Kyparissia (Grèce) (AFP) – Panos Adamopoulos, agriculteur du sud-ouest de la Grèce, remue les feuilles d’un arbuste. « Juste ici! », dit-il en désignant de petites mangues bientôt mûres, fruits exotiques incongrus sur ces terres tapissées d’oliviers.
Ces douceurs, originaires d’Asie, sont les premiers résultats d’une expérience scientifique menée dans la péninsule du Péloponnèse, aride dans certaines parties.
Avocats, litchis, chérimoles et noix de macadamia ont aussi été plantés, avec l’ambition de développer des cultures plus résistantes au changement climatique qui affecte tout particulièrement la Grèce et le pourtour méditerranéen.
Les températures sont assommantes l’été et plutôt douces le reste de l’année. « Il n’y a plus d’hiver », résume Panos Adamopoulos, 38 ans, installé à Kyparissia.
Sa propriété, où les arbres paraissent se jeter dans la mer Ionienne, n’a pas reçu une goutte de pluie depuis mars.
Or, « sans eau, pas de cultures », rappelle le producteur à la barbe poivre et sel.
La majorité de ses revenus proviennent de la salade iceberg, particulièrement gourmande en la matière.
Il pense devoir bientôt renoncer à certaines productions comme ses précieuses pastèques, dont la chair juteuse nécessite un arrosage intense.
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D’où son intérêt pour les fruits exotiques, « plus résistants » à ces conditions météorologiques, souligne-t-il à l’AFP.
Ses quelques dizaines de manguiers et d’avocatiers, encore discrets comparé aux 80 hectares du domaine, se portent comme un charme.
Panos Adamopoulos a prévu d’en planter 300 supplémentaires et se targue d’avoir déjà reçu des commandes pour ses premières récoltes, attendues durant le mois.
« Sauver » l’agriculture
Teresa Tzatzani, chercheuse de l’organisation d’agriculture hellénique Demeter qui mène cette étude, explique qu’ il s’agit de « trouver des façons de faire face au changement climatique et de l’utiliser à notre avantage ».
« Toute l’année est plus chaude maintenant, ce qui est bon pour ces plantes », note l’experte.
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Les manguiers, en particulier, n’ont besoin que de peu de précipitations. Or les deux derniers hivers ont été inhabituellement secs, selon Teresa Tzatzani.
Si l’avocatier poussait déjà en Crète, grande île située plus au sud, les scientifiques n’étaient pas certains qu’il s’adapterait aux conditions de la Grèce continentale.
Certains producteurs pouvaient en cultiver en petite quantité dans le Péloponnèse, mais le programme doit déterminer si ces cultures sont désormais viables à grande échelle, explique Antonis Paraskevopoulos, directeur de l’économie agricole pour la région de Triphylie.
Ce type d’innovations est essentiel pour « sauver » le secteur des « désastres » climatiques à venir, s’inquiète-t-il, appelant à des investissements européens.
Les fruits tropicaux ne sont cependant pas une solution miracle.
Le programme ne compte pour l’heure qu’une dizaine d’agriculteurs et environ 10 hectares cultivés.
Il ne vise pas à remplacer les productions phares, comme les olives ou les oranges, mais peut constituer un « complément », prévient Teresa Tzatzani, qui compte étendre l’expérience à de nouvelles régions grecques.
Des pays voisins connaissent la même problématique. En Italie, des agriculteurs siciliens se sont par exemple mis à produire des mangues, bananes ou papayes.
Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) estime que le bassin méditerranéen, un des « points chauds » du changement climatique, subira des vagues de chaleur et des sécheresses plus fréquentes.
La Grèce a connu son mois de juillet le plus chaud jamais enregistré selon des données météo préliminaires de l’observatoire national, après déjà un record en juin.
Rentabilité
Theodoros Dimitrakakis, un autre fermier grec participant à l’expérience, rappelle qu’il faudra « des années » pour que la production de fruits tropicaux soit rentable.
L’agriculteur de 44 ans, pourtant enthousiasmé par l’expérience, dit ne pas avoir les moyens de s’y consacrer pleinement tant son gagne-pain, l’olivier, nécessite toute son attention.
A cause de la sécheresse et de la chaleur précoce, sa production a baissé de 60% l’an dernier par rapport à sa moyenne, dit-il.
Son village, comme de nombreux en Grèce, est aussi très souvent privé d’eau plusieurs heures dans la journée, à cause des pénuries.
Theodoros Dimitrakakis, militant écologiste pendant ses années d’université, avoue n’avoir pourtant compris que tout récemment que le réchauffement climatique l’affecterait « dès maintenant ».
Il espère parvenir à en convaincre les autres agriculteurs locaux qui, pour certains, préfèrent penser qu’il ne s’agit que d’une « mauvaise année ».
© AFP
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