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En Syrie, des fuites de pétrole polluent une rivière vitale pour les agriculteurs

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Un cours d'eau pollué par le pétrole, le 31 janvier 2024 à Qamichli, dans la province de Hassaké, au nord-est de la Syrie © AFP Delil souleiman

Tal Brak (Syrie) (AFP) – Comme de nombreux agriculteurs du nord-est de la Syrie, Nizar al-Awwad ne peut plus irriguer ses terres à partir d’une rivière proche noircie par le pétrole, qui s’écoule selon les responsables locaux d’installations visées par des frappes turques.

« Tous les agriculteurs de la région ont cessé d’irriguer leurs champs avec l’eau de la rivière », relate cet homme de 30 ans, originaire d’un village de la province de Hassaké.

« Utiliser de l’eau polluée reviendrait à tuer nos terres », ajoute l’agriculteur à la barbe soigneusement taillée.

« Les agriculteurs pâtissent déjà du manque de carburant et de la sécheresse. La pollution de la rivière n’a fait qu’empirer la situation », déplore encore M. Awwad devant ses champs de blé.

Dans la Syrie en guerre depuis 2011, les combats ont parfois ravagé les infrastructures pétrolières, cibles des convoitises des différents belligérants.

La région où vit Nizar al-Awwad, sous contrôle de l’administration autonome kurde, a été visée en janvier par des frappes de l’aviation turque qui ont notamment ciblé des raffineries et autres installations pétrolières.

La Turquie avait mené à la mi-janvier des frappes contre les combattants kurdes dans le nord de l’Irak et de la Syrie, après la mort de neuf soldats turcs dans une attaque contre une base militaire turque dans le nord de l’Irak.

Nappes de pétrole

Depuis, des habitants de la province de Hassaké ont déclaré à l’AFP avoir remarqué des tâches huileuses noires sur la rivière al-Radd, affluent du Khabour qui traverse une grande partie du nord-est de la Syrie.

Des correspondants de l’AFP ont également vu des nappes de pétrole polluant l’eau et les berges de la rivière sur une distance de 55 kilomètres dans la région de Hassaké.

Mohammed al-Aswad, qui copréside l’Office des eaux de l’administration autonome kurde, indique à l’AFP que les « bombardements turcs ont endommagé des installations pétrolières et des oléoducs ».

Selon lui, les dégâts affectent particulièrement la région de Rmeilane, aux vastes champs pétroliers.

Les fuites de pétrole pourraient « menacer la biodiversité fluviale » si elles atteignent un barrage le long de la rivière Khabour, s’inquiète M. al-Aswad.

Des filets rudimentaires à base de roseaux, installés par l’administration kurde autonome, n’ont pas réussi jusque-là à contenir les fuites de pétrole et protéger les terres des agriculteurs.

Soutenus par des troupes américaines sur place, les Kurdes contrôlent les plus importants champs pétroliers de la Syrie, qui représentent la principale source de revenus de leur administration autonome.

En attendant que les infrastructures pétrolières soient réparées, les autorités déconseillent aux agriculteurs de laisser le bétail boire l’eau polluée.

Ibrahim al-Moufdi, un agriculteur de 50 ans, a arrêté d’irriguer ses cultures avec cette eau polluée depuis deux semaines.

« Les moutons ne peuvent pas boire de la rivière », dit l’homme au keffieh rouge, bâton à la main, exprimant son inquiétude quant à une éventuelle contamination des poissons.

Ces fuites de pétrole portent le coup de grâce aux agriculteurs déjà éprouvés par près de 13 ans d’une guerre ayant plongé le pays dans une crise économique étouffante, et par les conséquences du réchauffement climatique.

« J’espère juste qu’il continuera de pleuvoir pour que nous ne soyons pas contraints d’irriguer nos terres avec l’eau de la rivière », soupire M. al-Moufdi.

© AFP

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