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Face au Pacte vert européen, les terres de charbon entre colère et résignation

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La mine de charbon Troyanovo I, le 12 avril 2024 dans l'est de la Bulgarie © AFP Nikolay DOYCHINOV

Beli Bryag (Bulgarie) (AFP) – « Pas d’avenir »: en Bulgarie, la colère gronde contre le Pacte vert européen et la fin programmée du charbon. La Pologne, autre terre de houille, s’est elle fait une raison, mettant résolument le cap sur les renouvelables.

Le village bulgare de Beli Bryag, au cœur de la région minière, symbolise les ambitions perdues du pays des Balkans, le plus pauvre de l’Union européenne.

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En 2009, il avait été décidé d’en faire table rase pour pouvoir agrandir une mine en plein air.

Le projet a vidé le village où ne restent que des maisons aux fenêtres béantes et une cinquantaine d’habitants, contre quelque 400 à l’époque.

« La situation est tragique. Il serait absurde de démolir les dernières habitations pour étendre une mine qui risque de fermer ensuite », résume pour l’AFP la maire du hameau fantôme Ivelina Dimcheva, 43 ans, elle-même sœur et épouse de mineurs.

Car l’UE vise la sortie du charbon afin d’atteindre la neutralité carbone en 2050.

Pour inciter les entreprises à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, Bruxelles a instauré en 2005 un système de quotas.

En cas de dépassement, elles doivent en acheter des supplémentaires (un quota équivaut à une tonne de CO2).

La Bulgarie « traîne des pieds »

Pour accentuer la pression sur les pollueurs, le prix a augmenté au fil des ans et l’activité des centrales à charbon — qui ont fourni plus de 30% des besoins énergétiques du pays en 2023, juste derrière le nucléaire — est de moins en moins rentable.

Avec ses trois mines, le gigantesque bassin Maritza Iztok fait actuellement tourner quatre sites. Une manne pour la région depuis des décennies: plus de 11.000 personnes y travaillent et on compte quelque 70.000 emplois indirects.

Les autorités bulgares ont longtemps lutté contre Bruxelles pour prolonger la vie du secteur avant de prendre acte de son inéluctable déclin.

Dénoncer la fermeture des centrales à charbon ne sert à rien, estime l’expert Milen Keremedchiev, ancien vice-ministre de l’Économie. « C’est comme protester contre la vieillesse imminente », lance-t-il.

Mais faute d’avoir préparé la transition écologique, la Bulgarie, minée par l’instabilité politique, est devenue pour la première fois cet hiver importatrice nette d’énergie.

Et qu’adviendra-t-il des travailleurs du charbon?

« C’est le néant, on ne nous offre aucune perspective », lâche Stanimir Georgiev, 50 ans dont 30 de carrière dans les mines, qui organise grèves et défilés pour défendre son gagne-pain à l’approche des élections européennes du 9 juin.

« Le Pacte vert est une mascarade qui menace notre bien-être et nourrit des sentiments anti-européens », regrette-t-il, tandis que certains ont ressorti le drapeau russe au fronton de leur maison dans ce pays historiquement proche de Moscou.

« C’est la faute de nos gouvernements qui ont traîné des pieds » pour préparer l’avenir, renchérit Diyan Ivanov, 36 ans, mineur de père en fils. « Nous travaillons seulement un jour sur deux et plus jamais la nuit », témoigne-t-il, regrettant « la sécurité » des temps anciens.

 Virage radical en Pologne

Loin de cette nostalgie, la Pologne, pourtant traditionnellement plus dépendante du charbon que la Bulgarie, semble prête à tourner la page.

L’énorme centrale de Belchatow (centre), alimentée en lignite, reste « le plus grand émetteur de CO2 » sur le continent, selon l’ONG environnementale Ember. Mais la part du charbon dans la production d’énergie est passée de 87% en 2015 à 73% en 2022 et 63% l’an dernier, selon les chiffres officiels, sur fond d’envolée des coûts.

Les mines — une vingtaine au total — sont pour la plupart profondément déficitaires, ne survivant que grâce aux aides de l’État.

Et les effectifs ont fondu: de près de 400.000 en 1990, ils ne sont plus que 75.000 aujourd’hui.

Les mineurs apparaissent résignés à leur sort alors que la Pologne prévoit d’abandonner le charbon d’ici 2049, une date que le nouveau gouvernement pro-européen de Donald Tusk doit encore confirmer.

Déjà, les énergies renouvelables représentent « un quart du bouquet énergétique, contre seulement 5% il y a 10 ans », précise Grzegorz Wisniewski, expert de l’institut IEO de Varsovie, spécialisé sur le sujet.

Ce qui est « remarquable », c’est que le solaire et l’éolien ont quasiment supplanté l’hydraulique et la biomasse, auparavant dominants.

Malgré les freins administratifs et techniques, il parie sur « une part des renouvelables de 70 à 80% en 2040 », tandis qu’une première centrale nucléaire doit voir le jour d’ici 2033.

Une révolution encore impensable il y a peu au pays numéro un européen du charbon.

© AFP

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