Le Bourget (France) (AFP) – Ni Boeing ni Airbus ne mettra de nouvel avion en service avant 2035. Mais pour parvenir à réduire drastiquement l’empreinte climatique de l’avion du futur, les études sur de nouvelles formes aérodynamiques ou des moteurs ultra-sobres sont déjà bien entamées.
L’A320 a effectué son premier vol en 1987, le Boeing 737 20 ans plus tôt.
Les deux avions les plus utilisés dans le monde ont évolué au fil des années pour les rendre plus efficaces, c’est-à-dire consommant moins de carburant, qui représente à lui seul près de 30% des coûts d’une compagnie aérienne.
Mais pour la neutralité carbone en 2050 à laquelle se sont engagés les 193 Etats de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), il faut changer de braquet. Ce n’est pas pour tout de suite.
Pour l’heure, il s’agit de « jouer avec les cartes que l’on a en mains », selon Christian Scherer, directeur commercial d’Airbus: les avions de dernière génération consomment 15% de moins et donc émettent autant de CO2 en moins mais la flotte mondiale en service est encore composée aux trois quarts d’avions de générations précédentes.
« Nous préparons l’entrée en service (d’un nouvel avion) dans la seconde moitié de la prochaine décennie, en visant 2035 », ce qui suppose de lancer le programme à la fin de la décennie 2020, a abondé le patron d’Airbus Guillaume Faury dans un entretien à Aviation Week.
Même chose chez Boeing qui ne « mettra même pas sur la planche à dessin » un nouvel avion tant que les « briques technologiques » ne seront pas prêtes, selon son PDG Dave Calhoun.
« Nous n’ignorons pas l’avenir », a pourtant insisté dimanche Stan Deal, patron de la branche Avions commerciaux du géant américain. « Nous nous concentrons sur les capacités qui nous permettront d’obtenir une amélioration de l’ordre de 20% ou plus lorsque nous mettrons le nouveau produit sur le marché », a-t-il affirmé.
Avec la Nasa, Boeing a investi plus d’un milliard de dollars dans les recherches sur une nouvelle architecture révolutionnaire, appelée Aile haubanée transonique (Transonic Truss-Brace Wing), un avion dotée de très longues ailes soutenues par des haubans, qui pourrait permettre de réduire jusqu’à 30% la consommation et les émissions de CO2.
En France, l’Office de la recherche aérospatiale (Onera) travaille également sur le projet Gullhyver d’aile haubanée à grand allongement, présenté cette semaine au salon du Bourget comme d’autres innovations. « Plus l’aile est longue, moins la traînée de l’avion est importante et moins l’avion consomme », explique Philippe Beaumier, directeur des programmes aéronautiques civils à l’Onera.
Projet Gullhyver
En raison de son élasticité, l’aile est soutenue par un bras. L’avion aurait lui un fuselage non circulaire, de forme légèrement aplatie, pour optimiser son aérodynamisme.
Airbus travaille également sur une aile aux extrémités pliantes inspirée du vol de l’albatros afin de minimiser les turbulences en vol et gagner 10% de consommation.
Le projet Gullhyver repose également sur une motorisation dite non carénée ou « open fan », c’est-à-dire un moteur qui ne sera pas ceint d’une nacelle. Selon Philippe Beaumier, « on est arrivé au taux optimal avec une configuration carénée », il n’est plus possible d’améliorer le rendement propulsif.
L’anglais Rolls-Royce avec son UltraFan et l’américain Pratt&Whitney, avec son projet de moteur réutilisant la vapeur d’eau émise par la combustion, travaillent à leurs propres concepts de futurs moteurs frugaux. CFM a, elle, misé sur l' »open fan ».
Cette coentreprise entre le français Safran et l’américain GE fait travailler plus de 1.000 ingénieurs depuis 2021 sur un tel concept, baptisé Rise, suivi de près par Boeing et Airbus.
Ce moteur ultra-frugal pourra fonctionner intégralement avec des carburants d’aviation durables, contre 50% pour les avions actuels, et sa consommation sera réduite de 20%, affirme Martin Brioude, patron de l’ingénierie chez Safran Aircraft Engines.
« Il n’est plus sur papier, il fonctionne, nous commandons des éléments pour les essais au sol et en vol », affirme Mohamed Ali, son homologue chez GE.
Le moteur sera testé en vol, monté sur un A380, dans la seconde moitié de la décennie. Quant à son entrée en service, « toutes les technologies sont en cours de maturation afin d’être prêtes au bon moment », promet Mohamed Ali. Quand Boeing et Airbus le seront.
© AFP
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