Une rivière brésilienne recouverte de mousse toxique

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Vue aérienne de la rivière Tietê recouverte d'une mousse toxique, le 7 juillet 2023, à Salto, au Brésil © AFP NELSON ALMEIDA

Salto (Brésil) (AFP) – Sous les tropiques brésiliens, un cours d’eau semble recouvert d’une couche de neige fraîchement tombée. Mais c’est en fait une mousse toxique qui teint en blanc la rivière Tietê, polluée par des résidus de détergents et autres produits de nettoyage.

Une image impressionnante, à 100 km de Sao Paulo (sud-est), la plus grande mégalopole d’Amérique Latine.

Affluent du fleuve Parana, la rivière Tietê, qui s’étend sur 1.100 km, est fondamentale pour l’alimentation en eau potable, l’irrigation des terres agricoles et la production d’énergie de la région la plus peuplée du Brésil.

La mousse, visible depuis la fin de la semaine dernière, est la face visible de la pollution causée par le phosphate et le phosphore issus de produits de nettoyage rejetés dans les égouts de l’agglomération de Sao Paulo (22 millions d’habitants).

« Quand ces résidus entrent dans les eaux à fort courant du Tietê, c’est comme si on allumait une machine à laver », explique à l’AFP Malu Ribeiro, responsable des questions de politique publique de l’ONG SOS Mata Atlântica.

La mousse toxique, qui s’est étendue à un moment donné sur plus de 10 km du cours d’eau, a surtout été observée dans les environs de Salto, ville de 140.000 habitants. Elle est notamment présente dans les nombreuses cascades de la région.

La mousse dégage une forte odeur, au risque de provoquer des maux de gorge et des troubles respiratoires. Et tout contact avec l’eau polluée peut causer des problèmes de peau.

Sans compter les conséquences pour les poissons et la faune locale, comparables à « une pluie d’acide », selon Malu Ribeiro.

Ce phénomène est récurent, durant les mois de sécheresse de l’hiver austral, quand le débit de la rivière est réduit de moitié, ce qui empêche les produits chimiques, plus concentrés, de se disperser.

Dans les années 90, la situation était encore plus critique: la mousse déferlait parfois jusque dans les rues des villes situées sur la rive.

L’amélioration du réseau de traitement des eaux a permis d’atténuer le phénomène ces dernières années. Mais l’apparition massive de cette mousse la semaine dernière est due « à un changement drastique de la température de l’eau », déplore la spécialiste de SOS Mata Atlântica.

Dans la région, le contraste de température peut être important en hiver, avec des matinées très fraîches et de fortes chaleurs plus tard dans la journée.

« L’eau froide est plus lourde, et elle entraîne les résidus polluants vers le fond (…) Mais quand elle est chauffée par le soleil, ces résidus remontent vers la surface et forment une mousse plus épaisse », décrit Malu Ribeiro.

L’une des solutions serait de faire repousser la végétation sur les rives, pour que le cours d’eau soit plus ombragé.

Mais SOS Mata Atlântica préconise surtout l’interdiction totale du phosphate et du phosphore dans les produits de nettoyage.

Et le traitement des eaux demeure un problème majeur: dans le bassin d’Alto Tietê, qui comprend l’agglomération de Sao Paulo, 86% des eaux usées vont dans les égouts, mais seulement 54% d’entre elles sont traitées, selon des chiffres officiels datant de 2021.

Les autorités locales promettent d’agir, avec notamment « 5,6 milliards de réais (environ 1,05 milliard d’euros) d’investissements dans le réseau de traitement des eaux d’ici 2026 », affirme le secrétariat à l’Environnement et à l’Infrastructure de l’Etat de Sao Paulo dans un communiqué.

© AFP

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