Les parcs zoologiques font l’objet de nombreux débats. Autrefois le symbole de la domination de l’homme sur la nature, les zoos héritent d’un passé controversé dont ils se défendent en revendiquant leur rôle dans la conservation de la biodiversité, la recherche et la sensibilisation. À l’occasion des 10 ans de la réouverture du Parc Zoologique de Paris, GoodPlanet Mag’ a pu s’y rendre et revenir sur la légitimité des zoos. À l’époque de la 6e extinction de masse de la biodiversité, quel est le rôle des parcs zoologiques ? Le bien-être animal étant une préoccupation qui mobilise de plus en plus, fait-il encore débat au sein des zoos ? Face à ces polémiques et remises en cause, comment les jardins zoologiques se positionnent-ils ? Les zoos défendent leur rôle pédagogique tandis que, pour les associations de défense du bien-être animal, ce n’est qu’un prétexte qui ne justifiera jamais le maintien en captivité d’espèces sauvages.
La conservation d’espèces majoritairement non menacées
« Ce zoo est un lieu de conservation » déclarait Gilles Bloch, Président du Muséum national d’Histoire naturelle auquel appartient le Zoo de Paris. Les programmes de conservation concernent une grande partie des animaux pensionnaires et ont été entrepris avant la loi européenne de 1999 ANNÉE MANQUANTE. Un engagement pour la préservation des espèces qui est au cœur de la démarche du parc zoologique parisien.
Toutefois, la conservation n’est pas nécessairement dirigée vers des espèces menacées. Dans son rapport d’étude, l’association Code Animal constate que parmi les 898 espèces recensées dans 24 zoos français (hors poissons) 67 % des ne sont pas classées comme menacées.
Alexis Lécu, directeur scientifique et chef vétérinaire du Zoo de Paris, explique que la conservation signifie que « la plupart des espèces sont dans des plans d’élevage dans le but d’avoir une population de sauvegarde saine » et qu’elle ne concerne donc pas que des espèces en danger. « Mais on essaie d’augmenter cette part » ajoute-t-il.
La conduite et l’efficacité de ces programmes manque encore de données et de transparence comme le relèvent la Fondation Droit Animal (LFDA) et Code Animal. L’association demande qu’une liste exhaustive des espèces détenues soit accessible et qu’une évaluation rigoureuse des actions de conservation soit menée.
Étant un établissement du Muséum National d’Histoire Naturelle collaborant avec le CNRS et le Centre Scientifique de Monaco, le Zoo de Paris semble disposer d’un cadre privilégié pour initier ce travail. Alexis Lécu affirme que « c’est l’une des premières choses que l’on fera » lorsque les trois zoo du Muséum seront « un peu plus avancés ». Une base de données européenne est en place pour collecter les informations des établissements du réseau de l’Association européenne des zoos et aquariums (EAZA), dont le Zoo de Paris fait partie. Cette base n’est cependant accessible que pour ses membres.
« Vitrine de la biodiversité » ou marketing déguisé ?
Les parcs zoologiques ont une dimension commerciale. La collection est exposée à des fins de divertissement malgré les ambitions de conservation et de pédagogie. Les espèces exotiques sont majoritaires par leur capital charismatique que l’on peut considérer plus attirant pour le public que des espèces locales, pourtant aussi menacées.
Pour le directeur scientifique, divertir n’est pas une contrainte pour accueillir des animaux moins spectaculaires : « rien n’empêche. Le zoo est une vitrine de l’évolution et de la biodiversité. On est dans notre rôle pour faire les deux ». C’est d’ailleurs dans le vivarium que se concentrent les efforts de conservation de la faune européenne, bien que le lieu charme moins les visiteurs que la serre. « On est un lieu de biodiversité locale. On a vocation, notamment sur les amphibiens, car ils sont extrêmement menacés, à pouvoir élever voire reproduire de bonnes populations de sauvegarde », précise le vétérinaire.
