Yann et Tom Arthus-Bertrand ont lancé une pétition pour le respect des propriétés privées et l’interdiction de la chasse à courre à Rambouillet à l’horizon 2030. La pétition a été publiée le 21 décembre 2024 par l’association de la Vallée de la Millière, fondée et présidée par Yann Arthus-Bertrand, également président et fondateur de la Fondation GoodPlanet. Elle a déjà récolté près de 60 000 signatures.
Un « sanctuaire » pour les animaux sauvages
Lorsqu’il a acquis ce terrain de 28 km2 dans les Yvelines, Yann Arthus-Bertrand voulait créer un refuge où les animaux seraient en sécurité, dans un pays où « on peut chasser partout, même dans les parcs naturels ». Le photographe décrit volontiers cette « réserve naturelle » comme une « utopie », destinée à protéger les animaux sauvages qu’il considère comme ses « amis ».
Son fils Tom Arthus-Bertrand partage cette vision et considère le petit terrain comme « un sanctuaire ». Lui qui garde le souvenir marquant d’avoir assisté au dépeçage d’un animal sauvage lorsqu’il était enfant souligne l’importance de l’existence de lieux où les animaux soient en sécurité.
Des incursions récurrentes
C’est à la suite de l’intrusion de 6 chiens du rallye de chasse Bonnelles-Rambouillet sur le terrain de la Millière que le photographe et son fils ont décidé de lancer une pétition contre la chasse à courre, adressée au préfet des Yvelines Frédéric Rose. Elle réclame le respect des propriétés privées, l’interdiction de la chasse pendant la période du brame, saison de reproduction des cerfs entre septembre et octobre, et finalement l’interdiction complète de la chasse à courre à Rambouillet à l’horizon 2030.
La pétition est aussi le résultat d’un long combat pour la protection du « sanctuaire » et des animaux qui s’y trouvent contre les intrusions. En effet, depuis trois ans le terrain a été l’objet d’incursions régulières de chiens de chasse, malgré une première plainte déposée par la Vallée de la Millière en 2024.
Un « privilège de l’Ancien Régime »
Comment expliquer ces intrusions récurrentes alors que le droit à la propriété privée est inscrit dans la loi française ? Pour Michel Gauthier-Clerc, docteur en écologie et auteur du livre Les chasseurs ont-ils tué la chasse ? , la réponse doit être cherchée dans l’Histoire. « La Révolution française a établi que nul n’a la faculté de chasser sur la propriété d’autrui sans son consentement », rappelle le chercheur. Pourtant, dès 1844 « les aristocrates ont réussi à introduire le droit de suite dans la chasse à courre malgré les droits de propriété que la Révolution avait confirmés » en obtenant « le droit d’aller chercher un animal blessé ou qui est allé mourir sur une autre propriété ».
Ainsi, les chasseurs à courre « n’ont pas le droit de lâcher les chiens là où c’est interdit », mais les chiens, eux, « ont le droit de passer chez vous », explique Michel Gauthier-Clerc. Ce « droit de suite » qui s’apparente à un « privilège de l’Ancien Régime » a par la suite été élargi à tous les chasseurs.
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Pour une évolution de la pratique
Yann et Tom Arthus-Bertrand s’y accordent, ils n’ont rien contre la chasse ou les chasseurs, que tous deux disent respecter. Ils demandent avant tout la protection de leur propriété privée et l’évolution de la pratique de la chasse à courre.
Pour Yann Arthus-Bertrand, la chasse implique « une passion, une connaissance de la nature et une tradition » pour lesquelles il a beaucoup de considération. Pourtant, la chasse à courre en particulier implique un rituel de poursuite et d’exécution des proies qui « ne correspond plus à la mentalité actuelle ». Aujourd’hui, « il existe une nouvelle sensibilité à la souffrance animale », souligne-t-il. « La chasse à courre doit évoluer ». La pétition a donc d’abord vocation à réintroduire dans le débat public les questions brûlantes de la chasse et de la souffrance animale. Un pari réussi.
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Pour aller plus loin:
Vallée de la Millière – Réserve intégrale de biodiversité
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