La Haye (AFP) – Une représentante de pays vulnérables a fait part vendredi de son « immense déception » face à l’attitude de grands pollueurs et demandé à ce que leur responsabilité historique soit reconnue par la plus haute juridiction de l’ONU, qui clôt des audiences sur le climat.
« Nous ne pouvons pas nous contenter des traités sur le climat pour résoudre cette crise mondiale », a déclaré à l’AFP Cristelle Pratt, une représentante de l’Organisation des États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, un groupe de 79 nations.
« Nous devons nous référer à l’ensemble du droit international. Et nous devons le faire pour des raisons d’équité et de justice. Chaque être humain sur cette planète a le droit de vivre une vie digne », a-t-elle ajouté, dans le contexte d’audiences historiques ces deux dernières semaines à la Cour internationale de justice (CIJ), avec un nombre record d’Etats et d’organisations s’adressant aux juges.
Il y a une « immense déception » envers les pays développés mais cela n’est « pas du tout surprenant », a affirmé Mme Pratt.
Insuffisant
Plus de 100 intervenants se sont exprimés dans le cadre des récentes audiences à la CIJ, qui siège à La Haye. Parmi eux, des diplomates des plus grandes économies mondiales et des représentants de minuscules nations insulaires.
Dans ce que de nombreux experts ont décrit comme une bataille de « David contre Goliath », de profondes divisions sont apparues entre les plus grands pollueurs et les pays les plus affectés par le changement climatique.
De grandes puissances comme les États-Unis, la Chine et l’Inde ont appelé les juges à ne pas aller au-delà du cadre juridique existant pour lutter contre le changement climatique.
Mais celui-ci, à savoir la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), est insuffisant pour atténuer les effets dévastateurs du changement climatique, estiment les petits Etats.
« Répercussions à travers le monde »
L’ONU a demandé à la CIJ de se prononcer sur deux questions.
Quelles sont les obligations juridiques des Etats en matière de prévention du changement climatique ? Quelles sont les conséquences juridiques pour les pays dont les émissions ont porté atteinte à l’environnement ?
C’est sur cette deuxième question que de nombreux pays vulnérables espèrent que la CIJ clarifiera l’obligation légale pour les émetteurs historiques de payer pour les dommages causés.
« Nous devons examiner les responsabilités historiques et demander des comptes à ces émetteurs, des puissances coloniales pour la plupart », a lancé Mme Pratt, soulignant que beaucoup de pays membres de son organisation payaient une « dette insoutenable ».
L’avis de la CIJ n’est pas contraignant et ne sera pas rendu avant plusieurs mois.
Mais « il aura du poids » et « des répercussions dans le monde entier », observe Nikki Reisch, la directrice du programme climat et énergie au Centre de droit international de l’environnement.
« Cette cour a l’occasion de mettre fin à l’impunité que nous observons depuis des décennies et d’affirmer le fondement de la responsabilité », estime-t-elle auprès de l’AFP.
« Il ne s’agit pas seulement de verser des compensations pour le coût croissant du changement climatique. Il s’agit de réformes structurelles, d’annulations de dettes, de restauration d’écosystèmes », ajoute Mme Reisch.
« Question de vie ou de mort »
Les pays que représente Cristelle Pratt comptent 1,3 milliard d’habitants mais interviennent à hauteur de 3% des émissions mondiales, a noté cette dernière.
Un accord sur le climat âprement négocié a été trouvé au cours du sommet COP29 en Azerbaïdjan. Celui-ci stipule que les pays développés doivent fournir au moins 300 milliards de dollars par an d’ici à 2035 pour le financement de la lutte contre le changement climatique.
« Les engagements sont vraiment assez insignifiants », selon Mme Pratt.
Plusieurs grands pollueurs ont fait valoir qu’il était impossible d’inscrire dans le droit international une responsabilité pour les émissions passées et les dommages causés.
Des géants des combustibles fossiles « ont exhorté cette cour à ignorer l’histoire, à mettre sous le tapis leur conduite pendant des décennies qui a placé le monde au bord du gouffre », s’insurge Mme Reisch.
Les audiences ont également été marquées par la présence de représentants de petits États insulaires, souvent en costumes nationaux colorés, témoignant de la dévastation subie par leurs peuples.
« Il s’agit d’une question de vie ou de mort pour de nombreuses personnes », conclut Mme Reisch.
© AFP
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Quidamus
Techniquement les entreprises hautement polluantes, tel que Saudi Aramco, Chevron, Gazprom, ExxonMobil, National Iranian Oil Co,
BP, Royal Dutch Shell, Coal India, Pemex, Total Energies, Petróleos de Venezuela et toute l’agro-industrie, sont des sociétés du crime environnemental. Et donc des terroristes planétaires. De ce fait, au même titre que les oligarques russes, leurs biens et leurs comptes en banques devraient être saisis et récupérés par les Etats en utilisant les même Lois en vigueur. Dès lors on peut commencer à discuter sans entrave.