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La lycorma delicatula, un insecte invasif qui menace les cultures américaines

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Des specimens de lycorma delicatula, insecte originaire d'Asie, sur un tronc d'arbre, dans un parc de New York, le 26 septembre 2022 © Getty/AFP/Archives Michael M. Santiago

New York (AFP) – Au premier regard, la lycorma delicatula ressemble à un beau papillon tacheté et zébré de noir, blanc et rouge. Mais cet insecte originaire d’Asie s’attaque à la flore et aux cultures des Etats-Unis, où les autorités s’activent pour endiguer sa propagation.

« Une bonne lycorma est une lycorma morte », lance sans ambages à l’AFP Amy Korman, entomologiste de l’école des sciences agricoles de l’université d’Etat de Pennsylvanie.

La Lycorma delicatula (ou fulgore tacheté) a été repérée en 2014 aux Etats-Unis, dans le comté côtier de Berks en Pennsylvanie, arrivée deux ans plus tôt à bord d’une cargaison de pierres provenant d’Asie, d’après les scientifiques ayant remonté sa trace.

Elle ne menace pas les humains ni les animaux mais elle a causé des centaines de millions de dollars de dégâts au secteur agricole, alors qu’elle ne s’est propagée à ce stade que dans une quinzaine d’Etats de l’est des Etats-Unis.

Une étude de l’université de Pennsylvanie estimait en 2020 un coût annuel de 554 millions de dollars et la perte de près de 5.000 emplois par an pour ce seul Etat, qui n’a pas réussi à circonscrire l’insecte malgré quarantaines et moult mobilisations.

La « lycorma est une très bonne auto-stoppeuse », souligne Mme Korman, au sujet de cet insecte qui bondit plus qu’il ne vole malgré ses ailes spectaculaires et qui s’agrippe facilement.

« C’est un insecte très sournois. C’est grâce à nous qu’il se répand. C’est nous qui l’emmenons à travers le pays, notamment ses oeufs », explique-t-elle.

Les oeufs — de 30 à 50 grains de riz brunâtre alignés — sont pondus sur des surfaces planes (troncs, pierres, voitures) et ont « survécu à des hivers très rigoureux ».

A l’âge adulte, la lycorma aspire à l’aide d’une trompe la sève des végétaux qui se retrouvent ainsi privés de cette substance nutritive cruciale. Lorsque plusieurs spécimens s’alimentent sur la même plante, celle-ci périclite.

 Friand de raisins

Cet insecte à l’abdomen mesurant 25 mm de longueur par 15 mm de largeur se nourrit sur plus de 70 espèces de plantes ornementales, d’arbres fruitiers, à coques et d’exploitations forestières. Il a une appétence particulière pour les vignes.

Les scientifiques ont constaté des essaims de dizaines, voire de centaines, d’individus sur un seul cep.

Des vignobles de Pennsylvanie et du Maryland ont perdu la moitié de leur production, entre la mort des plantes et le rendement moindre de celles ayant survécu à la curée.

« Nous avons perdu un millier de pieds de vigne », raconte à l’AFP Michael Fiore, propriétaire d’un vignoble du Maryland, au nord-est de Washington, envahi en 2022.

« Elles ont sucé toute l’énergie, elles sont comme des vampires », s’effare-t-il, confiant s’attendre à perdre encore la moitié de sa récolte cette année. « 2022 était mauvais, 2023 l’est tout autant ».

« Cela va prendre du temps de reconstituer les vignes », confie-t-il.

La flore est aussi affectée par les déjections de l’insecte, un miellat provoquant une moisissure appelée fumagine et qui, quand il recouvre les feuilles, empêche la photosynthèse.

Plusieurs Etats ont missionné des scientifiques pour tenter de trouver un moyen d’éradication, une véritable course contre la montre car des modélisations prévoient son arrivée sur la côte Ouest vers 2027-2030.

D’immenses vignobles réputés se trouvent en Californie, sans parler de ses amandiers, ou encore des vergers de l’Oregon, plus au nord. Le Canada s’inquiète aussi.

L’industrie viticole californienne génère 170,5 milliards de dollars pour l’économie américaine et emploie 1,1 million de personnes, selon le Wine Institute, son organisme de représentation.

Le ministère américain de l’Agriculture a dévoilé en juin une stratégie à cinq ans pour étudier et combattre la lycorma.

« Nous n’arrivons pas à comprendre » son comportement, regrette Matthew Travis, chargé de la lutte contre les « SLF » –« spotted lanternflies », en anglais– au ministère. « C’est un véritable défi pour nous ».

« Nous ignorons encore beaucoup de choses, notamment concernant les changements de population d’une année sur l’autre et leur répartition », souligne-t-il, indiquant que des visites d’étude ont été menées en Asie « mais ils n’ont jamais vu les gros phénomènes que nous subissons ».

Cela complique l’estimation des conséquences financières sur le long terme.

Sur le terrain, des habitants organisent des patrouilles pour les tuer — peu mobiles, elles sont assez faciles à écraser du pied mais leur taille rend la chose assez peu ragoûtante.

Le comté de Westchester, près de New York, utilise des chiens renifleurs pour les oeufs et de puissants aspirateurs façon « SOS Fantômes » pour les nymphes et les adultes.

Certains empoisonnent la sève de l’ailante glanduleux, un arbre invasif également originaire d’Asie très apprécié de la lycorma, qui n’a pas de réel prédateur sur le continent américain.

© AFP

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