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« Deux réacteurs par an » : le pari très ambitieux d’EDF pour relancer le nucléaire

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Porté par un regain d'intérêt pour l'atome, EDF compte déployer des réacteurs de 3e génération (EPR) en France et en Europe à une échelle "industrielle" © AFP/Archives Ludovic MARIN

Paris (AFP) – Porté par un regain d’intérêt pour l’atome, EDF compte déployer des réacteurs de 3e génération (EPR) en France et en Europe à une échelle « industrielle », un pari ambitieux compte tenu de ses dérapages de coûts et de délais à répétition, incarnés par l’EPR de Flamanville censé démarrer cette année.

Après avoir fixé en novembre le cap à « 1 voire 1,5 (réacteur EPR2) par an » en Europe dès la prochaine décennie, le PDG Luc Rémont a revu en hausse l’ambition du groupe à « deux réacteurs par an » dans un entretien accordé à Contexte, publié vendredi.

Un rythme loin du niveau actuel de « un ou deux (réacteurs) par décennie ».

Le défi industriel est colossal pour le groupe, lesté d’une dette abyssale (54,4 milliards d’euros) et critiqué pour les déboires de ses chantiers EPR. D’autant qu’EDF doit aussi répondre à la relance d’un programme nucléaire en France pouvant aller jusqu’à 18 réacteurs EPR2 – version améliorée de l’EPR – et mener à bien ses deux programmes anglais, Hinkley Point et Sizewell.

« On a déjà fait quatre par an », dans les années 1970-80, « c’est que c’est possible », rassurait le PDG en novembre.

Aujourd’hui, seules deux centrales dotées d’EPR d’EDF sont en marche dans le monde, en Finlande et en Chine, en attendant le démarrage commercial de l’EPR normand de Flamanville annoncé pour mi-2024, avec 12 ans de retard. Le chargement du combustible, étape cruciale avant le raccordement, est toujours officiellement prévu d’ici au 31 mars, mais l’autorité de sûreté a prévenu que le calendrier était « tendu »…

Lancé en 1992 comme le top de la technologie nucléaire, sur une collaboration initiale franco-allemande, le réacteur pressurisé européen (EPR) a été conçu pour relancer l’atome en Europe, après la catastrophe de Tchernobyl de 1986, en promettant une sûreté et une puissance accrues. Mais le fleuron n’a eu de cesse d’accumuler les difficultés sur fond de perte de compétences dans la filière alors que la construction du dernier réacteur mis en service en France a commencé en 1991, 16 ans avant Flamanville.

« Tenir ses coûts et le calendrier »

Encore en janvier, EDF annonçait que son chantier à Hinkley Point pourrait connaître jusqu’à six ans de retard et un quasi doublement du coût. Et un scénario similaire se dessine pour le programme de six EPR2 porté par le gouvernement français, dont la facture provisoire aurait déjà augmenté de 30% (67,4 milliards au lieu des 51,7 milliards annoncés), selon le journal Les Echos.

Une inflation du programme que refuse de confirmer Luc Rémont à ce stade: « Pour l’instant, il n’y a pas de coût évalué », a-t-il déclaré à Contexte, arguant que ce travail est « en cours ».

Néanmoins, ce nouveau chiffrage a ravivé les doutes sur la capacité de l’électricien à livrer ses chantiers dans les clous budgétaires et temporels, au point d’agacer le ministre de l’Economie Bruno Le Maire: « EDF doit apprendre à tenir ses coûts et son calendrier ».

Le groupe se dit lui pleinement mobilisé pour parvenir à un modèle d’EPR2 optimisé et standardisé, tenant compte des pièges du passé. « Il faut simplifier la construction (…) standardiser le nombre et le type d’équipements », a expliqué Joël Barre, délégué interministériel au nouveau nucléaire, au Sénat le 8 février. Pour EDF, l’objectif est d’atteindre un « effet de série », donc construire des réacteurs de manière industrielle pour être plus compétitif.

Le groupe est en discussion avec les Pays-Bas, en Slovénie, Pologne, Finlande et Suède, au moment où l’atome retrouve la cote, à la faveur de l’impératif climatique de sortir des énergies fossiles et d’une plus grande indépendance vis-à-vis à de la Russie, plus grand exportateur de centrales. En République tchèque, EDF est présélectionné avec son concurrent sud-coréen Kepco dans un appel d’offres pour quatre réacteurs.

« Mais pour le consultant Mycle Schneider, coordinateur d’un rapport annuel critique sur l’atome, le World Nuclear Industry Status Report, la « faisabilité » même de l’EPR est mise en doute, alors que toute l’Europe fait déjà face au défi « extraordinaire » de l’entretien et du démantèlement des centrales vieillissantes.

Selon lui, « il ne suffit pas de lancer un appel politique et de simplifier les procédures administratives pour rebâtir une industrie » nucléaire, qui est devant un mur de recrutements avec, en France par exemple, 100.000 personnes à trouver et à former sur 10 ans ».

Selon le délégué interministériel au nouveau nucléaire, c’est au bout du « 5e et 6e réacteur » que le programme français parviendra à un modèle « compétitif en délais », soit à l’horizon 2042-2043.

© AFP

4 commentaires

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    • Matthias Heilweck

    Je suggère d’en rester là et de faire de l’EPR de Flamanville un musée de l’arrogance technologique et de la bêtise humaine.
    Oui, j’ai peur du nucléaire. J’ai peur que les enfants de mes petits-enfants me maudissent.

    • Serge Rochain

    Il n’y a, pour l’ambitieux Macron, de regain d’intérêt pour le nucléaire qu’en raison d’un raclage de fond de tiroir à la recherche des voies des nucléophiles lors des dernières présidentielles.
    Quant à faire deux EPR par an pour EDF, il faudrait qu’elle soit capable d’en produire au moins un en moins de 20 ans !
    Comment les français peuvent-ils être assez bête pour ne pas voir que ce gamin immature leur fait manquer le virage du renouvelable qui est le challenge partout ailleurs dans le monde ?

    • Anne

    Est ce possible que dans la lignée du fiasco de Flamanville, l’aveuglement, le manque de discernement, le sentiment de toute puissance entrainent les responsables de ces décisions vers un futur incontrôlable ? Et un gouffre financier ?
    Ces nouveaux EPR n’auront t ils pas besoin de compétences qui n’existent plus à grande échelle ? N’auront t ils pas besoin de vraies solutions pour les déchets et pas de solutions illusoires comme on aimerait bien nous le faire croire? ET…BESOIN D’EAU???

    • Patrice DESCLAUD

    Voilà encore un ex-conseiller et banquier qu’on place (qui ?) à la t^éte d’EDF. Sans doute un grand spécialiste du discours marketing et communication qui nous promet « la lune » que ce soit en termes de calendrier et échancier, comme de montants financiers. Apprêtons nous à encore plus de retards et plus de budgets ! Les faits et les réalités ne seraient-ils pas assez parlant et bien réels ? Pourquoi raconter ainsi encore des « carabistouilles » de plus ? Alors même qu’on vient de nous annoncer encore que le démarrage de Flanmanville est encore repoussé (à l’été et pas en mars ?). Le réchauffement climatique n’a qu’a bien se tenir …
    Pat-22