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Au secours de la mangrove, dernier rempart écologique de la Guadeloupe

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Vue aérienne de la mangrove, près de Morne-à-l'eau, le 18 avril 2023 en Guadeloupe © AFP Olivier MORIN

Morne-à-l’Eau (France) (AFP) – Longtemps délaissées, les mangroves de l’île française de la Guadeloupe, reviennent lentement au centre du débat grâce à la mobilisation des défenseurs de la nature mais aussi une prise de conscience de la population et des autorités, qui réalisent son rôle indispensable face au dérèglement climatique et à la perte de biodiversité.

Ces zones naturelles qui poussent à la lisière entre les mondes terrestre et marin jouent un rôle essentiel pour la majorité des autres écosystèmes. « Sans mangroves, on n’a pas de coraux et on n’a pas d’herbiers marins, et inversement. Et c’est la même chose avec la partie terrestre: les mangroves ont aussi des liens avec les rivières, les mares », explique Angeline Lollia, membre du Pôle-relais zones humides tropicales de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) en Guadeloupe.

Pourtant partout dans le monde, ces espaces, dont l’importance est célébrée chaque année depuis 2015 à l’occasion de la journée internationale des mangroves le 26 juillet, figurent parmi les plus menacés. Plus de 35% ont disparu en 20 ans, indiquait un rapport en 2019.

La Guadeloupe, qui regroupe les mangroves les plus vastes des petites Antilles, ne fait pas exception à la règle.

« On a à peu près 3.000 hectares de mangroves », certaines dans des parcs nationaux, donc bien préservées, mais d’autres grignotées par l’urbanisation, « voire détruites pour construire dessus », note Mme Lollia.

Mais le problème n’est pas tant la quantité que la qualité car « une mangrove dégradée ne peut plus remplir correctement ses fonctions », explique-t-elle.

Nurserie et barrière

Les menaces qui pèsent sur la mangrove sont nombreuses et presque toutes liées à l’homme, avec l’urbanisation et l’agriculture.

La pollution représente un grand danger. La mangrove, par sa végétation dense et ses racines enchevêtrées qui plongent dans la mer, récupère énormément de déchets.

Les végétaux, elle s’en accommode car elle peut les décomposer, mais « une mangrove ne peut pas décomposer une machine à laver, un pneu ou un sac plastique », explique Mme Lollia.

En Guadeloupe s’est ajoutée une composante culturelle, selon elle: divers « mythes et légendes » hérités de croyances ancestrales l’ont longtemps assimilée à une zone peu fréquentable voire dangereuse, conduisant à la délaisser voire à la détruire pour s’en prémunir.

Mais depuis le début des années 2000, cette perception évolue.

« La population a pris conscience de l’importance des mangroves », notamment de son « rôle de barrière » face aux cyclones, explique-t-elle.

Mais la mangrove ce n’est pas que ça. Elle rend de nombreux services: protection des côtes contre la houle et l’érosion, purification de l’eau, nurserie pour les poissons, habitat essentiel pour l’avifaune et les crustacés…

Elle va également permettre « d’abattre les inondations », ce qui est « un incroyable service (…) nettement plus efficace qu’une digue », souligne Médhy Broussillon, délégué adjoint Outre-mer du Conservatoire du littoral.

Restauration

Comme les forêts, les mangroves ont « cette capacité à stocker du carbone »: « elles captent nos émissions de gaz à effet de serre et nous permettent finalement d’atténuer l’impact du changement climatique », ajoute-t-il.

La Guadeloupe comme nombre d’îles est d’ailleurs particulièrement vulnérable aux conséquences du dérèglement du climat, notamment les risques de submersion. La partie la plus peuplée de son territoire, autour de Pointe-à-Pitre, est à moins de 80 cm au-dessus de la mer. « On s’attend à ce que la submersion y soit chronique et répétée en 2030 et jusqu’à 180 jours par an en 2060 », notait en 2022 Virginie Duvat, une des autrices du Giec.

Face à ces menaces, les initiatives se multiplient pour tenter de sauver voire de reconstruire les mangroves guadeloupéennes.

Exemple emblématique: l’initiative « Ja-Riv », contraction de « rivage » et de Jarry, territoire au centre de l’île devenue la troisième plus grande zone industrielle de France au détriment de la forêt humide. Depuis 2016, sa mission est de récupérer les terrains occupés par des usines pour les rendre à la nature. Quatre hectares de mangrove ont déjà été restaurés.

« Face au dérèglement climatique, toutes les solutions sont bonnes à prendre », souligne Bruno de Gasquet, directeur du concessionnaire auto « Cama Premium », participant à l’opération. Et la mangrove « c’est une des meilleures », souligne-t-il.

© AFP

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