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Le Néerlandais Hoekstra, désigné « M. Climat » de l’UE, tente de convaincre les eurodéputés

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Wopke Hoekstra lors d'une audition au cours d'une session plénière au Parlement européen à Strasbourg, le 2 octobre 2023 © AFP/Archives FREDERICK FLORIN

Bruxelles (AFP) – Le Néerlandais Wopke Hoekstra, désigné au portefeuille du Climat à la Commission européenne mais dont l’expérience dans le secteur pétrolier suscite l’inquiétude, a tenté de convaincre lundi les eurodéputés de lui accorder leur feu vert, à deux mois de la COP28.

Objectif climatique 2040, fin des subventions aux carburants fossiles, nouveau train de législations vertes… Ce chrétien-démocrate de 48 ans s’est efforcé de donner des gages aux membres de la commission Environnement du Parlement européen, lors d’une audition longue de trois heures.

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Mais signe de ses difficultés à désarmer ses détracteurs, les élus de la commission ont repoussé à mardi leur décision sur cette nomination.

Ministre des Finances puis des Affaires étrangères dans son pays, M. Hoekstra a été désigné par les Pays-Bas pour remplacer Frans Timmermans, l’architecte du « Pacte vert » européen qui a quitté Bruxelles pour participer aux élections néerlandaises de l’automne.

A l’heure où les législations environnementales provoquent des résistances croissantes, la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, lui a attribué la responsabilité du climat, confiant la coordination du « Pacte vert » à son vice-président, le Slovaque Maros Sefcovic.

Mais les deux doivent être confirmés dans leurs nouvelles fonctions par un vote des eurodéputés réunis à Strasbourg, que la Commission est tenue de prendre en compte même s’il n’est formellement que consultatif.

La procédure n’a rien d’une formalité, tant le profil de Wopke Hoekstra suscite la controverse, en raison de son passage de deux ans chez le géant pétrolier Shell, suivi d’une carrière dans le cabinet de conseil McKinsey — profil suscitant un tollé chez les ONG écologistes et l’embarras de la gauche parlementaire.

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« M. Hoekstra s’est aligné étroitement dans le passé sur la défense des combustibles fossiles », s’étaient insurgées une cinquantaine d’ONG, dont Greenpeace et Friends of the Earth, rappelant son opposition comme ministre à l’arrêt rapide d’un gisement gazier et le soutien accordé sans condition à la compagnie Air France-KLM.

« A regarder votre CV, vous n’avez pas vraiment été un +champion du climat+, c’est un euphémisme », a abondé l’eurodéputé Vert Bas Eickhout devant l’intéressé.

Wopke Hoekstra a défendu son bilan ministériel, évoquant le lancement d’obligations vertes, et promis « la continuité » dans l’action climatique de l’UE, dont il entend « augmenter l’ambition » –tout « en tendant la main » aux industriels et agriculteurs.

« Je veux conclure rapidement toutes les négociations » en cours sur les textes du Pacte vert, dont certains (restauration de la nature, pesticides…) font l’objet d’une franche opposition de son propre camp, « et j’entends poser les bases d’un +Pacte vert 2.0+ », a-t-il assuré, dans son introduction prononcée en quatre langues.

« Enorme absurdité »

L’ex-salarié de Shell a fustigé les subventions accordées par les Etats aux combustibles fossiles.

« Cela doit appartenir au passé. Certaines majors pétrolières ont cherché à cacher leur rôle dans le changement climatique, c’est vraiment non-éthique, cela ne fait qu’accroître leur responsabilité », a-t-il affirmé, jugeant l’absence de taxe sur le kérosène aérien « une énorme absurdité ».

Très attendu sur l’objectif 2040 de réductions d’émissions de gaz à effet de serre de l’UE, sur lequel Bruxelles doit communiquer en début d’année prochaine, M. Hoekstra s’est engagé à suivre l’avis du Conseil consultatif scientifique européen, se disant partisan d' »utiliser tous les instruments permettant d’atteindre le minimum recommandé d’une baisse nette de 90% » par rapport à 1990.

Le Néerlandais a aussi tenté de solder un vieux contentieux: en 2020, alors ministre des Finances, il avait suggéré d’enquêter sur les difficultés budgétaires de certains pays européens face au Covid-19, suscitant l’ire des pays du Sud. « J’ai le sentiment que j’aurai dû agir différemment », a-t-il reconnu.

« Belles promesses »

Enfin, en vue de la COP28 où il représenterait l’UE, Wopke Hoekstra a expliqué vouloir « forger une alliance mondiale » sur le financement des pertes et dommages et promis de « travailler inlassablement pour obtenir » un succès à Dubaï.

Le PPE (droite), qui avait déjà annoncé ouvertement soutenir M. Hoekstra, a sans surprise salué ses réponses, notamment son soutien affiché aux PME.

En revanche, des élus de gauche se montraient circonspects. « De belles promesses (…) Il est maître du double-langage quand aucun acte n’est proposé pour accompagner ses promesses supposément vertes », a déploré Marie Toussaint (Verts). « Malheureusement, rien de concret! », a abondé le socialiste Mohammed Chahim.

Les coordinateurs de la commission Environnement, initialement censés se prononcer lundi soir, ont finalement repoussé leur décision à mardi après-midi, après l’audition le matin de Maros Sefcovic, a indiqué Pascal Canfin, président (Renew, libéraux) de la commission.

Les élus peuvent exiger de Wopke Hoekstra de nouvelles réponses écrites à leurs questions, ce qui repousserait toute décision à une prochaine session plénière du Parlement.

© AFP

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