Valensole (France) (AFP) – Le blanc immaculé de la robe de mariée contraste avec les étendues mauves à perte de vue: dans les champs de lavande du plateau de Valensole, en Provence, les touristes affluent pour se photographier au milieu d’une culture qui souffre du réchauffement.
« C’est un très beau lieu, parfait pour nos photos de mariage que nous n’avions pas pu faire car c’était durant le Covid », explique Wen Chang, Taïwanaise de 33 ans.
La jeune femme et son compagnon belge ont voulu immortaliser leur union passée par quelques clichés dans un décor provençal, après avoir découvert dans un guide de voyage ce lieu niché au sud des Alpes-de-Haute-Provence, coincé entre les parcs naturels du Luberon et du Verdon.
Après quelques minutes cependant, et alors que les températures en cette fin juillet dépassent quotidiennement les 30 degrés, le couple retourne dans sa voiture, climatisée, garée le long de la route.
Ce ballet d’automobiles ou de bus se reproduit plusieurs centaines de fois par jour dans ce coin rural, difficilement accessible et généralement paisible… hors période de floraison de la « Lavandula », de fin juin à fin juillet.
Pour visiter les lieux, nombreux sont les touristes s’inspirant d’Instagram où les hashtags « lavande », « plateau de Valensole » ou « Provence » fleurissent et comptent plusieurs dizaines de milliers d’occurrences vantant une destination idyllique.
« C’est tellement instagrammable les champs de lavande qu’on en tire profit », s’exclame Jean Frédéric Gonthier, directeur de l’Office de tourisme de l’agglomération Durance-Luberon-Verdon.
Manque de pluie
Avec 26.000 visiteurs lors de la Fête de la lavande organisée à Valensole le 17 juillet, un record, il se félicite « du retour d’une clientèle étrangère », notamment d’Américains et d’Asiatiques » et d’une fréquentation qui grandit chaque année ».
« Nous ne sommes pas contre les touristes, ça ne dure que trois semaines. Si c’était toute l’année, on devrait prendre des mesures », abonde Jean-Pierre Jaubert, 67 ans, producteur de lavande et fier d’appartenir à une famille d’agriculteurs « depuis 300 ans ».
Plus que la surfréquentation du site, il s’inquiète que ce décor de carte postale ne soit bouleversé en raison du changement climatique et des épisodes de sécheresse désormais récurrents.
« Il y a des années, le plateau était bleu et maintenant beaucoup moins. Autant la chaleur, on y est habitué mais ce qu’on remarque c’est le manque de pluie. Avant, c’était une fois par mois, désormais parfois il ne pleut pas pendant trois mois! », s’alarme-t-il.
Plus que sur la production, qui reste stable, cela se ressent sur « le rendement de la lavande: maintenant on arrache les pieds au bout de huit-neuf ans, avant c’était 20 ans parfois ».
Depuis 2020, il n’utilise pratiquement que des engrais biologiques et assure voir une amélioration de son rendement.
« Ca coûte plus cher et prend plus de temps mais quand il fait sec, la plante supporte mieux avec le fumier ou les restes de bouchons. La vie microbienne réapparait aussi. Sur le long terme, c’est plus bénéfique », explique l’agriculteur qui n’utilise plus de glyphosate, herbicide controversé et classé comme « cancérigène probable » par l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
La saison 2023 s’annonce meilleure cependant pour les producteurs de lavande, aidés par un printemps relativement pluvieux.
Avec une surface de 13.101 hectares de lavande et lavandin (un hybride naturel issu d’un croisement entre deux espèces sauvages de lavande) plantés, les Alpes-de-Haute-Provence devancent la Drôme et le Vaucluse dans la culture de cette fleur, selon le Comité interprofessionnel des huiles essentielles françaises (CIHEF).
La France était en 2022 leader mondial en production d’huile essentielle de lavandin (1.700 tonnes) et seconde, derrière la Bulgarie, pour l’huile essentielle de lavande (120 tonnes).
© AFP
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