L’association La Frugalité heureuse et créative a mis en ligne une pétition demandant une réduction de la TVA sur les matériaux de construction éco-responsables. En ligne depuis le 9 janvier, cette pétition a déjà reçu le soutien de plus de 3000 personnes. Ils veulent obtenir une diminution de la TVA pour l’emploi des matériaux biosourcés, géosourcés et de réemploi dans la construction et la rénovation. Le texte propose que, sur les matériaux éco-responsables, la TVA passe de 20 % à 5,5 % dans la construction et de 10 % à 2,1 % pour leur utilisation dans tous types de travaux de rénovation et de réhabilitation. L’idée est de rendre ainsi les matériaux de construction naturelle plus compétitifs par rapport au béton ou aux produits de synthèse issus de la pétrochimie, un enjeu important alors que la rénovation du bâti français est un chantier clef de la réussite de la transition énergétique.
Rendre abordable les matériaux biosourcés, géosourcés et le réemploi
« Réduire la TVA sur les matériaux de construction vertueux concerne tout le monde. Car cela va de la grande construction au bricolage. Par exemple, l’aménagement d’une maison peut s’effectuer à moindre coût en choisissant de la laine de bois au lieu de la laine de verre », explique Philippe Maddec, architecte et urbaniste, cofondateur de la Frugalité heureuse et créative.
[À lire aussi Philippe Bihouix : « la vraie ville « smart », c’est celle qui repose avant tout sur l’intelligence de ses habitants »]
La baisse des coûts des matériaux biosourcés, géo sources ou de réemploi les rendrait tout aussi compétitifs que le béton ou les plastiques. Philippe Madec ajoute : « il faut jouer sur tous les leviers disponibles pour réduire les coûts. En tant qu’architectes et bâtisseurs, nous voyons bien que pour faire des économies sur des projets, les maîtres d’ouvrage décident souvent de faire des économies sur le choix des matériaux. Or, ceux-ci ont un impact environnemental important. » Il rappelle que selon l’ONU, le secteur de la construction et de l’exploitation des bâtiments représente plus du tiers des émissions de gaz à effet de serre dans le monde (38 %) et la construction jusqu’à 60 % du volume mondial des déchets. L’architecte remet en perspective les ordres de grandeur : « l’ambition de la pétition est de faire en sorte qu’on décarbonne le secteur du bâtiment. Il serait bien que la colère de tous contre le mésusage de l’avion, qui représente de 3 à 4 % des émissions de gaz à effet de serre, se porte aussi sur le béton. »
[À lire aussi L’ONU appelle à mieux préserver le sable, seconde ressource naturelle la plus exploitée au monde après l’eau]
Les matériaux biosourcés et géosourcés regroupent des matériaux naturels comme le bois, la terre crue, la pierre, le chanvre, la paille, le bambou, l’herbe ou encore le mycélium employé pour fabriquer des briques. Réduire leurs coûts aiderait aussi les filières industrielles à mieux se structurer. Philippe Madec rappelle également qu’il est important de démolir le moins possible l’existant : « il faut arrêter de vouloir à tout prix faire du neuf et apprendre à regarder différemment les questions posées aux bâtisseurs. De plus, si on ne peut pas réhabiliter ou réutiliser un bâtiment, il faut tenter de le déconstruire de manière sélective pour récupérer des éléments dont le réemploi est possible comme les fenêtres ou des charpentes. »
[À lire aussi L’essor du chanvre industriel en France, une plante ayant mauvaise presse mais des vertus écologiques]
Réduire la TVA, une mesure incitative plutôt que punitive
« Compte tenu de l’impact catastrophique de la construction, il est indispensable de réaliser que les matériaux sains et peu énergivores sont de première nécessité. Il faut arrêter de favoriser des matériaux dont l’impact sur la planète est connu, pourquoi restent-ils moins chers ? Ce n’est pas un rêve ou une utopie, on sait faire autrement dans la construction et la rénovation. On a donc besoin d’un soutien au niveau de la fiscalité. Même si on a déjà gagné la bataille des idées, il reste à gagner celle du terrain. On ne peut pas attendre l’arrivée d’une éventuelle taxe carbone dont on ignore les modalités », conclut Philippe Madec.
Julien Leprovost
La pétition sur le site MesOpinions.com
Le site de l’association la Frugalité heureuse et créative dans l’architecture et dans le management des territoires
À lire aussi
Recyclage : les chantiers de démolition, une mine pour les producteurs de matériaux de construction
Le béton-ciment, troisième « pays » des émissions de gaz à effet de serre
Ecrire un commentaire