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Les recommandations du naturaliste Grégoire Loïs pour profiter des vacances estivales pour aller à la découverte de la biodiversité en Île-de-France

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Un chevreuil en forêt © chevreuil Julien Birard/ARB îdF

Grégoire Loïs est naturaliste au sein de l’Agence Régionale de la Biodiversité en Île-de-France.  Cette dernière propose d’ailleurs sur son site Internet une sélection de balades nature. Dans cette interview de notre série À la rencontre du vivant, l’ornithologue Grégoire Loïs prodigue quelques conseils pour profiter de l’été pour mieux connaître et observer les traces de la biodiversité dans la région parisienne. Le fait qu’elle soit l’une des plus urbanisées du pays n’empêche cependant pas d’y trouver de nombreux sites remarquables pour observer le vivant. Même si on ne peut pas forcément quitter Paris cet été, les occasions ne manquent pas pour se reconnecter avec la nature.

Comment profiter des vacances estivales pour découvrir, ou faire découvrir aux enfants, la biodiversité en Ile-de-France ?

L’Ile-de-France est certes une région très grise et urbanisée en son centre, mais il faut savoir que les trois-quarts de ce territoire ne sont pas urbanisés. De plus, 24 % de la surface de la région est occupée par des forêts. La région est traversée de cours d’eau et de vallées qui, à la faveur de la déprise de l’élevage entre la Première et la Seconde guerre mondiale se sont assez reboisées. C’est sur ces reliefs accidentés que les 4 parcs naturels régionaux sont installés. Ils disposent d’infrastructures pour observer la biodiversité. Certains sites sont des véritables joyaux méconnus comme le marais de Maincourt dans le parc naturel régional de la vallée de la Chevreuse. On peut y observer libellules et papillons. Les insectes ont l’avantage d’être actifs le jour.

« Les trois-quarts de ce territoire ne sont pas urbanisés. »

Je tiens à rappeler que, avec les chaleurs estivales, se promener en forêt est très agréable et sympa car elle agit comme un énorme climatiseur. La région abrite 3 forêts royales : Fontainebleau, Rambouillet et Compiègne, qui elle est à cheval sur la région et les Hauts-de-France.

[À lire aussi L’être humain s’éloigne (spatialement) de plus en plus de la nature et Le chercheur en conservation de la biodiversité Victor Cazalis : « vivre des expériences de nature se révèle déterminant dans la façon dont on va concevoir la nature et les problématiques environnementales »]

Quelles sont les spécificités de ces forêts ?

Ce sont d’anciens domaines royaux dédiés à la chasse, ce qui leur a permis à ces bois de ne pas être rasés pour devenir des terres agricoles. En effet, il ne faut pas oublier que pendant longtemps en France, on a aussi déforesté pour cultiver plus. Il y a toutefois  aujourd’hui plus de surfaces de forêts en France qu’au XVIe siècle.

La forêt de Fontainebleau © ARB îdF/ Franchard Zucca

« Ces forêts franciliennes sont aujourd’hui bien desservies par les transports en commun »

Ces forêts franciliennes sont aujourd’hui bien desservies par les transports en commun, ce qui permet d’y randonner en évitant les bouchons. Elles sont magnifiques et abritent d’importantes populations de cervidés. Cela peut être l’occasion d’aller sur les traces des grands mammifères herbivores : le cerf, le chevreuil et le sanglier. Ces 3 espèces sont encore bien présentes dans les forêts franciliennes. En revanche, leur observation directe est peu probable. Mais, les animaux laissent de nombreuses traces de leur présence qu’on peut déceler.

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Qu’est-il possible d’observer lors d’une sortie dans l’une de ces forêts ?

On peut voir les bauges, ces flaques de gadoue dans lesquelles les sangliers se roulent et qu’ils entretiennent. On peut aussi remarquer que les jeunes arbres sont écorcés et leurs feuilles broutées par les chevreuils. Il y a bien évidement les traces des sabots des animaux sauvages sur le sol humide qui se reconnaissent avec leurs deux ongles au bout, ce qui les distingue des empreintes laissées par le sabot des chevaux. Le sanglier va laisser deux ongles plus derrière, les empreintes de ses ergots. L’empreinte du sanglier se compose donc de la forme de deux ongles courbés devant et derrière deux petits points de part et d’autre de la trace. Le cert et la biche laissent une trace plus longue. Le chevreuil, quant à lui, laisse une trace plus petite, délicate et gracieuse. L’observation directe de ces animaux est difficile car ils sont farouches et plutôt nocturnes. Les traces ont l’avantage d’être tout le temps là.

empreinte sanglier
L’empreinte d’un blaireau © Thierry Roy

De plus, en été, la végétation offre des paysages magnifiques avec de la bruyère ou de la fougère aigle. La forêt de Fontainebleau et la forêt de Rambouillet sont sur des affleurements gréseux et des lentilles de sable quaternaires avec des pins sylvestres, un paysage et les odeurs rappellent les forêts des Landes.

