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Espagne : la Catalogne scrute le ciel après trois ans de sécheresse

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Un ancien quai près du réservoir d'eau, dans la province de Gérone en Catalogne, avec en toile de fond l'église de Sant Roma de Sau church, le 15 janvier 2024 © AFP LLUIS GENE

Vallirana (Espagne) (AFP) – Confrontés à une sécheresse historique, la pire jamais enregistrée dans cette région du nord-est de l’Espagne, les habitants de la Catalogne se préparent à d’importantes restrictions d’eau, en attendant des pluies qui ne viennent pas.

« Cela fait trois ans que nous avons des pluies en dessous de la moyenne. La situation est devenue critique », affirme Eva Martínez, maire socialiste de Vallirana, un gros bourg de 16.000 habitants situé à une demi-heure de route de Barcelone, la capitale de la Catalogne.

« Avant, la commune recevait environ 600, 700, 800 litres de précipitations par mètre carré par an. L’an dernier, on n’a pas atteint 300 litres », ajoute l’édile de 47 ans.

Signe de l’intensité de la sécheresse, les villages abandonnés de la région engloutis lors de la construction de barrages au 20e siècle ont émergé de l’eau ces derniers mois.

Si le niveau des réservoirs tombe en dessous de 16%, ce qui semble imminent, les autorités n’auront pas d’autre choix que de décréter l’état d’urgence.

Les cinq millions d’habitants de Barcelone et de son agglomération pourraient alors être parmi les plus touchés, avec une pression d’eau réduite dans leurs maisons et une consommation limitée à 160 litres par jour et par personne, contre 200 actuellement.

À Vallirana, certains quartiers n’ont déjà plus d’eau. « On ne peut pas faire la vaisselle, laver le linge, on ne peut pas utiliser les machines à laver… ni même faire pipi », se lamente Alex Fonseca, un habitant de Vallirana venu remplir plusieurs bidons depuis un camion-citerne pour couvrir ses besoins domestiques.

Dans ce bourg, le manque de précipitations a asséché plusieurs puits ou transformé l’eau en boue, et de nombreux quartiers, comme celui de M. Fonseca, n’ont donc plus d’eau potable.

« Vivre comme ça en 2024, c’est difficile », soupire ce père de famille, manteau à capuche et cheveux longs.

Récoltes en berne

Cela fait trois ans que les précipitations sont inférieures à la moyenne en Catalogne. C’est deux fois plus que lors de la plus longue sécheresse répertoriée jusqu’à maintenant, qui avait atteint son point d’orgue en 2008, selon le gouvernement régional.

En raison du réchauffement climatique, qui provoque la multiplication des phénomènes météorologiques extrêmes, la fréquence et l’intensité des périodes de sécheresse, qui menacent notamment la sécurité alimentaire des populations, augmentent.

« L’an dernier, dans la région, 100% de la récolte de céréales et 90% de la récolte de fourrage ont été perdues », détaille à l’AFP Francesc Bancells, porte-parole du syndicat agricole Unió de Pagesos.

Cette année, « je signerais pour avoir ne serait-ce qu’une moitié de récolte », ajoute-t-il dans l’un des rares champs ayant survécu à l’avancée des zones industrielles à Valldoreix, près de Barcelone.

Les sourciers, qui se targuent de pouvoir découvrir des sources souterraines, sont désormais « beaucoup plus demandés », explique à l’AFP Enric Colom, 78 ans, qui a passé 25 ans à détecter des puits avec son ami Lluis Sarsanedas à l’aide d’un simple bâton et d’un pendule.

 Trop de tourisme ?

Pour l’ONG « Agua es vida » (« L’eau est la vie »), les autorités ont aussi leur part de responsabilité dans la situation actuelle, car elles refusent de réguler le tourisme – grand consommateur d’eau – et continuent à organiser de grands événements à Barcelone.

« Le gouvernement catalan » donne de l’eau à tout le monde, « à l’agriculture, à l’élevage, au secteur hôtelier et touristique et au secteur urbain, sans penser d’abord à la quantité d’eau dont nous disposons. Cela nous mène à des situations d’effondrement », dénonce son porte-parole, Dante Maschio.

Face à cette crise, les autorités ont commencé à préparer l’acheminement de bateaux chargés d’eau vers Barcelone, mais il ne s’agira que d’un pis-aller compte-tenu des besoins, assure le professeur Xavier Sánchez Vila, directeur du département d’ingénierie civile et environnementale de l’Université polytechnique de Catalogne (UPC).

La région peut aussi compter sur plusieurs usines de dessalement de l’eau de mer. Mais le Pr. Sánchez Vila insiste surtout sur la nécessité d’utiliser davantage les eaux souterraines et d’améliorer la réutilisation des eaux usées.

La situation est similaire en Andalousie (sud du pays), autre région d’Espagne frappée de plein fouet par la sécheresse et qui envisage d’introduire des restrictions à la consommation d’eau si la pluie ne vient pas, notamment à Séville et Malaga.

Au vu de la situation, « nous avons besoin de 30 jours de pluie » d’affilée, soulignait récemment le président de la région, Juan Manuel Moreno. « Pas qu’il pleuviote, mais qu’il pleuve pour de vrai », ajoutait-il.

© AFP

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