jour même de l’arrivée en Guadeloupe de la secrétaire d’Etat à l’écologie Bérangère Couillard, mercredi, en visite dans l’archipel notamment pour assurer le « SAV du plan Eau-Dom », selon son entourage, une nouvelle zone était interdite à la baignade, une rivière dans le nord de Basse-Terre.

Selon une cartographie datée de 2021 de l’Office Français de la Biodiversité (OFB), sur les 17 stations d’épuration de la Guadeloupe, notamment les plus importantes qui couvrent chacune plus de 2.000 habitants, « 12 sont non conformes », a indiqué une agente de l’OFB. Principalement pour des raisons du défaut d’autosurveillance qui incombe aux collectivités en charge de la gestion de ces stations.

En début d’année, le directeur de l’Office de l’Eau de Guadeloupe, confiait à la presse avoir « fait un état des lieux en 2021 qui a montré qu’environ 80% des systèmes d’assainissement en Guadeloupe étaient défectueux, qu’on parle de collectif ou non collectif ».

« Bombe à retardement »

Localement les acteurs et observateurs de la question ont pris l’habitude de qualifier la situation de « bombe à retardement ».

En octobre 2022, un rapport du Conseil économique, social et environnemental (Cese) alertait « sur la pollution des eaux du littoral qui risquent d’être de plus en plus souvent interdites à la baignade ».

Or, depuis plusieurs mois, les interdictions de baignade du fait de la présence de la bactérie Escherichia Coli se multiplient. Et elles touchent aussi les rivières: tout récemment, l’une d’elle a concerné la cascade aux Ecrevisses et sa rivière, haut lieu touristique de l’archipel.

Si l’impact touristique de ces interdictions n’est pas encore mesuré, celui des pollutions à long terme est déjà là.

« L’ensemble des stations au droit du rejet (station à 50 m du rejet) présentent un état général de santé écologique moyen à mauvais (note de 3 à 5/5) », décrivait ainsi en 2020, un rapport de l’Office de l’eau, sur l' »état des lieux des principaux rejets urbains en mer ».

« Cette dégradation se traduit par une prolifération des macro-algues, un envasement des stations, notamment sur les herbiers, le développement de phanérogames (plantes aquatiques, NDLR) invasives, de maladies coralliennes et une fréquence élevée de nécroses coralliennes », écrivaient les auteurs du rapport.

Dans son plan d’action annoncé en début d’année, le Syndicat mixte de gestion de l’eau et de l’assainissement de la Guadeloupe (SMGEAG) avait prévu pour 2023 quelque 25 millions d’euros, destinés à l’assainissement, pour engager une amélioration. Mais celle-ci prendra de sources concordantes « de nombreuses années et des centaines de millions d’euros ».

Chez de nombreux particuliers, la suspicion concernant la qualité de l’eau potable est forte: d’une part car les interdictions de consommer l’eau du robinet sont régulières sur plusieurs communes, mais aussi, car des épisodes de contamination de l’eau potable aux matière fécales ont eu lieu dans le passé.

Une plainte, portée par une centaine de plaignants, a d’ailleurs été déposée au tribunal de Pointe-à-Pitre en début d’année, pour « délit d’exposition d’autrui à un risque immédiat de mort ».

Des solutions sont à l’étude: une expérimentation caribéenne, nommée Caribsan, tente la phyto-épuration.

Les premiers résultats assurent que les « filtres végétaux ont prouvé leur efficacité en Martinique, en Guadeloupe et sont en cours de réalisation dans trois autres pays partenaires: Cuba, la Dominique et Sainte-Lucie », qui connaissent, elles aussi, des graves problèmes d’assainissement.

© AFP

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