Bruxelles (Belgique) (AFP) – Des normes durcies aux frais des « pollueurs »: les eurodéputés ont voté jeudi pour mieux encadrer le traitement des eaux urbaines usées dans l’UE, en faisant payer les industriels de la pharmacie et des cosmétiques, principales sources des micropolluants entrant en stations d’épuration.
Le Parlement européen a validé par 481 voix (79 contre, 26 abstentions) l’accord conclu sur le texte fin janvier entre les eurodéputés et les Etats membres, avant un ultime feu vert des Vingt-Sept.
Le texte, qui révise une réglementation de 1991, abaisse drastiquement (dès 1.000 habitants) le seuil à partir duquel les agglomérations seront obligées d’ici 2035 d’éliminer les matières organiques biodégradables dans les eaux usées avant rejet dans l’environnement.
Les stations des grosses agglomérations (traitant les eaux de plus de 150.000 habitants) devront par ailleurs garantir d’ici 2039 l’élimination de l’azote et du phosphore, puis d’ici 2045 d’un large spectre de micropolluants, avec des cibles intermédiaires pour les réduire d’ici là. Les stations plus petites (à partir de 10.000 habitants) seront également concernées à partir de 2045, sous conditions.
Le texte renforce la surveillance de virus, polluants chimiques (notamment PFAS) et microplastiques.
Surtout, il établit un principe « pollueur-payeur » inédit en imposant à l’industrie pharmaceutique et des cosmétiques une « responsabilité élargie »: selon Bruxelles, 59% des micropolluants en stations d’épuration viennent des produits pharmaceutiques et 14% des cosmétiques.
Ces deux secteurs devront couvrir conjointement 80% des coûts supplémentaires de modernisation et traitement pour l’élimination des micropolluants.
Pour les 20% restants, le texte mise sur un financement national, notamment afin d’éviter une répercussion financière trop forte sur les laboratoires et indirectement sur les prix des médicaments et ne pas ainsi compromettre leur disponibilité ou accessibilité aux plus vulnérables.
« Nous veillons à ce que ces règles n’aient pas d’impact disproportionné sur le caractère abordable des médicaments », insiste l’eurodéputé finlandais Nils Torvalds (Renew, libéraux), rapporteur du texte.
La Commission européenne avait initialement proposé de facturer 100% des coûts aux industriels, un taux abaissé sous la pression du Parlement et des secteurs ciblés.
« Ces frais dont l’ampleur est largement sous-estimée pénaliseront principalement les médicaments génériques abordables », pour lesquels les marges de rentabilité sont déjà faibles, au risque de réduire leur production, s’était insurgé en janvier Adrian van den Hoven, patron de la fédération Medicines for Europe.
Le texte introduit par ailleurs un objectif de « neutralité énergétique » d’ici 2045: les stations d’épuration d’eaux usées urbaines devront augmenter progressivement leur part d’énergies renouvelables, à 20% d’ici 2030, 40% d’ici 2035, puis 70% d’ici 2040.
Un objectif indicatif est également introduit pour mieux gérer les excès de précipitations. Enfin, les États seront tenus de favoriser la réutilisation des eaux usées traitées, en particulier dans les zones de stress hydrique.
© AFP
À lire aussi
À Vienne, le pompage des eaux usées pour chauffer sans gaz russe
L’hydrologue Emma Haziza : « toute espèce vivant sur Terre a autant besoin d’eau que nous »
Suspension du plan Ecophyto, décryptage sur les enjeux derrière la réduction des pesticides
Ecrire un commentaire