À la rencontre des amphibiens d’Île-de-France avec le naturaliste Hemminki Johan
« Le but c’est quand même de continuer à émerveiller et agrandir l’éventail pour les visiteurs », admet Alexis Lécu. Il assure que l’enrichissement de la collection est réfléchi en concertation avec les scientifiques et les experts car « ce n’est pas du marketing, c’est du vivant. Derrière un animal il y a un engagement sur une dizaine d’années en réflexion ».
Pour la LFDA, les programmes de reproduction ne sont justement que « de simples opérations marketing pour attirer le visiteur ». L’association Peta France (People for the Ethical Treatment of Animals) avance que les bébés animaux sont particulièrement attrayants. Les naissances en captivité peuvent générer des problèmes de gestion avec un risque de surpopulation pour certaines espèces et un risque d’appauvrissement du patrimoine génétique originel.
L’association rappelle que les zoos se débarrassent parfois cruellement de ces pensionnaires gênants. Le zoo de Wellington a abattu 4 babouins pour réguler leur nombre. Le girafon Marius a été tué et donné en pâture à 4 lions au zoo de Copenhague car ses gènes ont été jugés pas suffisamment originaux. Un risque de consanguinité qui compromettait se reproduction au sein du réseau de l’EAZA.
La réintroduction d’espèces
La Fondation Droit Animal précise que « un effectif, même important, ne constitue une espèce que s’il est intégré à son milieu naturel pour pouvoir exprimer son potentiel génétique ». D’après Jean-Claude Nouët, professeur et fondateur de La Fondation Droit Animal, « seules cinq espèces ont été réintroduites dans la nature avec succès, et non grâce à des zoos, mais grâce à de vastes espaces sous contrôle scientifique ».
Des propos qui font échos à ceux de Peta France qui soutient que la préservation des pandas a été assurée par des travaux scientifiques rigoureux et non grâce aux naissances dans les zoos. Les associations dénoncent la faible réintroduction des populations de ces parcs dont les programmes de reproduction coûteux mobilisent des fonds qui pourraient réellement permettre de préserver les espèces en finançant la protection de leur milieu naturel. « Le cœur de cette problématique c’est bien la prédation de la planète par l’homme ! » selon Jean-Claude Nouët.
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Alexis Lécu explique que les programmes d’élevage permettant de sauvegarder les espèces « ne passent pas forcément par la réintroduction » qui n’est la finalité majoritaire. La plpart des actions visent à conserver un patrimoine génétique diversité au sein d’une population de sauvegarde en captivité. Toutefois, il assure que lorsque l’occasion se présente, « on est prêt ». Parmi ses 10 programmes de conservation, le Zoo de Paris participe à favoriser la réintroduction de lamantins en Guadeloupe.
Une réhabilitation des zoos qui ne met pas fin au débat
Par l’immersion et les interactions sensorielles que permet le zoo, Gilles Bloch soutient qu’il constitue « un outil d’avenir ». Les travaux achevés il y a 10 ans réhabilitent le parc zoologique parisien qui a à cœur d’assurer le bien-être de ses pensionnaires. Véronique Descharrières, architecte à l’origine du projet, indique que « tout est pensé en fonction de l’animal ». Aussi bien pour son confort, avec des zones de retrait, que pour la sécurité du personnel avec des structures de sécurité. Une « révolution architecturale » qui permet de « faire rentrer le zoo dans le XXIe siècle » en promettant de « sensibiliser en s’émerveillant ».
Mais pour Peta France, « même dans les meilleurs zoos, dans les meilleures conditions possibles, une vie en captivité n’est tout simplement pas une vie pour les animaux sauvages ». Un zoo est associé à « une prison artificielle » que les programmes d’éducation, de conservation et de recherche ne justifient pas.
Alexis Lécu, conscient de la controverse, maintient que « le débat est toujours le bienvenu ». Pour lui, « l’enjeu de la biodiversité se joue aussi bien aux zoos que sur le continent africain. La conservation n’est pas un alibi, nous avons des valeurs ».
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Pour aller plus loin :
Parcs zoologiques – La Fondation Droit Animal, Ethique et Sciences (fondation-droit-animal.org)
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