Washington (AFP) – Qu’est-ce qui fait une bonne ou mauvaise année pour le vin? La question taraude non seulement les producteurs, mais aussi les scientifiques, qui tentent depuis longtemps d’y répondre en observant de près les conditions météo.
Une nouvelle étude publiée mercredi dans la revue iScience s’est penchée sur la question avec un nouveau degré de détail, et lance un pavé dans la mare en avançant que le changement climatique pourrait contribuer partiellement et jusqu’à un certain point à l’amélioration de la qualité du vin.
En analysant les évaluations des vins de Bordeaux par des critiques sur plusieurs décennies, l’étude montre que les bonnes années sont caractérisées par de forts écarts de températures, une température moyenne plus élevée, et une saison précoce et courte.
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Or le changement climatique doit rendre ces conditions de plus en plus fréquentes. L’étude conclut donc qu’à mesure que la planète se réchauffe, la qualité du vin pourrait continuer à augmenter, jusqu’à une certaine limite.
« Je ne pense pas que le changement climatique soit une bonne chose », prévient ainsi Andrew Wood, auteur principal de l’étude.
En effet, le réchauffement génère dans le même temps de nombreux problèmes pour les vignes, notamment l’augmentation d' »événements extrêmes », dit-il à l’AFP.
Par exemple, le risque accru d’incendie est évidemment une menace. Le bourgeonnement précoce rend en outre les vignes plus vulnérables face à la grêle ou le gel au printemps.
Et même si les bonnes années sont caractérisées par un été sec et chaud, une sécheresse trop prononcée peut se révéler dévastatrice. Lorsqu’un certain seuil est atteint, les raisins peuvent aller jusqu’à « tomber des vignes », souligne-t-il.
Mais lorsque les vignes survivent, alors les chances de météo favorables à un bon vin sur l’année devraient se multiplier — du moins pour l’instant.
« Il se pourrait que nous soyons très proches du moment » où le vin « arrête de devenir meilleur, et commence à être bien pire », nuance le chercheur à l’Université d’Oxford. « Nous ne savons simplement pas où se trouve le seuil. »
Pour le moment, en analysant les notes attribuées au vignoble bordelais entre 1950 et 2020, les chercheurs ont observé une tendance à une amélioration de la qualité du vin.
Il s’agit ici des notes données notamment par les marchands de vin à l’ensemble du vignoble bordelais chaque année, au niveau régional.
L’amélioration observée est liée à une augmentation du nombre d’années présentant ces conditions favorables plus récemment, selon les auteurs, qui reconnaissent que les avancées technologiques ont toutefois aussi pu jouer.
L’augmentation des températures conduit à une photosynthèse accrue, et donc davantage de sucre, pour un taux d’alcool plus élevé, soit à des vins « plus forts ».
Ces vins « vieillissent plus longtemps, et vous donnent des saveurs plus riches et intenses, davantage de sucre et moins d’acidité », commente Andrew Wood.
De précédentes études avaient depuis longtemps identifié l’effet bénéfique d’hivers pluvieux et de températures élevées en été.
Mais les chercheurs ont ici montré que les autres saisons jouent également un rôle important: un printemps humide et chaud, et un automne sec et frais, sont aussi associés à des vins mieux notés.
Pour aller dans ce niveau de précision, ils se sont penchés sur les notes attribuées par des critiques après la dégustation individuelle de vins d’Appellations d’origine contrôlée (AOC), et les ont comparé à la météo très localement.
Selon le chercheur cette « recette » météo pourrait s’appliquer à d’autres régions du monde. Mais il rappelle qu’il ne s’agit pas là d’un prétexte pour céder à l’ivresse.
« Le problème, dans les scénarios où il se met à faire très chaud, c’est l’eau. Si les plantes n’en ont pas assez, elles dépérissent », explique-t-il. « Le consensus, est que les vins continueront à s’améliorer, jusqu’au moment où elles dépériront. »
© AFP
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