L’essor de la plongée sous-marine pour la sauvegarde des coraux

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Une professeure de plongée sous-marine Sandra Rubio et son élève Nannalin "Fleur" Pornprasertsom, le 14 juin 2024, nageant au-dessus des coraux autour de l'île de Koh Tao dans la province thaïlandaise de Surat Thani (sud) © AFP Lillian SUWANRUMPHA

Koh Tao (Thaïlande) (AFP) – Au large de l’île de Koh Tao en Thaïlande, une plongeuse sous-marine nage lentement au-dessus d’un récif de corail affaibli aux branches blanches, notant et répertoriant les espèces de poissons vivant dans cet écosystème fragile.

A seulement 14 ans, Nannalin Pornprasertsom fait partie de ces adeptes de plongée sous-marine qui se tournent de plus en plus vers la conservation du milieu marin en péril plutôt qu’une simple contemplation.

Au cours d’un stage de deux semaines, Nannalin a appris à identifier les types de coraux, restaurer les récifs et évaluer la santé d’un corail par sa couleur, ce qui aide la recherche scientifique.

« C’est juste quelque chose que je peux faire de bien pour l’environnement », déclare à l’AFP l’adolescente, qui pratique la plongée depuis l’âge de 12 ans. « Je veux aider le récif. »

Un peu partout dans le monde, le corail tend à devenir d’un blanc fantomatique en raison du réchauffement de l’océan qui expulse les algues microscopiques qui y vivent, le nourrissent et lui donnent sa couleur. Le corail, privé de ces zooxanthelles vitales pour lui, finit par mourir.

Spirale de la mort

La Thaïlande subit les effets du changement climatique dans une série de secteurs et les autorités ont déjà fermé plusieurs parcs nationaux en raison du récent blanchissement des coraux.

Les certifications en conservation marine ont augmenté de plus de 6% au niveau mondial entre 2021 et 2023, selon l’Association professionnelle des instructeurs de plongée.

Cette année, elle lance un grand recensement des requins et des raies, exploitant son réseau de plongeurs pour collecter des données afin d’établir les politiques de protection.

A Koh Tao, la société Black Turtle Dive propose des cours sur tous les sujets, de la « plongée contre les débris » (collecte de plastiques ou de filets de pêche échoués) aux techniques de restauration des coraux.

« Il y a une prise de conscience accrue », assure Steve Minks, un instructeur certifié en conservation chez Black Turtle.

« Il y a beaucoup de blanchissement (de coraux) et l’environnement marin suscite beaucoup d’inquiétude. »

Cette spirale de la mort est omniprésente dans les eaux de Koh Tao. Les espèces les plus touchées sont les espèces ramifiées qui poussent rapidement mais sont aussi moins résistantes.

Si la température de l’eau baisse, elles auront une chance de se rétablir. Mais pour l’instant, leurs tiges pâles sont visibles depuis la surface.

« Je n’étais pas préparée à un blanchissement aussi important. L’impact est considérable », soupire Sandra Rubio, instructrice.

Selon cette jeune femme de 28 ans, le blanchissement et d’autres dégradations marines ont poussé des plongeurs à suivre ses cours sur la conservation.

« Les gens veulent apprendre parce qu’ils voient ce genre de changements », explique-t-elle à l’AFP.

« Ils n’en comprennent pas forcément l’origine mais ils voient bien que cela n’a rien de bon. »

Elle explique à ses stagiaires comment identifier les espèces, y compris le corail mou: il faut lui faire signe, explique-t-elle, en imitant le mouvement d’une main dans l’eau, et attendre de voir s’il « fait signe en retour ».

Les informations recueillies par la jeune Nannalin seront intégrées à un projet scientifique mondial et collaboratif appelé Coral Watch, qui a déjà produit de nombreuses publications.

« Nous collectons les données pour les scientifiques afin qu’ils puissent travailler avec les gouvernements et les autorités », explique Steve Minks.

Les plongeurs conduisent également des actions de restauration et de plantation de coraux. A bord d’un bateau, une structure en forme d’étoile conçue par des étudiants est transportée sur un récif corallien.

« On fait de notre mieux »

Au cours des 14 derniers mois, l’association écologiste Global Reef a transplanté environ 2.000 colonies de coraux, avec un taux de survie d’environ 75%, souligne Gavin Miller, directeur du programme scientifique.

« Cela ne va pas vraiment sauver les récifs coralliens à l’échelle mondiale, mais cela a un impact très, très important au niveau local. »

« Les vivaneaux (poissons de récif, NDLR) reviennent. Nous avons aussi des poissons-globes. »

Le blanchissement des coraux a découragé de nombreux passionnés de la mer, mais pour les plongeurs de Koh Tao, c’est aussi un appel à la mobilisation générale.

« Les générations précédentes n’avaient pas accès à la recherche et à l’éducation dont nous disposons aujourd’hui ». « Je pense que les gens de mon âge devraient en tirer le meilleur parti et faire de leur mieux pour inverser les choses », explique Nannalin.

Sandra Rubio admet avec tristesse que cela « ne va pas changer du jour au lendemain », « mais on fait de notre mieux, et c’est un sentiment très fort », dit-elle.

Pour remonter son moral, elle « travaille chaque jour »: « pour faire du bien à l’environnement et au récif que j’aime ».

© AFP

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