San Rafael de Guatuso (Costa Rica) (AFP) – Dans le nord du Costa Rica, sur les flancs du volcan Tenorio et les rives des eaux turquoises du célèbre Rio Celeste, le peuple autochtone maleku réclame en vain sa part des retombées du tourisme sur ses terres ancestrales.
Dans la cordillère de Guanacaste, à environ 200 km au nord de la capitale San José, un petit lac et sa cascade haute d’une trentaine de mètres sur le « Rio Celeste » font chaque jour la joie d’un millier de touristes qui captent sur leurs appareils photo l’étonnante couleur révélée par le soleil du mélange d’acidité, de cuivre et de silicate d’aluminium issus des terres volcaniques.
Au coeur des forêts du Parc National du Volcan Tenorio et ses 18.000 hectares peuplés d’une riche faune, cette merveille naturelle dont elle est le joyau se trouve sur « une zone autochtone maleku », reconnaît le guide du Parc National, Félix Rojas.
Mais les visiteurs ne poussent jamais jusqu’au petit village indigène de Palenque Margarita, où des autochtones maleku leur ont pourtant préparé tout un programme de découverte de leur culture ancestrale au prix de 65 dollars par personne.
« Notre visite comprend une découverte de plantes médicinales, des activités artistiques, de tir à l’arc, une cérémonie traditionnelle maleku en costume, un déjeuner de cuisine typique… tout cela en langue maleku jaica », explique à l’AFP Dagoberto Elizondo, qui attend en vain le chaland.
Les rues sablonneuses du village parsemées de panneaux en espagnol, anglais et maleku jaica vantent une alternative touristique sans grand succès auprès des passagers qui débarquent de leurs autobus.
« Lieux sacrés »
Cela fait des mois qu’aucun client ne s’est présenté à la porte de la maison au toit de palme de Dagoberto Elizondo, embaumée par l’arôme des graines de cacao, torréfiées lentement sur le foyer.
« Dans les territoires autochtones du Costa Rica il n’y a pratiquement pas de travail. De quoi allons-nous vivre ? Aujourd’hui il faut de l’argent pour tout », se lamente le guide.
L’ethnie maleku est l’une des huit peuplades autochtones du Costa Rica, qui, à elles toutes, représentent 2,4% des 5,2 millions d’habitants du pays.
Les maleku, qui revendiquent le Rio Celeste comme faisant partie de terres ancestrales usurpées, se plaignent amèrement que le gouvernement costaricien empoche les droits d’entrée au Parc National sans qu’ils en profitent.
Aujourd’hui, seuls trois villages occupent moins de la moitié du territoire, selon l’organisation de défense des droits des peuples autochtones IWGIA.
Ce territoire du Rio Celeste, déplore Dagoberto Elizondo, « nous l’avons perdu, maintenant il est au gouvernement. Les cultures autochtones n’intéressent pratiquement pas les gouvernements » du Costa Rica.
Le petit pays centroaméricain a pourtant adhéré à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et à la Convention de l’Organisation internationale du travail (OIT) sur leurs droits à la terre.
La rivière et le volcan sont des « lieux sacrés » pour les maleku relève auprès de l’AFP Jenny Lacayo, une autochtone de Palenque Margarita âgée de 50 ans, qui elle aussi a mis sur pied un programme « culturel et touristique ».
Lorsqu’un maleku sent qu’il va mourir, il choisit un lieu où doit aller son âme, en général le volcan ou la source du Rio Celeste, explique-t-elle.
Selon la tradition du peuple autochtone, les visiteurs du Parc devraient se purifier avant d’entrer en consommant du cacao, un aliment sacré pour les maleku. Mais personne n’explique aux touristes la dimension « spirituelle » du lieu, déplore la guide indigène.
© AFP
Ecrire un commentaire