Paris (AFP) – Malgré quelques zones toujours en tension, les nappes phréatiques en France sont globalement dans un bien meilleur état que l’an dernier, mais depuis deux mois leur situation n’évolue guère, alimentant les craintes d’un retour de la sécheresse durant l’été, synonyme de restrictions d’eau.
Au 1er mars, 46% des nappes sont au-dessus des normales mensuelles et 36% restent en dessous, indique jeudi le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM). Les chiffres ne prennent pas encore en compte les récents épisodes méditerranéens, dont la tempête Monica de ce week-end, mais l’effet de ces précipitations qui ruissellent beaucoup devraient être « largement limités », selon le BRGM.
La situation est quasiment la même que fin janvier, où après une forte recharge en début d’hiver, le remplissage a commencé à ralentir.
Elle reste toutefois largement meilleure que l’an dernier à la même époque, quand 80% des niveaux étaient sous les normales.
Les améliorations
En février, mois pourtant très arrosé par endroits, les recharges ont été « hétérogènes ».
Les pluies tombées ces dernières semaines « ont probablement eu des difficultés à s’infiltrer en profondeur à travers des sols peu humides » sur certains secteurs, note le BRGM.
Le mois a été très contrasté au niveau météorologique, oscillant entre des températures printanières avant l’heure – février a été le deuxième plus chaud jamais enregistré en France – alimentant la sécheresse, et des séquences de pluie marquées et persistantes sur certaines régions tandis que d’autres restaient désespérément sèches.
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Entre décembre et fin février, la France a enregistré un excédent de pluie d’environ 10% en moyenne, selon Météo-France.
Une bonne nouvelle pour certaines nappes, de la Bretagne à l’ouest du Massif central et aux Pyrénées-Atlantiques d’une part, et de l’Artois aux vallées alpines d’autre part, qui ont pu se réalimenter avant l’arrivée du printemps, quand la majeure partie de l’eau tombée du ciel sera absorbée par la végétation.
Points noirs
Mais le point noir reste les nappes du Languedoc et du Roussillon. Elles y sont plus basses que l’an dernier et ont même continué à baisser en février sur la plaine du Roussillon et du massif des Corbières, faute de pluies suffisantes.
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Les nappes du sud de l’Alsace, du couloir de la Saône, du sud du Massif central restent aussi à des niveaux bas voire très bas.
Les pluies tombées ces derniers jours ont permis d’atteindre des « pics de crue » sur certaines nappes comme en Nouvelle-Aquitaine et sur l’Artois et « de fortes hausses » localement, par exemple en Provence, a indiqué jeudi lors d’une visioconférence Violaine Bault, hydrogéologue au BRGM.
Concernant le Languedoc, qui a connu ses premières précipitations depuis bien longtemps, « les niveaux des nappes se sont améliorés par endroits mais restent néanmoins insuffisants ».
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« Les pluies violentes ne sont pas forcément les plus efficaces pour la recharge des nappes », une grande partie ayant tendance à ruisseler vers les cours d’eau puis la mer, explique Mme Bault. Si l’on ajoute à cela le fait qu’elles sont tombées sur des sols extrêmement secs, elles ont au mieux suffi à réhydrater les sols en surface mais pas les nappes en profondeur.
Prudence pour l’été
Sur le Sud-Est, il est « très difficilement envisageable » d’envisager des niveaux au-dessus des normales d’ici le printemps, estime le BRGM.
Le reste de la France est-il, lui, à l’abri d’une sécheresse estivale?
S’il y a des raisons d’être « assez optimiste » pour certaines régions « en raison d’un début de recharge satisfaisant », le BRGM reste pourtant « assez prudent » pour les prochains mois.
« En cas de précipitations insuffisantes en mars et avril, l’état des nappes pourrait se dégrader rapidement sur les nappes réactives (qui se rechargent et se vident plus vite, NDLR) et lentement sur les nappes inertielles », où l’eau a besoin de plus de temps pour s’infiltrer, prévient l’organisme.
L’incertitude est d’autant plus grande que Météo-France anticipe une tendance à des températures plus élevées pour mars, avril et mai, favorable à l’évaporation et à l’assèchement des sols.
En 2023, après un nouvel été très chaud, deux tiers des départements métropolitains connaissaient encore en octobre une alerte rouge de « crise sécheresse », entraînant d’importantes restrictions d’usage de l’eau pour l’agriculture, l’industrie et les populations.
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