Emmanuel Macron a présenté lundi les grands axes de sa « planification » pour une écologie « souveraine », « compétitive » et « juste », promettant de « reprendre le contrôle » sur le prix de l’électricité face aux oppositions qui l’accusent de laisser la facture exploser.
Après avoir vanté dimanche à la télévision une « écologie à la française », « qui n’est ni le déni », « ni la cure qui consiste à dire +ça va être un massacre+ », le chef de l’Etat a peaufiné sa vision au terme d’une réunion ministérielle à l’Elysée pour adopter son plan de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Pour tenir les objectifs, une baisse de 55% à l’horizon 2030 par rapport à 1990, il faut « aller deux fois plus vite », a-t-il réaffirmé, alors que le recul des émissions de son premier quinquennat a été aidée par le ralentissement économique causé par le Covid.
Il a notamment évoqué une enveloppe immédiate de 700 millions d’euros pour bâtir 13 RER métropolitains. Ces projets coûteront 10 milliards, a-t-il précisé.
Alors qu’il avait confirmé la veille renoncer à bannir les chaudières à gaz pour ne pas laisser les zones rurales « sans solutions », il a aussi fixé l’objectif de produire « un million de pompes à chaleur » par an dans le pays d’ici 2027, soit le triple du niveau actuel.
Surtout, il a abordé un point politiquement très sensible en cette rentrée dominée par l’inflation: le prix de l’électricité.
Deux fois plus vite ?
En octobre, il annoncera une reprise « du contrôle », pour avoir des prix « qui vont donner de la visibilité à la fois aux ménages et à nos industriels » tout en étant compétitifs au niveau européen. La méthode sera « déclinée rapidement dans une loi sur l’énergie », a précisé l’Elysée.
Et en novembre seront ouvertes les pré-réservations pour le leasing de voitures électriques à 100 euros par mois, qui démarrera avec seulement quelques dizaines de milliers de véhicules en 2024 pour laisser le temps à la filière européenne de monter en puissance face aux modèles chinois.
Le patron des socialistes Olivier Faure a dénoncé sur X un plan « ficelé à la va-vite », déplorant l’absence de « solutions de financement pérennes et socialement justes ».
« Nous sommes globalement déçus », a déclaré à l’AFP la député écologiste Eva Sas, fustigeant un « président qui continue à dire +j’aime la bagnole+ » au lieu d’ordonner un « moratoire sur les projets routiers ».
« Il n’y a pas vraiment d’annonces nouvelles et même parfois des annonces en trompe-l’oeil, comme la sortie du charbon » en 2027, « initialement prévue en 2022 », a regretté Andreas Rüdinger, spécialiste énergie de l’IDDRI. Il déplore une « vision productiviste de l’écologie », sans échéance sur la nécessaire « sortie des énergies fossiles dans le chauffage et les transports ».
Point d’orgue
Dans son discours, Emmanuel Macron a tenté de rendre lisible sa stratégie: selon lui, la planification écologique doit s’inscrire dans la réindustrialisation de la France, par le verdissement et notamment l’électrification des transports et de l’industrie, et servir l’objectif de souveraineté pour réduire les dépendances aux importations.
Parallèlement, cette écologie doit être « accessible et juste », a plaidé le président, assurant vouloir « accompagner à la fois les territoires et les personnes qui sont les plus fragiles ». Dans le logement, au-delà de « Ma Prime Renov », il a assuré que « les ménages les plus modestes, mais aussi les familles moyennes » seraient « mieux accompagnés ».
« C’est un bon signal qu’Emmanuel Macron parle enfin d’écologie juste », a réagi Anne Bringault, du Réseau Action Climat (RAC). « Mais il faudra du concret, comme un reste à charge à 0 € » sur la rénovation pour les ménages modestes et l’application du « principe pollueur-payeur avec une fiscalité sur le transport aérien (…) pour financer le train ».
Au niveau européen, le président a laissé entendre qu’il souhaitait que les dépenses pour la transition écologique ne soient pas prises en compte dans le déficit et la dette.
Selon son entourage, cette présentation était le point d’orgue de la séquence lancée entre les deux tours de la présidentielle, quand il avait promis que sa future Première ministre serait « directement chargée de la planification écologique » afin d’aller « deux fois plus vite » pour tenir les objectifs climatiques.
Le second quinquennat « sera écologique ou ne sera pas », avait lancé celui dont le premier mandat avait déçu les défenseurs de l’environnement et qui devait rallier les électeurs de gauche face à Marine Le Pen.
Elisabeth Borne a ensuite orchestré les travaux qui ont permis d’identifier les efforts nécessaires, secteur par secteur. Sept milliards d’euros supplémentaires seront alloués à la transition écologique pour 2024, portant à 40 milliards les dépenses de l’Etat pour le climat et l’environnement.
Emmanuel Macron a bien évoqué une programmation pluriannuelle, mais sans avancer de chiffres.
« Nous attendions un moment de vérité, le président s’est contenté de donner un calendrier », a déploré Jean Burkard, du WWF France, réclamant de « décourager les SUV », « remettre la protection de la biodiversité au coeur » de nos choix agricoles et rétablir les puits de carbone.
© AFP
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