Les rapaces ont longtemps souffert d’une mauvaise image qui a conduit à leur quasi-disparition en France. Ils jouent pourtant un rôle vital dans la bonne santé des écosystèmes, nettoyant ces derniers des restes et des cadavres des animaux morts. Nous vous proposons ici un article de l’association L’hirondelle aux champs qui explique de quelle manière les exploitants agricoles peuvent aider au maintien des populations de rapaces nécrophages en installant des placettes où disposer les dépouilles d’animaux d’élevage morts. L’association L’hirondelle aux champs travaille dans la Drôme pour favoriser le retour de la faune sauvage dans les fermes et les exploitations.
Nous l’avons énoncé au cours de ce dossier (à lire dans le numéro 10 de la Gazette de ‘l’hirondelle aux champs), les vautours et les milans, en tant qu’équarrisseurs naturels nous rendent de grands services. De nombreuses études ont calculé la rentabilité de ces services, sur les plans économique et écologique. Elles ont estimé une économie de l’ordre de plusieurs centaines de milliers d’euros par an à l’échelle de la France.
À titre d’exemple, dans les Baronnies provençales et dans le Vercors, c’est plus de 200 tonnes de carcasses d’animaux domestiques qui sont éliminées par les vautours en moyenne au cours d’une année.
La conservation et la préservation des vautours et des rapaces nécrophages comme les milans noir et royaux est donc un enjeu majeur. De plus, ces services rendus ne peuvent être possibles qu’en présence suffisante de vautours et de rapaces nécrophages sur le territoire. Oiseaux qui par ailleurs sont devenus intimement liés à nos pratiques agricoles, notamment pour leur alimentation. En effet, l’évolution des réglementations sanitaires (interdiction de laisser les animaux morts sur place) et par là même, la diminution des ressources alimentaires disponibles pour les vautours, ont fait chuter leurs populations. Ces rapaces qui par ailleurs ont été sujets à une destruction en masse par le poison et le fusil avant leur protection en 1976.
Pour que ces rapaces nécrophages élisent à nouveau domicile dans nos paysages, les carcasses doivent être facilement disponibles et le territoire accueillant pour qu’ils s’y installent et prospèrent, de même pour les milans
La mise en place de placettes d’alimentation, où les cadavres sont mis à disposition de ces équarrisseurs à plumes est primordiale. Ici, il ne s’agit pas de nourrir les vautours avec les animaux destinés à la consommation, mais bien de rendre disponibles les carcasses issues des élevages. Les cadavres des animaux morts sur la route peuvent également y être déposés. Chaque année, c’est environ 1 500 cadavres de brebis, chèvres et sangliers ou chevreuils morts sur la route qui y sont collectés (sans compter les placettes individuelles). La faune sauvage accidentée représente 1 % des animaux récupérés.
Ces placettes d’alimentation ou sites d’équarrissage naturels participent à la survie, au succès de la reproduction des oiseaux, et, à terme, favorisent l’expansion des différentes espèces de rapaces nécrophages. Il s’agit de sites dédiés au dépôt des carcasses et autres déchets organiques issus principalement des élevages et qui ont été validés par les autorités sanitaires. Les sites peuvent être gérés par une structure dédiée, qui assure la collecte des cadavres dans les différents élevages de la région, mais des placettes individuelles directement chez l’éleveur ou l’éleveuse existent également, ce qui permet aux agriculteurs de déposer rapidement les bêtes : un gain de temps, d’énergie et d’argent.
L’installation et l’entretien d’une placette d’équarrissage naturel sont des processus suivis et contrôlés par les responsables régionaux des vautours, afin de respecter les règles sanitaires en vigueur. Les placettes sont destinées principalement aux vautours fauves, moines et percnoptères, et sont également utilisées par les corbeaux et milans. Le gypaète peut venir à la fin d’une curée, mais sera rarement présent (un seul couple nicheur en Drôme et seuls quelques individus présents). Les milans royaux et l’aigle royal sont également observés sur ces placettes.
Installer une placette d’équarrissage sur une exploitation ou à domicile
Dans les Baronnies provençales, plusieurs éleveurs et éleveuses ont déjà sauté le pas et travaillent de concert avec les vautours. Douze placettes individuelles (petites placettes d’équarrissage mises en place directement à la ferme ou à proximité) fonctionnent déjà à plein régime.
La création d’une placette nécessite l’expertise d’une structure responsable du suivi et de la réintroduction des vautours autour de chez vous. En Drôme, c’est l’association Vautours en Baronnies ou le Parc Naturel Régional du Vercors qui en sont chargés.
Les dossiers sont évalués par la DDPP (Direction Départementale de la Protection des populations) ainsi que par l’ARS (Agence Régionale de Santé) qui, respectivement, s’occupent de la cohérence du dossier, de la sécurité sanitaire pour le captage de l’eau et des visites réglementaires.
Plusieurs critères sont à remplir :
- la zone ne doit comporter aucun danger pour les vautours (pas de routes, de lignes de transport électrique, à proximité)
- la zone choisie doit être située loin des sentiers très fréquentés et être accessible en véhicule pour l’éleveur
- la zone présente une faible valeur agricole
- le terrain choisi doit de préférence appartenir au propriétaire de l’élevage
La placette en elle-même nécessite très peu d’aménagement.
Il faut une zone d’environ 150 à 200 m² de périmètre grillagé, avec un grillage de 1,5 m de haut et une dalle en béton de 2 m² est obligatoire pour déposer la carcasse.
A noter que même si l’agriculteur possède une placette, il faut payer 1/3 de la taxe annuelle d’équarrissage. En cas de gros dégâts sur le troupeau (incendie ou inondation par exemple), il n’est pas possible de placer une trop grosse quantité de carcasses sur la placette et il faut faire appel à une société d’équarrissage.
Cohabitation et Installer une placette d’équarrissage à domicile par l’association L’hirondelle aux champs
par Leïla Benichou et Léa Da Cruz.
Extrait du numéro 10 de la Gazette de l’hirondelle aux champs consacrée aux rapaces nécrophage et à l’agriculture
À lire aussi
20 sur 20 pour le gypaète dans le Mercantour
Jean-Marc Landry : « comprendre le loup réel et adapter les mesures de protection »
Découvrez la Gazette de l’association l’Hirondelle aux champs !
3 commentaires
Ecrire un commentaire
ouragan
Ne pas oublier quand même qu’il existe de nombreuses vidéos montrant des vautours attaquants des brebis vivantes ou des génisses en train de mettre bas.
Alors bien sur cela va faire crier les adorateurs des vautours mais la réalité est que cela arrive.
Dan
A Ouragan qui a commenté :
Si la nourriture habituelle est disponible les attaques sur les animaux vivant en bonne santé sont extrêmement rares.
Francis
Il faut préciser que des animaux d’élevage morts après avoir été soignés avec des médicaments ne doivent jamais être mis à la disposition des charognards sauvages.