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Syrie: face au manque de financement, les déplacés privés d’eau en plein été

seaux eau enfants

Des enfants syriens remplissent leurs seaux d'eau dans un camp pour personnes déplacées près de Sarmada, dans la province d'Idleb, dans le nord de la Syrie, le 28 juin 2024 © AFP AAREF WATAD

Sarmadā (Syrie) (AFP) – Sous la chaleur estivale, Hussein al-Naasan lutte pour fournir de l’eau à sa famille. Père de deux enfants, il doit partager un réservoir avec trois autres familles dans un camp de déplacés du nord-ouest de la Syrie, qui manque cruellement de financement.

« On nous avait déjà privés des colis alimentaires, maintenant on nous prive d’eau, comme si on voulait nous tuer à petit feu », déplore le trentenaire, déplacé depuis 11 ans et résidant dans un camp de la ville de Sarmada, près de la frontière turque.

Les zones rebelles du nord-ouest de la Syrie, ravagée et morcelée par la guerre, abritent plus de cinq millions de personnes, dont la majorité sont des déplacés vivant dans des camps surpeuplés, dans des conditions déplorables, selon l’ONU.

Déclenchée en 2011, la guerre civile en Syrie a fait plus d’un demi-million de morts et donné lieu à la plus grande crise de déplacement au monde, avec 13,8 millions de personnes toujours déplacées de force à l’intérieur et à l’extérieur du pays, selon le Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR).

« 4,1 millions de personnes dans le nord-ouest de la Syrie, soit 80% de la population, ont besoin d’aide en eau, assainissement et hygiène » cette année, a indiqué à l’AFP le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA), déplorant qu’il s’agit du secteur le « moins financé ».

« On a besoin de se laver pour atténuer la chaleur à l’intérieur des tentes », affirme M. Naasan qui craint une propagation de maladies et l’effondrement du système de santé déjà fragilisé par plus de 13 ans de conflit dévastateur.

Amoncellement d’ordures

Entre les tentes éparpillées sur un terrain sablonneux, Abdelkarim Ezzeddine, 45 ans, père de neuf enfants, stationne sa camionnette chargée de trois barils en plastique qu’il a pu remplir dans un puits voisin.

« Est-il concevable qu’ils nous coupent l’eau en été ? Veulent-ils notre mort ? », s’interroge M. Ezzeddine tandis qu’il asperge ses enfants d’eau de la cargaison qui lui suffit à peine pour une journée.

Face à l’extrême pauvreté et à la hausse des prix, les habitants des camps surpeuplés dépendent des aides des organisations humanitaires.

Mais leurs financements ont diminué depuis le début de l’année, et désormais « 460 camps sur 1.100 au total, manquent de soutien essentiel pour l’eau, l’assainissement et l’hygiène », souligne l’Ocha.

L’ONU prévoit que les services seront coupés dans 111 autres camps d’ici la fin septembre, attirant l’attention sur « le besoin urgent d’augmenter l’aide financière pour maintenir les opérations humanitaires essentielles dans la région ».

Au premier trimestre de 2024, « seulement 2% du financement requis pour le secteur de l’eau, de l’assainissement et de l’hygiène » ont été reçus, selon la même source.

« Les conditions de vie des camps dans le nord-ouest de la Syrie sont déplorables, 70% d’entre eux étant surpeuplés », regrette le coordinateur humanitaire régional adjoint de l’ONU pour la Syrie, David Carden.

« Les familles vivant dans des tentes délabrées subissent une chaleur étouffante. Les déchets s’accumulent dans les camps (…) et les enfants tombent malade », souligne-t-il.

Maladies de peau

Les habitants subissent également l’odeur pestilentielle que dégagent les égouts et les déchets.

L’arrêt des aides « entraînera (…) une catastrophe humanitaire », prévient Firas Kardoush, un responsable de l’administration locale de cette région dominée par le groupe jihadiste Hayat Tahrir al-Cham (HTS) et qui échappe au contrôle du gouvernement.

« Syria response coordination », une coalition d’ONG locales dans la région, a mis en garde contre la propagation de maladies de la peau dans les camps avec la hausse des températures et la rareté de l’eau.

« Le taux d’infection par la gale dans certains camps dépasse les 90% », selon Dr Fidaa al-Hamod, responsable d’une clinique mobile en visite dans un camp voisin de Sarmada.

Dans un camp près du village de Bardaqli, au nord d’Idleb, Asmaa al-Saleh, 32 ans peine à faire à manger à ses cinq enfants et à les laver.

« Je n’ai pas les moyens d’acheter de réservoir », dit-elle. « Quand je manque d’eau, je vais à pied jusqu’au puits le plus proche pour remplir des récipients. »

« Nous n’avons même pas d’eau fraîche à boire », ajoute-t-elle, en montrant une éruption cutanée sur la jambe de son petit.

© AFP

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