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Leticia, ville colombienne isolée par l’Amazone asséché à la triple frontière avec Pérou et Brésil

Leticia sécheresse

D'énormes plages se sont formées sur ce qui était autrefois le lit d'un bras du fleuve Amazone qui alimente la ville colombienne de Leticia, dans le département d'Amazonas, le 15 septembre 2024 © AFP Santiago RUIZ

Leticia (Colombie) (AFP) – « Aujourd’hui l’Amazonie pleure, elle s’assèche », se lamente auprès de l’AFP le maire de Leticia, ville colombienne à la triple frontière avec le Pérou et le Brésil, seulement alimentée par un bras du fleuve géant qui a perdu dix mètres entre juin et août, selon l’Institut colombien d’hydrologie, de météorologie et d’études environnementales (Ideam).

Le manque de précipitations a transformé les anciennes rives en hauts murs de terre séchée. Le faible tirant d’eau oblige les bateaux à décharger nourriture, eau potable et carburant de plus en plus loin pour alimenter les 60.000 habitants de cette ville inaccessible par la route, qui jouxte celle brésilienne de Tabatinga.

Car sur la triple frontière, le fleuve Amazone serpente en bras d’eau distincts. Le principal passe sur le territoire péruvien avant de continuer vers le Brésil. Leticia n’est alimentée que par un canal secondaire, quasiment à sec.

Le fleuve n’étant par endroits plus navigable, les écoles ont dû suspendre les cours. Et les habitants sur ses rives, qui vivent principalement de la production de maïs, de riz, de manioc et d’autres cultures, voient se raréfier leurs moyens de subsistance, a averti le chef indigène Crispin Angarita.

« C’est le niveau le plus bas de ces 50 dernières années », dit-il, pointant également les difficultés d’accès aux soins pour les personnes malades.

Face à l’urgence, la mairie de Leticia a décrété une « alerte jaune » en juillet, mois au cours duquel le niveau de l’eau a baissé en moyenne de huit centimètres par jour.

Septembre est généralement le mois le plus sec dans la jungle des trois frontières, mais 2024 montre des signes alarmants, selon le professeur Santiago Duque, de l’Institut de recherche amazonienne de l’Université nationale de Colombie : « C’est la deuxième année avec une forte sécheresse, mais celle-ci est aggravée par les faibles pluies tombées en début d’année », affirme-t-il.

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De grandes plages se sont formées loin des anciennes rives, et les îlots dans les entrelacs du fleuve se sont agrandis.

« Problème tri-national »

Le fleuve Amazone, crucial pour le transport et l’approvisionnement dans la plus grande forêt tropicale du monde, est confronté à une « sécheresse extrême » selon M. Duque : « Ce qui était un cours d’eau de 600 mètres de large fait aujourd’hui par endroits moins de 200 mètres. Et là où le fleuve était de six à dix mètres de profondeur, il n’en fait plus que trois ».

Pour le biologiste, si la ville colombienne de Leticia est la plus directement impactée par la configuration du bras du fleuve qui l’alimente, c’est « un problème tri-national » auquel il faut s’attaquer de toute urgence.

Au Pérou, le service national de météorologie et d’hydrologie a classé le débit de l’Amazone en « seuil hydrologique rouge ».

Le manque de précipitation sur l’Amérique du sud est principalement causée par l’intensité du phénomène El Niño, couplé aux effets du changement climatique et de la déforestation, explique M. Duque.

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Plusieurs pays ont dû opérer du rationnement de l’eau et de l’électricité, tandis que des incendies de forêt d’ampleur historiques frappent le Brésil, le Pérou ou la Bolivie.

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L’expert souligne l’importance de la forêt amazonienne, considérée comme l’un des poumons de la Terre, car sa végétation dense absorbe une part importante des gaz à effet de serre générés par l’activité humaine, tandis que son humidité abondante régule la hausse des températures mondiales.

© AFP

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