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En Jordanie, sauver les oliviers millénaires

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Ali Saleh Atta dans son oliveraie du nord-ouest de la Jordanie, le 25 septembre 2023 © AFP Khalil MAZRAAWI

Adjlun (Jordanie) (AFP) – Ali Saleh Atta se réveille chaque jour à l’aube, avale deux gousses d’ail avec une tasse d’huile d’olive pour rester en bonne santé, avant de se rendre auprès de ses arbres millénaires qu’il entretient jalousement dans son oliveraie du nord-ouest de la Jordanie.

« Ces arbres représentent l’histoire de la Jordanie », affirme l’homme de 84 ans, debout parmi des arbres vieux de 2.000 ans, dont les troncs énormes et noueux portent des branches aux délicates feuilles vert pâle.

Le terrain est à Al-Hashimiyya, à 73 kilomètres au nord-est d’Amman, où l’on trouve des milliers d’autres arbres pérennes.

« J’ai remis à mes enfants et petits-enfants un testament écrit, leur demandant de préserver et consommer ce que produisent » ces arbres « après ma mort », raconte ce père de dix enfants.

Selon le Conseil oléicole international, la Jordanie est le dixième plus grand producteur d’olives au monde. Ses nombreux arbres millénaires font partie intégrante de l’identité et de la culture du pays.

Mais aujourd’hui, les oliviers sont menacés par l’expansion urbaine, l’abattage illégal pour le bois de chauffage et l’arrachage pour la décoration.

« Certains hôtels, villas, hommes d’affaires et entreprises aiment apporter une touche à la décoration de leurs établissements, alors ils achètent ce genre d’arbres et les transportent », déplore Nizar Haddad, directeur général du Centre national de recherche agricole en Jordanie, soulignant que les oliviers ne survivent souvent pas au déplacement.

 « Trésor national »

« Une nouvelle législation jordanienne protège ces arbres contre l’arrachage ou le déplacement », se félicite-t-il, faisant état d’une « coordination entre le ministère de l’Intérieur, notre centre et la police pour empêcher leur transport, sauf dans des cas très exceptionnels ».

La Jordanie compte onze millions d’oliviers, soit 20% de la totalité de la surface cultivée du pays.

Ils produisent 50.000 tonnes d’olives et 25.000 tonnes d’huile d’olive par an, contribuant à hauteur de 120 millions de dinars jordaniens (157 millions d’euros) à l’économie.

Dans la région, cet arbre est chargé en symboles, souligne M. Haddad, évoquant notamment des épisodes de la vie de Jésus-Christ liés au mont des Oliviers, selon la tradition chrétienne. L’olivier est aussi plusieurs fois cité dans le Coran comme un « arbre béni », dit-il.

« Il faut préserver ces arbres pour qu’ils restent une source d’inspiration, d’autant plus qu’ils peuvent s’adapter à tous les défis environnementaux auxquels notre région et le monde entier sont confrontés ».

Amer Gharaibeh, chef de la Société coopérative Mehras, veut que ces arbres, communément appelés Romains ou Mehras, soient préservés comme un « trésor national ».

En Jordanie, « vous pouvez voir les plus vieux oliviers… Ils sont là depuis l’époque romaine », a-t-il déclaré.

Des recherches ont montré que le Mehras a un ancêtre commun avec les oliviers cultivés en Italie, à Chypre et en Espagne.

Au côté du ministère de la Culture de la Jordanie, l’organisation de Gharaibeh oeuvre pour inscrire les arbres au patrimoine culturel immatériel de l’Unesco, ce qui « contribuera finalement à les préserver et les protéger ».

La Jordanie cherche à sensibiliser le public en plaçant un code QR sur chaque bouteille d’huile d’olive qu’elle produit.

Selon M. Haddad, dont l’organisation travaille sur le projet, le code précise l’emplacement de l’arbre, le nom de son propriétaire, son histoire, la qualité de l’huile et l’âge de l’arbre.

« Nous ne vendrons pas seulement de l’huile d’olive, mais nous diffuserons une histoire à travers laquelle nous faisons aussi connaître notre pays ».

En Jordanie, la tradition veut que chaque maison ait son olivier.

« Il n’y a pas une maison à Irbid, Salt, Ajloun, Jerash ou Tafila qui n’ait pas un olivier dans son jardin… Nous avons été élevés dans cette culture ».

© AFP

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