La FAO alerte sur les risques d’une surexploitation des ingrédients issus de végétaux sauvages

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Forêt de Baobabs à Madagascar © Yann Arthus-Bertrand

L’encens, le pygeum, le karité, la jatamansi, la gomme arabique, le sceau d’or, la candelilla, l’argan, le baobab (sa variété A. digitata), la noix du Brésil, la réglisse et le genévrier (Juniperus communis)… ces noms ne sont pas tous inconnus puisqu’il s’agit d’ingrédients naturels qui reviennent de plus en plus dans la composition des produits du quotidien. Ils ont en commun d’être des ingrédients (une liste détaillée des usages est disponible en fin d’article) provenant de végétaux sauvages. La FAO les qualifie de « plantes sauvages vedettes » en raison de leurs nombreux usages tout en alertant sur les risques d’une augmentation de la demande en ingrédients issus des végétaux sauvages. Avec l’ONG TRAFFIC et l’UICN, la FAO consacre un rapport Wild Check: Assessing risks and opportunities of trade in wild plant ingredients (Regard sur la flore: évaluation des risques et des perspectives du commerce des ingrédients de végétaux sauvages) à ces plantes, car au-delà de ces 12 espèces végétales mises en avant, l’être humain continue d’exploiter des milliers de plantes sauvages.

Portée par l’attrait pour le naturel, la demande pour les produits issus de végétaux sauvages augmente et le marché représente un chiffre d’affaire de plusieurs dizaines milliards de dollars chaque année au niveau mondial. En deux décennies, le volume des ventes en valeur aurait augmenté de 75 %. Selon l’université de Rhodes en Afrique du Sud, plus de 5,8 milliards de personnes pourraient recourir à ces produits dans les années à venir. Aux États-Unis, le marché des compléments alimentaires d’origine naturelle a atteint les 11,3 milliards de dollars en 2020.

Ces facteurs laissent craindre une augmentation de la pression sur ces ressources. Car, ce ne sont pas seulement 12 végétaux, mais des milliers d’espèces sauvages ou semi-sauvages qui sont exploitées. La surexploitation, la dégradation et la destruction des écosystèmes ou encore le réchauffement climatique menacent ces plantes sauvages utilisées encore de nos jours par les êtres humains. Le commerce des espèces sauvages animales ou végétales peut représenter une menace pour leur survie et fait l’objet d’une convention : la CITES (Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction).

En effet, sur les 12 végétaux recensés par la FAO, 1 est « gravement menacé » (la Jatamansi, plante aromatique qui pousse dans l’Himalaya), 1 autre (l’encens) est « quasi menacé », 5 sont « vulnérables », 2 sont des « préoccupations mineures » et l’état des 3 autres n’a pas encore pu être évalué. Ces ingrédients d’origine végétale entrent dans la composition de produits alimentaires, cométiques, médicinaux et pharmaceutiques.

« L’utilisation durable des végétaux sauvages a une incidence cruciale sur la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance de millions de personnes dans le monde. Il est temps de prendre en compte les végétaux sauvages avec tout le sérieux requis dans nos efforts visant la protection et la restauration des habitats, la promotion des systèmes agroalimentaires durables et l’instauration d’économies inclusives, résilientes et durables, et ce tout particulièrement alors que les pays se consacrent actuellement au redressement post-covid », a déclaré Sven Walter, qui dirige l’équipe des produits et statistiques forestiers au sein de la FAO.

Julien Leprovost

Les 12 plantes sauvages vedettes

La liste détaillée présentée dans le communiqué de la FAO Les 12 plantes sauvages vedettes: ingrédients prisés, certains végétaux sauvages vulnérables sont soumis à une explosion de la demande 

  • Encens: Présente dans le nord-est de l’Afrique, ainsi qu’à Oman, en Somalie et au Yémen, cette résine d’arbre est utilisée directement sous forme d’encens, ainsi que pour l’aromathérapie, les cosmétiques, les parfums et la médecine traditionnelle. Situation en matière de conservation: quasi menacé.
  • Pygeum: Cet arbre, dont l’écorce figure aussi parmi les substances qui entrent dans la composition de médicaments et de produits d’herboristerie sous les noms de prunus, de cerisier africain, d’ocotea ou d’amandier africain, pousse dans les forêts d’Afrique tropicale. Situation en matière de conservation: vulnérable.
  • Karité: Pousse en Afrique, du Sénégal à l’Ouganda. Utilisé largement dans l’industrie alimentaire comme équivalent du beurre de cacao, le beurre de karité est aussi très présent dans les produits cosmétiques. Il est également employé comme matière grasse pour une cuisson saine dans ses zones de production. Situation en matière de conservation: vulnérable.
  • Jatamansi: Plante aromatique vivace qui pousse dans l’Himalaya, ses racines sont récoltées pour leurs propriétés médicinales. Situation en matière de conservation: gravement menacé.
  • Gomme arabique: Extraite d’un arbre qui pousse en Afrique, elle est principalement utilisée dans les industries alimentaire et pharmaceutique comme additif, émulsifiant ou stabilisateur. Situation en matière de conservation: non évaluée.
  • Sceau d’or: Appelée aussi hydraste du Canada, ou racine jaune, cette espèce originaire de l’est de l’Amérique du Nord est principalement utilisée dans la fabrication de médicaments. Situation en matière de conservation: vulnérable.
  • Candelilla: Présente au Mexique et aux confins des États-Unis, la cire de candelilla était un ingrédient courant du chewing-gum. Elle sert d’additif alimentaire (E902) et entre dans la composition de produits cosmétiques et pharmaceutiques, mais aussi de cires industrielles et de cirages. Situation en matière de conservation: non évalué.
  • Argan: Ses propriétés anti-âge en font un produit cosmétique recherché des consommateurs européens et nord-américains, et son huile, aussi appelée «huile marocaine», est également utilisée pour traiter un certain nombre de pathologies, de l’acné à l’arthrite. L’arbre pousse en Algérie, au Maroc, en Mauritanie et au Sahara occidental. Situation en matière de conservation: vulnérable.
  • Baobab: La variété A. digitata de cette espèce est originaire du continent africain. La poudre de baobab entre dans la préparation d’aliments et de boissons; et l’huile extraite de ses graines sert à la fabrication de produits cosmétiques. Situation en matière de conservation: non évalué.
  • Noix du Brésil: Produit entièrement récolté dans la nature; l’arbre est principalement exploité pour ses fruits à coque nutritifs et comestibles, riches en nutriments et en antioxydants (magnésium, zinc, protéines et sélénium). Ce fruit à coque a contribué à la sauvegarde de millions d’hectares de forêt amazonienne, raison pour laquelle il est souvent considéré comme la pierre angulaire de la conservation de la forêt amazonienne. Situation en matière de conservation: vulnérable.
  • Réglisse: Cette plante vivace, originaire d’Eurasie, d’Afrique du Nord et d’Asie occidentale, est principalement utilisée à des fins médicinales, comme édulcorant et dans l’industrie du tabac. Situation en matière de conservation: préoccupation mineure.
  • Genévrier: Juniperus communis est une espèce des zones tempérées et subarctiques de l’hémisphère Nord. Ses baies sont un ingrédient essentiel de la fabrication du gin. Les baies sont aussi utilisées comme assaisonnement culinaire, huile essentielle; elles sont un ingrédient de certains cosmétiques et sont employées de longue date dans la médecine traditionnelle et certains rites religieux. Situation en matière de conservation: préoccupation mineure. »

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