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Parmi les espèces dont vous avez parlées précédemment, laquelle possède des caractéristiques étonnantes ?

Il y a une libellule aux ailes bleues métalliques très foncées qu’on trouve souvent le long des cours d’eau, on la confond souvent avec un papillon. Même si son vol s’avère papillonnant, c’est une demoiselle de la famille des caloptéryx. Les mâles ont les ailes bleues tandis que les femelles ont des ailes vertes métalliques avec des zones fumées rousses. Il faut savoir que les mâles se montrent très territoriaux, ils montent la garde de façon visible et défendent leurs 4 ou 5 mètres de berge. Ce sont de jolis insectes qu’on peut facilement voir, y compris en bord de Seine et dans Paris.

 

Avez-vous un conseil pour les personnes qui voudraient faire de l’observation ?

 Je conseille de trouver des fleurs de la famille des ombellifères et des apiacées comme le cerfeuil, de la carotte, du panais, de la ciguë car elles offrent un spectacle fascinant pour peu qu’on prenne le temps d’observer. En quelques minutes, il est possible de regarder les insectes qui viennent les polliniser et les araignées qui les chassent. On peut aisément y voir le clairon des abeilles, un petit coléoptère rouge ou les araignées misumena aux couleurs vives jaune, rose et violet. On peut aussi contempler les abeilles solitaires. Bref, s’arrêter quelques instants devant ces plantes qu’on trouve en lisière des forêts où elles forment des plateformes verdâtres, jaunâtres ou blanchâtres, c’est être comme dans un documentaire. Ces plantes constituent de véritables aérodromes à insectes.

« Bref, s’arrêter quelques instants devant ces plantes qu’on trouve en lisière des forêts, c’est être comme dans un documentaire. »

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Avez-vous un souvenir marquant d’une rencontre avec la biodiversité en Ile-de-France ?

Je suis du sud-ouest de l’Ile-de-France, je passe donc beaucoup de temps en forêt de Rambouillet. Un des spectacles les plus marquants que j’ai vu est un village de blaireaux. C’est une espèce assez sociale où les familles se regroupent. Chaque famille occupe durant une dizaine d’années un terrier et un village en regroupe plusieurs. Ils terrassent les terriers, ils remanient sans cesse leur habitat et forment des cônes avec leurs déjections. Si on a la chance de rester le soir immobile et sans un bruit à une cinquantaine de mètres du village, on voit alors les blaireaux, qui ressemblent à des min-ours, sortir. Le spectacle se révèle incroyable. J’y ai amené mes enfants et mes petits-enfants, mais cela requiert de rester à l’affut, très discret, car le blaireau, en plus de se montrer farouche, possède une très bonne ouïe et un très bon odorat.

Avez-vous un autre conseil autre que les sorties nature ?

Côté lecture, je ne peux que recommander la lecture du journal La Hulotte dont chaque numéro thématique aborde avec précision et humour une plante ou un animal répandu. La Hulotte est accessible de 7 à 77 ans tout en étant d’une rare exactitude en biologie.

[À lire aussi La Hulotte, « journal le plus lu dans les terriers », fête son 100e numéro]

Sinon, pour une visite, j’ai découvert récemment le Domine de Villorceau dans le Val-d’Oise. C’est un lieu paisible où on est à la fois dans la nature et au cœur de l’Histoire.

Avez-vous un dernier mot ?

Profitez de cette région qui est finalement assez mal connue en termes de nature alors qu’elle contient des micro-joyaux dans lesquels on se sent loin de Paris et hors du temps.

Propos recueillis par Julien Leprovost

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Pour aller plus loin

La page du site de l’Agence Régionale de la Biodiversité en Île-de-France qui propose des idées d’activités en lien avec la nature

La Fondation GoodPlanet propose aussi une exposition gratuite ouverte à tous pour aller à la rencontre du vivant jusqu’à la fin 2023 À la rencontre du vivant, la nouvelle exposition ouverte à tous, à découvrir jusqu’au 17 décembre 2023 à la Fondation GoodPlanet

Pour aller plus loin sur GoodPlanet Mag’

La recommandation de Julien : non loin de Paris, un tour à vélo dans le Val d’Oise

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