Le ministre indien de l’énergie Raj Kumar Singh a annoncé devant les parlementaires l’intention du gouvernement d’interdire les exportations de crédits carbone pour le secteur de l’énergie. Il n’a toutefois pas précisé les modalités d’une telle mesure, rapporte Bloomberg le 8 aout. Les contours de la mesure restent encore flous, mais elle doit servir à préparer les entreprises indiennes à l’augmentation du prix et des taxes sur le carbone au niveau international tout en contribuant à la lutte contre le réchauffement climatique. Cela pourrait signifier que les entreprises indiennes ne pourront plus vendre leurs crédits carbone à l’étranger. Cela fait partie d’un projet de loi d’orientation énergétique visant à assurer la transition vers une économie décarbonée. L’une des ambitions du texte de loi est que la moitié (50 %) de l’électricité du pays provienne des énergies propres d’ici la fin de la décennie, or ce taux n’est actuellement que de 42 %. L’Inde reste encore un grand consommateur de charbon et tente de s’en affranchir peu à peu en affichant un objectif de zéro émission nette pour 2070 lors de la dernière COP à Glasgow.
En interdisant l’exportation des crédits carbone, l’Inde cherche à établir un marché local du carbone. « Ces crédits devront être générés par des entreprises domestiques, ils devront être achetés par des entreprises domestiques », a déclaré le ministre indien de l’énergie Raj Kumar Singh devant les parlementaires. Les crédits carbone sont générés par des entreprises qui parviennent à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre (ou à en éviter), ces crédits peuvent ensuite être revendus à d’autres qui n’y parviennent pas afin que ces dernières se mettent en conformité. En l’absence de précisions sur les mesures envisagées par le gouvernement indien, l’annonce de la fin possible des exportations de crédits carbone jusqu’à ce que le pays atteigne ses objectifs climatiques et énergétique laisse les acteurs de la finance carbone en Inde sceptique sur sa portée et son effectivité. Ils ne savent pas encore si d’autres secteurs seront concernés comme la gestion des forêts ou des déchets. Dans une note de réaction sur le site Ecosystem Marketplace, Niroj Mohanty, expert en finance carbone en Inde, note que : « aujourd’hui en Inde, la demande pour des crédits carbone issue de la compensation volontaire s’avère très faible. […] Le message envoyé en interdisant les exportations de crédits carbone ne prend pas en compte certains secteurs pour lesquels de larges investissements sont nécessaires et passent par la finance carbone ».
Il faudra donc attendre de connaître précisément la nature du projet du gouvernement indien et de voir le contenu de la loi et ses répercussions sur le second pays le plus peuplé du monde alors qu’il est à la fois en pleine croissance énergétique et en pleine transition. La mise en place d’un marché du carbone au niveau national fait partie de cette évolution. D’autres pays, comme notamment la Chine qui a lancé le sien en 2021, sont aussi en train d’emprunter cette voie.
Julien Leprovost
A lire aussi
La Chine lance officiellement son marché du carbone
The carbon credits market: The past, present and future! dans the Times of India
Urgence climatique: l’Inde sous pression pour repenser sa dépendance au charbon
Charbon : air pur ou énergie ? l’épineux dilemme de l’Inde
L’Inde mise sur la bouse de vache, une source d’énergie renouvelable prometteuse
Climat: l’Inde s’est engagé à ratifier l’accord de Paris cette année, selon Washington
Découvrez notre projet de biogaz en Inde, reconnu depuis plus de 10 ans !
Ecrire un commentaire