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Dérogation pour l’usage accru d’un insecticide sur les betteraves, « insuffisant » pour les cultivateurs

champ betteraves

Un champ de betteraves irrigué à Saint-Georges-sur-Eure (Eure-et-Loir), le 13 août 2022 © AFP/Archives JEAN-FRANCOIS MONIER

Paris (AFP) – Le gouvernement a annoncé vendredi une dérogation permettant d’utiliser davantage un insecticide sur les betteraves à sucre, une mesure « indispensable » selon les cultivateurs mais « insuffisante » face au risque élevé cette année de développement d’une maladie pouvant décimer les productions.

« Cette année, les betteraviers pourront désormais faire jusqu’à 5 passages de Movento » au lieu de « 2 passages aujourd’hui », a déclaré la ministre déléguée auprès du ministre de l’Agriculture Agnès Pannier-Runacher, interrogée sur France Bleu Nord.

La douceur de l’hiver, associée à des pluies quasi-constantes depuis l’automne, a favorisé le développement de pucerons verts, vecteurs de la jaunisse de la betterave, une maladie qui rabougrit les plants et affecte les rendements.

Le trop-plein d’eau dans les champs, notamment dans les Hauts-de-France, première région européenne de production de la betterave à sucre, a retardé les semis, qui démarrent à peine alors qu’ils étaient achevés à cette période l’an dernier.

Les planteurs, qui ont actuellement le droit d’effectuer deux passages dans les champs de Movento (Spirotétramate), pourront désormais « faire d’abord trois passages, et si le puceron est toujours présent, deux supplémentaires, » a indiqué Mme Pannier-Runacher.

L’usage du Movento pourra se faire en plus de l’épandage d’un autre insecticide, le Teppeki (flonicamide).

Pour l’heure, une première dérogation de 120 jours permettra d’effectuer le troisième traitement de Movento, et si la pression des pucerons est trop forte plus tard, d’autres dérogations, permettant les deux autres passages de l’insecticide, seront prises, a-t-on précisé au cabinet de la ministre.

« Ces dérogations, c’est le minimum du minimum. Indispensable mais insuffisant. Tous les capteurs sont au rouge, les réservoirs de pucerons sont au même niveau qu’en 2020, année où on a perdu un tiers de la récolte et jusqu’à 70% dans certaines zones », a déclaré à l’AFP Franck Sander, président de la Confédération des planteurs de betteraves (CGB), association spécialisée du syndicat majoritaire FNSEA.

« Distorsions de concurrence »

« On a à peine 10% des betteraves semées aujourd’hui. Il y a des champs où on ne peut toujours pas entrer à cause de l’eau. Cela veut dire que les pucerons arriveront au moment où les betteraves seront les plus fragiles, quand les plants sortent de terre et quand les feuilles couvriront le sol », a-t-il expliqué.

Alexis Hache, président des betteraviers de l’Oise, qui cultive 40 hectares à Vexin, ne décolère pas: « C’est absolument pas ce qu’on demandait ».

« On sait tous en agriculture et en agronomie que quand on multiplie les passages d’une molécule donnée, on la condamne car la nature s’adapte », a-t-il déclaré à l’AFP, mettant en garde contre le développement d’une résistance des pucerons au Movento.

« On demandait une diversité des familles et des modes d’action pour justement éviter ces résistances et limiter les modes de passage », a-t-il ajouté.

Depuis des mois, la CGB réclame une dérogation pour l’acétamipride, un insecticide de la famille des néonicotinoïdes qualifié de « tueur d’abeilles » par les défenseurs de l’environnement et interdit en France depuis 2016.

Après l’année terrible de 2020, les betteraviers avaient bénéficié de dérogations en France pour l’utilisation de semences enrobées de néonicotinoïdes. Ils ont vécu comme un « coup de massue » l’interdiction totale de l’utilisation de ces semences fin 2022 après une décision de la Cour de justice de l’Union européenne.

Après une année clémente en 2023, sans poussée massive de la jaunisse, ils ont vu leurs rendements s’améliorer et profité de la hausse des prix du sucre.

« On n’aura pas cette chance cette année. Nous demandons à pouvoir utiliser deux produits autorisés au niveau européen, mais aujourd’hui interdits en France: l’acétamipride, qui est autorisée jusqu’en 2035 dans l’UE et est actuellement en cours d’évaluation par l’Efsa (l’agence sanitaire européenne), et la flupyradiflurone, qui peut être utilisée en enrobage de semences », a déclaré Franck Sander.

Jusqu’à présent, le ministère de l’Agriculture n’envisage pas de « revenir en arrière » sur les néonicotinoïdes, et explique travailler sur les traitements alternatifs dans le cadre d’un plan de recherche national.

« En attendant, on fait face à des distorsions flagrantes de concurrence: nos voisins allemands continuent à utiliser l’acétamipride en pulvérisation foliaire », a déploré M. Sander.

La France est le premier producteur européen de sucre. Elle est « auto-suffisante et exporte la moitié de sa production, soit 1,8 million de tonnes de sucres », selon la CGB.

© AFP

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2 commentaires

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    • Le Taquin

    Insuffisant n’est pas le bon terme ! Inadapté est plus adéquat. Encore une fois les bureaucrates des ministères savent mieux que les bettraviers ce qu’il faut faire !

    • dany voltzenlogel

    Monoculture, absence de nature, de haies, de vie dans ces immenses étendues de cultures, aucun prédateur possible car leur habitat a été éradiqué par les agriculteurs avec leurs tracteurs qui doivent évoluer sans le moindre obstacle.
    Terres inondées, sol damé en profondeur par le poids des machines etc.
    Une agriculture qui se tire une balle dans le pied puis s’en plaint.
    Et ces milliers de tonnes de sucre qui pas uniquement inutile pour l’alimentation, ruine la santé.