La pollution aux produits chimiques, comme les crèmes solaires, les pesticides ou les hydrocarbures menace les récifs coralliens en Guadeloupe, Martinique, à la Réunion et à Mayotte. C’est ce qui ressort d’une évaluation conduite par l’Office Français de la Biodiversité (OFB) et l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail). Cet avis, consultable en ligne, fait 192 pages. Selon un communiqué de cette dernière, « la moitié des substances évaluées peut présenter des risques pour les récifs coralliens et contribuer à leur dégradation ». Cette menace s’ajoute aux répercussions du dérèglement climatique sur les coraux puisqu’une hausse de le température moyenne à la surface du globe de 2°C et de la fréquence des cyclones risquent d’entraîner leur disparition.
La France abrite 10 % des surfaces de coraux du monde. C’est le seul pays au monde à en posséder dans les 3 océans (Océan Atlantique, Océan Indien et Océan Pacifique). Les coraux sont un élément vital des écosystèmes et de la faune marine. Ils abritent plus de 100 000 espèces marines (mollusques, crustacés, éponges, poissons, raies, tortues, requins…). Or, dans le monde, 1 cinquième des coraux ont déjà disparu.
L’OFB et l’Anses ont ainsi recensé les produits chimiques présents dans l’eau de mer en Guadeloupe, Martinique, à la Réunion et à Mayotte. Leur « expertise montre que la moitié des substances chimiques évaluées peuvent entraîner des risques pour les récifs coralliens », toute en reconnaissant que le nombre de substance toxique est sans doute sous-évalué. Cette pollution marine par les filtres anti-UV, les pesticides, les métaux lourdes, les hydrocarbures, les détergents, les microplastiques et les pesticides regroupe des substances encore déversées dans les eaux et d’autres substance, malgré leur interdiction, demeurent toujours présentes dans l’océan. En faire l’inventaire doit permettre de mieux agir pour préserver et protéger les coraux en prenant ensuite des mesures pour réduire les sources de contamination.
Les crèmes solaires sont incriminées. Bien que les fabricants doivent entreprendre des efforts, la preuve de l’innocuité de leurs produits n’est pas toujours faite. Trois molécules qu’elles contiennent sont jugées nocives pour les récifs coraliens. L’Anses écrit qu’elle « a notamment identifié trois substances comme toxiques pour les coraux : l’oxybenzone, l’octinoxate et l’octocrylène. Un certain nombre de produits solaires apposent des mentions ou des pictogrammes mettant en avant leur respect du milieu marin. Ces marquages doivent être soutenus par des études menées sous la responsabilité des fabricants qui les vendent. La présence d’une des substances mentionnées ci-dessus semble incompatible avec la possibilité de bénéficier de telles allégations. »
« Pour réaliser ce travail, nous nous sommes appuyés sur une étude de l’Office français de la biodiversité et de PatriNat (OFB-MNHN-CNRS-IRD) qui recense des substances chimiques susceptibles d’avoir des effets toxiques sur les coraux. Nous avons ensuite croisé les seuils de danger applicables aux coraux pour ces substances aux niveaux de concentration observés dans l’environnement. Cela nous a permis d’identifier les substances à risque pour les coraux situés en Guadeloupe, Martinique, à Mayotte et à la Réunion », explique Karen Burga, coordinatrice de ces travaux.
Les scientifiques manquent de données sur les substances présentes dans les eaux des territoires d’Outre-Mer. « Au fur à mesure qu’on avançait dans la récupération des données d’exposition, nous avons constaté des différences marquantes sur le niveau d’informations disponibles pour chaque territoire ultra-marin étudié (à savoir tous les territoires d’Outre-mer exceptés la Guyane et Saint-Pierre-et-Miquelon). La plupart des informations provenaient des systèmes de surveillance générés par la mise en œuvre de la Directive Cadre sur l’Eau. Or, ces systèmes de surveillance n’existent pas pour certains territoires comme Wallis et Futuna ou encore Saint-Barthélemy, ce qui empêche aujourd’hui de réaliser l’évaluation des risques des substances incriminées » précise Karen Burga.
L’Anses recommande donc de réduire les pollutions dans le milieu marin, ce qui passe d’abord par un renforcement et un contrôle des substances présentes dans l’eau, un meilleur assainissement des eaux usées. L’Anse préconise aussi de « limiter les rejets de substances dangereuses à la source par des mesures de gestion : application de restrictions d’utilisation ou d’interdiction de mise sur le marché de produits chimiques dans le cadre des réglementations telles que REACH. »
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